S'il est des formations désireuses de prendre le temps nécessaire à la pleine maturité de leur projet, ce trio italien fondé en 2009 à Prato, en Toscane, serait assurément du nombre. Nous ayant laissés sur le souvenir enchanté d'un charismatique «
Novarize », son second album full length, le voici donc de retour dans la course, quelque six années plus tard, muni d'un opus du même acabit, sobrement dénommé «
Eleven ». Une longue période de latence au cours de laquelle le groupe réalisera néanmoins la bagatelle de 5 singles : «
Lipstick Smile », en 2018, suivi de «
Born Killer », un an plus tard, titre promu durant de nombreux spectacles (Namm Show 2020,
Metal Hall of Fame Gala, 62nd Grammy Awards...) et qui, précisément, impactera l'espace sonore du nouvel opus ; leur succéderont «
Inspiring Milestones V. I », en 2021, «
Warriors » et «
Reach for Me », en 2023. Ce faisant, 4 de ces 5 singles feront partie intégrante des 11 plages que compte cette auto-production. A l'aune des 47 minutes de ce troisième élan, nos acolytes seraient-ils désormais à même de se hisser parmi les valeurs montantes de leur registre metal d'affiliation ?
Dans cette aventure, le quartet de la précédente traversée se voit relayé d'un trio conjuguant les talents de : Carlotta ''Cheryl'' Cimeli, chanteuse non-lyrique et à la caressante empreinte vocale, Marco ''Mark'' De Curtis à la batterie, sans oublier Claudio ''Shark'' Biancalani (Love Theory, en hommage à HIM ;
Ocean Night, en hommage à
Nightwish), aux guitares mais aussi en remplacement de Federico ''Fred'' Urso (Love Tribute) à la basse. De cette collaboration de longue date se dessine un mouvement metal atmosphérique gothique mâtiné de rock mélodique et d'électro pop. Aussi, effeuille-t-on un propos à la fois entraînant, aérien, empreint de délicatesse et romanesque, s'inscrivant dans la veine d'
Issa, Volturian et de
Lacuna Coil, mais aussi de Metalite,
Within Temptation (dernière mouture), Tori
Amos, voire de Fleetwood Mac, soit à quelques encâblures des ''symphonisantes'' mesures du groupe à ses débuts. Tout comme son devancier, ce méfait jouit d'une qualité d'enregistrement ne souffrant que de bien rares approximations ainsi que d'un mixage parfaitement équilibré entre lignes de chant et instrumentation. Il ne nous reste plus qu'à larguer les amarres et à nous installer à bord du navire pour une croisière que l'on espère ponctuée d'îlots enchanteurs...
A l'instar de son aîné, c'est d'un battement d'ailes que cet opus aspirera le tympan du chaland à la lecture de ses passages les plus enfiévrés. Ainsi, on ne mettra qu'une poignée de secondes pour esquisser un headbang bien senti sous l'impact des virulents coups de boutoir et des riffs corrosifs dont se nourrit « Alice », up tempo rock'n'metal atmosphérique gothique à mi-chemin entre
Issa et Volturian. Et ce n'est pas l'entêtant refrain alors mis en exergue par les angéliques impulsions de la sirène qui nous déboutera de ce hit en puissance, tant s'en faut. Dans cette énergie, c'est cheveux au vent que l'on parcourra «
Guardian Angel », mid/up tempo aux sonorités rock atmosphérique typées mid-80s, dans la lignée de Fleetwood Mac ; un troublant effort que l'on retiendra tant pour ses couplets finement ciselés et ses sensibles gammes pianistiques que pour le somptueux solo de guitare leur succédant. Pourvu de coups d'olives un tantinet plus mordants et doté d'une rythmique sanguine, et bien qu'accusant quelques linéarités mélodiques, l'''issien'' up tempo « Break the
Silence », lui, ne relâchera pas sa proie d'un pouce. Enfin, imposant de sémillantes séries de notes tout en maintenant une cadence effrénée, le trépidant «
Lipstick Smile », pour sa part, poussera à une remise en selle sitôt son ultime mesure envolée. Mais le magicien aurait encore d'autres tours dans sa manche, et des meilleurs...
