Mû par un vent d'inspiration renouvelée, le discret combo norvégien originaire de Trondheim revient dans la course, quelque trois années suite à son introductif et truculent EP, «
Mental State ». Le temps pour nos acolytes de peaufiner leur production d'ensemble et de nous gratifier de trois singles («
Come Find Me » en 2023 ; «
Darkest Night » et «
The Hunt » en 2024), soit trois des neuf pistes de leur premier et présent album studio, «
Whispering Embers ». Ce faisant, en quoi les 49 minutes de ce set de compositions permettraient-elles au collectif nord-européen de tenir la dragée haute à ses homologues générationnels, toujours plus nombreux à affluer ?
Plus encore, cette auto-production serait-elle à même de porter dès lors l'exigeante et prudente troupe parmi les valeurs montantes du foisonnant espace metal symphonique à chant féminin ?
Mais avant d'aller plus loin, faisons connaissance avec nos hôtes. Dans ce dessein, le quintet d'hier s'est mué en un sextet, où se conjuguent dorénavant les talents de :
Aina Catrine Hammern, frontwoman au limpide et chatoyant grain de voix, Alex Gregersen et Anders Danielsen (ex-
Haunted By Silhouettes) aux guitares, Martin Borelly à la basse, Trond A. Wiklund aux claviers, suivis d' Anders Kristiansen derrière les fûts. De cette étroite collaboration naît une œuvre rock'n'metal mélodico-symphonique et progressif à la fois impulsive, enjouée et enivrante, jouissant, à son tour, d'une qualité d'enregistrement et d'arrangements orchestraux de bonne facture. Conformément aux aspirations premières de nos compères, se dessine un propos aussi invitant que solaire, dont les sources d'inspiration sont, là encore, à chercher du côté de
Xandria,
Within Temptation,
Delain,
Kingfisher Sky et
Beyond The Black. De quoi nous intimer d'aller explorer plus attentivement la cale de la solide embarcation...
Répondant aux codes classiques du genre, c'est sur une brève plage instrumentale que démarre la traversée. Ainsi, sous couvert d'arrangements ''nightwishiens'' et surmonté d'un fin legato à la guitare acoustique, «
Forsaken » se pose telle une seyante et apaisante entame instrumentale d'obédience symphonico-cinématique et progressive. Mais l'arbre, aussi majestueux soit-il, ne saurait cacher la forêt bien longtemps...
Lorsqu'il le projette sur une terre de lave en fusion, le combo interpellera assurément le chaland par son aisance à disséminer ces séries de notes des plus accrocheuses et qui, longtemps, lui resteront gravées en mémoire. Ce qu'atteste, tout d'abord, le pulsionnel et ''nightwishien'' «
Come Find Me » au regard de l'infiltrant cheminement d'harmoniques qu'il nous invite à suivre, sur lequel se calent les angéliques impulsions de la déesse, et à ses enchaînements intra piste ultra sécurisés. Dans la mouvance de
Kingfisher Sky, l'entraînant up tempo syncopé « Hubris », lui, aspirera le tympan tant par ses couplets finement ciselés que par ses fringants arpèges pianistiques. Dans cette énergie, on pourra encore cocher le ''xandrien'' up tempo « Open My
Eyes », eu égard à son refrain catchy mis en exergue par les fluides inflexions de la sirène et à sa communicative jovialité, même si l'on pourra regretter tant l'inopportunité que la longueur du pont techniciste développé à mi-morceau.
Quand le rythme de ses frappes se fait un poil moins véloce, le collectif trouve à nouveau les clés pour nous happer sans avoir à forcer le trait. Ce que prouve, d'une part, « Listen to the Music », mid tempo progressif à la confluence de
Nightwish et
Kingfisher Sky. Démarrant telle une langoureuse ballade atmosphérique sous-tendue par de délectables clapotis pianistiques, cette plage pétrie d'élégance prend soudainement l'ascendant aussitôt les 2:13 minutes franchies, pour une traversée des plus poignantes ; s'égrainant au fil d'une sente mélodique, certes, déjà courue mais des plus engageantes, sur laquelle se calent les limpides patines de la belle, et recelant un fringant solo de guitare, cette troublante offrande ne se quittera qu'à regret. Dans cette mouvance, le mid/up tempo « Love of Death », lui, imposera de saisissants effets de contrastes rythmiques et atmosphériques comme son refrain immersif à souhait mis en habits de lumière par les pénétrantes oscillations de la princesse.
Ne nous menant en des espaces tamisés qu'une seule fois, c'est dire que nos compères n'y ont pas misé tous leurs espoirs de l'emporter. Ce qui n'aura pu les empêcher de nous adresser leurs mots bleus les plus sensibles, avec pour effet de générer la petite larme au coin de l'oeil, celle que l'on tenterait bien d'esquiver, en vain. Ce qu'illustre «
Darkest Night », une ''delainienne'' ballade, romantique jusqu'au bout des ongles. Glissant le long d'une radieuse rivière mélodique et mis en habits de soie par le gracile filet de voix d'une interprète bien habitée, l'instant privilégié comblera assurément les attentes de l'aficionado de moments intimistes.
Toutefois, coutumière du fait, c'est à la lumière de ses amples pièces en actes symphonico-progressives que la troupe dévoilera ses plus beaux atours, avec pour effet de nous retenir plus que raison. Ainsi, initialisé par de saisissants gimmicks guitaristiques, délivrant de sémillantes harmonies tout en variant judicieusement ses phases rythmiques, la ''nightwishienne'' fresque «
The Hunt » essaime ses quelque 8:52 minutes d'un parcours à la fois épique et romanesque, que l'on ne saurait interrompre sans éprouver de tenaces regrets. Et ce ne sont ni la graduelle densification de son corps orchestral à mi-piste, alors étrennée d'un flamboyant solo de guitare, ni les ensorcelantes volutes de la princesse qui démentiront l'agréable sentiment d'être aux prises avec l'une des gemmes de la rondelle, tant s'en faut. Dans une même logique, on ne saurait davantage esquiver le dantesque et polyrythmique «
From Ashes » qui, au fil de ses 9:27 minutes, se greffe sur un seyant paysage de notes tout en se plaisant à multiplier les coups de théâtre ; finissant crescendo et sur un somptueux legato à la lead guitare, la pléthorique plage laissera assurément quelques traces dans les mémoires de ceux qui y auront plongé le pavillon.
Six ans après sa sortie de terre, le combo nous octroie un opus aussi vitaminé et solaire qu'empreint de sensibilité, témoignant d'une technicité instrumentale affermie mais nullement ostentatoire et de mélodies enveloppantes, transpirant la féconde inspiration de leurs auteurs. Varié sur les plans atmosphérique et rythmique, le propos l'est en revanche bien moins eu égard à ses lignes de chant, la belle monopolisant le micro de bout en bout de la goûteuse galette. Par ailleurs, d'aucuns, pour se sustenter, auraient sans doute espéré un zeste d'originalité supplémentaire et des sources d'influence plus discrètement infiltrées dans ce set de compositions qu'elles n'apparaissent. De relatives carences qui, toutefois, ne sauraient empêcher la formation nord-européenne de rejoindre dès lors les valeurs montantes de ce si concurrentiel environnement metal. Bref, un message musical à la fois enjoué et rayonnant insufflé par le sextet norvégien...
Note : 15,5/20
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