KORN
THE PARADIGM SHIFT (Album)
2013, Prospect Park Records


1. Pray for Me
2. Love & Meth
3. What We Do
4. Spike in My Veins
5. Mass Hysteria
6. Paranoid and Aroused
7. Never Never
8. Punishment Time
9. Lullaby for a Sadist
10. Victimized
11. It's All Wrong

Bonustracks (Deluxe Version)
12. Wish I Wasn't Born Today
13. Tell Me What You Want


Hacktivist : 15/20
Qu'on se le dise, à force d'entendre râler à longueur de journée et de voir tout ce beau monde se plaindre, chialer et s'arracher la peau à la seule évocation de la bande à Davis, on finit par se persuader soi-même que Korn a toujours été imbattable dans la catégorie de la musique de supermarché. Touchons un point sensible à présent en évoquant le fait que finalement (et c'est une réalité) l'auditeur qui n'a jamais jeté une oreille sur ce pourtant pilier du néo-metal et même du metal on peut le dire, qui pourtant, se permet sans encontre de critiquer négativement l'ensemble des productions de la formation (même les meilleures, de toute façon, cela importe peu) a su se faire entendre de ceux qui ont systématiquement vu le néo comme une sorte de trublion et de version massacrée du ("vrai" ?) metal. Comme beaucoup, Korn n'a pas la prétention de n'avoir sorti que des albums à couper le souffle, surtout depuis « Untouchables » / « Take a Look in the Mirror » c'est vrai, mais le problème est ailleurs puisque le groupe reçoit en fait plus de critiques qu'il n'y a d'auditeurs. Ce qui est assez problématique en somme. Donc on va le faire à l'ancienne, et disons très simplement ce « The Paradigm Shift » sera quand même un petit f*** adressé à toutes ces personnes fermées et têtues, qui suivent, tels des moutons, l'avis non fondé des autres au lieu de se construire un avis musical assez objectif pour être pris au sérieux...

En dehors de cela, il est vrai que le retour du guitariste légendaire dont il n'est même plus utile de présenter n'est pas passé inaperçu mais là encore, les éloges faîtes à son encontre restent assez justifiés, compte tenu de ce qu'il a pu apporter sur les trois, quatre premiers Korn dont l'éponyme « Korn » des 90's ou plus récemment sur son projet Love & Death avec l'inespéré et superbe opus du nom de « Between Here and Lost » publié en 2013 aussi. Certes, le quintet ne soulèvera certainement pas les montagnes avec « The Paradigm Shift » mais ils avaient tellement touché le fond avec le précédent scénario-catastrophe dubstep « The Path of Totality » qu'aujourd'hui, on ne sait trop comment, ils font leur retour en force avec onze nouveaux morceaux plutôt très défendables. Le meilleur album de Korn depuis des lustres, ça reste une évidence, surtout que ces fiers néo-metalleux ont pu conquérir une autre partie du public qui n'exprimait aucun attachement particulier à cette formation. L'album contient donc de superbes hits et quelques tueries mais à côté de ça, certaines parties musicales de l'oeuvre restent toutefois bien faibles et/ou trop brouillonnes. De plus, étant donné que l'on a aussi affaire à un mélange néo-metal/électro très ancré dans la modernité et l'air du temps, la production signée Don Gilmore s'avère un poil trop clean, surproduite... De toute façon, il est peu probable de réussir à produire un album des années 2010 à la façon des années '90 à moins d'émettre des regrets par rapport au passé ou de refuser d'évoluer avec son temps.

Si nous avions un titre à garder précieusement sous le coude et qui puisse être irréprochable à bien des égards, la deuxième piste serait parfaite. En effet, par son titre, « Love & Meth » renvoie quelque peu au projet d'Head (Love & Death) mais ici, les fortes empruntes électroniques ont été travaillées avec minutie et talent, donnant lieu à un mélange très harmonieux. Le rendu artistique est en effet aussi soigné que ne le suggère le clip-vidéo et l'équilibre réussit à se retrouver entre l'électro, le néo et donc les parties plus lourdes qui s'y trouvent. Ce regain de nervosité est bien visible sur cette pièce, si bien que Davis s'octroie le plaisir de nous balancer quelques growls en pleine face à côté de ces refrains pour le moins profonds et percutants. Les efficaces « Victimized » - « Mass Hysteria » auquel on ne peut s'empêcher d'avoir une pensée pour notre groupe Français préféré et même « What We Do » qui, dès les premières notes, pourrait vaguement ressembler à un certain « Foxy, Foxy » de Rob Zombie (même si c'est assez léger et subjectif après tout) se hissent au sommet de cet opus. Les riffs sont assez proches entre eux, effectivement, mais la recette fonctionne bien, à condition d'écouter l'album d'un trait et de se concentrer sur la musique. Ce n'est rien de le dire, « What We Do » est résolument metal, et à notre grande surprise, finit le temps des couplets et des refrains pauvres et insipides de « Korn III: Remember Who You Are » - le chant paraît très assuré, haineux et respire une forme de vengeance et d'agression qui nous redonne espoir pour la suite.

Ça a quand même été une sacrée blague de la part du groupe de positionner un titre comme « Never Never » - seul morceau aux connotations pop de l'album, comme lead single de « The Paradigm Shift ». Mais c'est un peu à l'image du fameux « When We Stand Together » de Nickelback à vrai dire, qui était intégré dans « Here and Now » dans le seul but d'étendre son public, de montrer que le metal, ce n'est pas seulement de grosses brutes gueulardes. Parce que ce titre n'a jamais été représentatif de l'album. La batterie est claire, légère, reléguée en arrière-plan, tandis que ce son pop-rock donne un bon coup de jeune à nos grands adolescents de Korn qui ont malgré tout grandi depuis... Jonathan Davis nous offre un chant plutôt entraînant, légèrement groovy, les choeurs sont fins, doux et le break est carrément dans une veine dubstep. Osons l'appellation d'un "white metal" tiens, même si après tout, il n'y a que très peu de screams ou d'accents typiquement néo-metal ici. Un réveil en douceur en somme. Hormis cela, « Spike in My Veins » nous délivre un aspect un peu brouillon au premier abord, où tous ces éléments ont l'impression de mal se mélanger, s'intégrer. Le mixage est même un peu limite sur certains points mais vu la qualité de l'album proposée, ceci ne nous ne dérange pas vraiment car il y a même ce petit côté "négligé" qui s'accorde bien avec ce crachat dirigé droit vers les médias. Ces sons électro peuvent néanmoins être gênants pour l'auditeur tant ils sont massifs et explosent nos tympans à force d'écoutes, car de plus, le seul petit solo qui s'y trouve est planqué au second plan et même recouvert par les nappes électro. Même chose pour « Punishment Time » qui est assez repoussante, étrange voire tout bonnement mauvaise. Par contre, « Paranoid and Aroused » a tendance à posséder un peu d'ancien Korn tant sur le plan vocal que dans certaines ambiances un peu renfermées, plaintives et old-school. C'est d'ailleurs un des titres les moins mangés par les sonorités électro et le plus étonnant pour ne pas dire carrément énorme.

Musicalement, artistiquement, visuellement, le retour de Korn est vraiment réussi, même si tout n'est pas parfait encore. Revoir Brian "Head" Welch dans la bande fait aussi beaucoup de bien et désormais, 2013 sera marquée par le passage de ce « The Paradigm Shift » et le renouveau d'une formation qui s'était presque auto-enterrée depuis des lustres...

2014-10-04 18:09:12