Quand il retient un tantinet les chevaux, le combo italien trouve à nouveau les clés pour nous retenir plus que de raison. Ce qu'atteste, en premier lieu, «
Reach for Me », mid tempo aux riffs épais, au carrefour entre
Lacuna Coil et
Within Temptation ; générant une énergie aisément communicative et glissant le long d'une radieuse rivière mélodique sur laquelle se greffent les claires inflexions de la déesse, la ''tubesque'' offrande ne manque ni d'allant ni de panache. Dans cette dynamique, se faisant à la fois aérien et décochant d'enivrants arpèges d'accords, l'élégant et ''lacunacoilesque'' mid tempo syncopé «
Warriors » happera non moins le pavillon du chaland. On pourra non moins orienter le tympan vers le chavirant et ''volturien'' mid tempo «
Born Killer » à la lumière de son refrain catchy encensé par les fluides modulations de la belle. S'offrant tel un charnel effort aux relents bluesy à la cadence mesurée et recelant un fin legato à la lead guitare, le chatoyant « Let Me Breathe » ne saurait être davantage esquivé. Et comment ne pas se sentir porté aussi bien par les grisants gimmicks guitaristiques que par le sémillant cheminement d'harmoniques que nous propose de suivre l'''issien'' mid tempo « Running » ?
Lorsqu'ils nous mènent en d'apaisantes contrées, nos compères en viennent à nous adresser leurs mots bleus le plus sensibles, avec pour effet de nous assigner à résidence. Ce qu'illustre, d'une part, le félin low tempo « By Your Side », qui, non sans nous renvoyer simultanément à Metalite et à Tori
Amos, nous immerge au cœur d'une power ballade d'une infinie délicatesse ; mis en habits de soie par les sensuelles volutes de la maîtresse de cérémonie et agrémenté d'enivrants arpèges au piano, l'instant privilégié comblera assurément les attentes de l'aficionado de moments intimistes.
Plus encore, dans la lignée coalisée de Tori
Amos et de Fleetwood Mac, «
Underneath » se pose, elle, telle une ballade progressive pétrie d'élégance, romantique jusqu'au bout des ongles ; mise en relief par les troublantes oscillations d'une interprète bien habitée et se chargeant en émotion au fil de sa progression, la tendre aubade ne se quittera qu'avec l'indicible espoir d'y revenir, histoire de goûter à nouveau à cette ronde de saveurs exquises.
Au final, la troupe toscane nous livre un troisième mouvement à la fois rayonnant, empreint de moult subtilités mélodiques, bénéficiant d'une production d'ensemble rutilante et d'arrangements affûtés. Se plaçant dans la lignée atmosphérique de son prédécesseur tout en enrichissant son propos d'une fibre rock délicieusement surannée et d'une insoupçonnée touche bluesy, ce grisant méfait témoigne ainsi d'une heureuse et originale alternative stylistique. A l'aune de son devancier, on aurait souhaité là encore davantage de variété en matière d'exercices de style. De plus, les schèmes d'accords demeurent le plus souvent prévisibles et les prises de risques plus rares aujourd'hui qu'hier. Carences toutefois compensées par une technicité instrumentale affermie, des lignes de chant d'une confondante maestria et par l'absence d'un quelconque bémol susceptible d'affadir l'attention de l'auditorat. Aussi, paré de ce troisième élan, le combo transalpin non seulement franchit une nouvelle étape dans sa carrière, mais détiendrait également l'arsenal lui permettant de rejoindre les valeurs montantes de cet espace metal. Bref, un groupe qui a le vent en poupe...
Note : 15,5/20
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