1. LE CON DE MINUIT

Il est né là-bas, dans des foyers sans nom,
Un gosse errant, sans futur ni maison.
Il a roulé sa vie, au volant, dans la nuit,
Puis la radio l’a pris, entre deux insomnies.

À minuit précises, il enfumait l’antenne,
Déclamait ses vers, ses "ma bibi" incertaines.
Ils l’ont vu, l’ont pris pour cible, l’ont mis à nu,
Mais lui, il croyait encore à ce rêve qu'on lui avait vendu.

Oh Gérard de Suresnes, voix rauque au micro,
Tu hurlais tes rêves dans un studio.
Soyons honnêtes, on riait de toi,
Mais t’as cru briller, même dans le désarroi.

Faut pas pleurer Gégé,
Même si t’as fini sans rien,
Dans un carré d’oubliés,
Personne pour te tendre la main.

Et dans l’arrière-boutique, la nuit fait son nid,
Gérard s’est endormi, sans bruit, sans merci.
Le con de minuit s’en est allé sans bruit,
Éteint comme une clope, sans gloire et sans cri.

Plus d’antenne, plus de rires, plus de coups d’éclat,
Juste un homme qu’on oublie, qu’on n’écoutait pas.
Mais quelque part, peut-être, sous les néons fanés,
Un vieux jingle s’élève, pour ne pas l’effacer.

Oh Gérard de Suresnes, voix rauque au micro,
T’as ri, t’as pleuré, t’as encaissé les mots.
Star des sous-sols, prince des laissés-pour-compte,
T’as tenu l’antenne, mais la lumière s’effondre.

Faut pas pleurer Gégé,
Même si t’as fini sans rien,
Dans un carré d’oubliés,
Personne pour te tendre la main.

Dans un carré d’oubliés,
Personne pour te tendre la main.