Encore un ixième groupe de metal symphonique à chant féminin, sans doute voué à une disparition prématurée des tabloïds, me direz-vous, et vous auriez sans doute raison... à quelques nuances près toutefois ! Mû par une indéfectible motivation mais conscient des enjeux et des risques à trop vouloir bousculer les événements pour essaimer ses riffs et faire entendre sa voix, ce jeune quintet norvégien créé en 2018 à Trondheim ne réalisera son premier single, «
The Void », que deux ans plus tard. Titre qui fera partie intégrante de son introductif et éponyme EP 4 titres, une auto-production modeste de ses 24 minutes mais jouissant d'une production d'ensemble de bonne facture, à commencer par une qualité d'enregistrement difficile à prendre en défaut.
A bord de la petite goélette, nous accueillent :
Aina Catrine Hammern, frontwoman dont le limpide et chatoyant grain de voix oscille entre une Sharon Den Adel (
Within Temptation) à ses débuts et Marjan Welman (
Autumn, Vetrar
Draugurinn) ; Alex Gregersen aux guitares, Martin Borelly à la basse, Trond A. Wiklund aux claviers et Anders Kristiansen derrière les fûts. De cette étroite collaboration émane un propos rock'n'metal mélodico-symphonique et progressif à la fois pulsionnel, pimpant et enivrant, bénéficiant d'arrangements orchestraux de bon aloi, faisant dès lors la part belle aux lignes de claviers ; une œuvre aussi envoûtante qu'accessible non sans renvoyer à
Xandria,
Within Temptation,
Delain,
Kingfisher Sky,
Beyond The Black, et consorts, témoignant parallèlement d'une technicité instrumentale dores et déjà maîtrisée mais ici volontairement bridée et surtout de sentes mélodiques transpirant la féconde inspiration de leurs auteurs.
Le combo serait doté de cette rare faculté à concocter ces arpèges d'accords des plus accrocheurs et qui longtemps vous resteront gravés en mémoire. A commencer par ses passages les plus enfiévrés, parmi lesquels «
Nightmare », un up tempo aux riffs crochetés et aux puissants et inaliénables coups de boutoir sur fond de sinueuses et enveloppantes nappes synthétiques. A mi-chemin entre
Xandria et
Delain, ce grisant effort délivre un refrain immersif à souhait mis en exergue par les troublantes oscillations de la sirène dont les médiums pourront évoquer Marjan Welman. Guère moins offensif et tout aussi magnétique, dans l'ombre de
Beyond The Black et
Within Temptation s'insinue le frétillant « An
Angel's
Voice ». Doté d'un pont technique bien amené duquel s'échappe un flamboyant solo de guitare, également pourvu de couplets finement ciselés que relaye un refrain catchy, le méfait symphonico-progressif ne ratera pas davantage sa cible, celle de nos émotions les plus intimement enfouies.
Quand la cadence se fait un tantinet plus mesurée, l'accroche ne s'effectuera guère moins aisément, le combo nous adressant par là même ses mots bleus les plus sensibles. Aussi, ne mettra-t-on qu'une poignée de secondes pour se voir gagné par une subreptice émotion sous l'impact des vibes enchanteresses exhalant des entrailles de « In Madness », une power ballade progressive dans la veine coalisée de
Xandria et
Within Temptation, premières moutures. Doté d'un piano disséminant ses gammes de velours et mis en habits de soie par les angéliques volutes de la maîtresse de cérémonie, l'instant privilégié n'en recèle pas moins de saisissantes montées en régime du corps orchestral ainsi qu'un sémillant solo de guitare. C'est dire que l'aficionado d'intimistes espaces y trouvera assurément matière à se sustenter.
Mais ce serait surtout à l'aune de leur plantureuse pièce en actes que nos acolytes seraient au faîte de leur art. Ainsi, c'est d'un battement de cils que la fresque rock'n'metal symphonico-progressive «
The Void » imposera tant ses pénétrantes séries d'accords que son grisant cheminement mélodique. Les sept minutes de ce single dont la filiation avec
Kingfisher Sky et
Beyond The Black ne saurait être démentie réserveront au chaland à la fois de réjouissantes montées d'adrénaline que relayent des breaks bien amenés et de fringants gimmicks guitaristiques. Mis à l'honneur par les sensuelles patines de la déesse, couplets finement ciselés et refrains diablement entêtants glisseront avec célérité dans nos tympans alanguis. Peut-être bien la gemme de l'opus...
En définitive, le quintet nord-européen nous offre-là un condensé de ce que l'amateur de rock'n'metal symphonique classique serait en droit d'attendre. Sans réinventer les codes du genre ni bousculer quelques certitudes pour tenter de mieux imposer ses gammes, le combo nous convie cependant à un spectacle à la fois vitaminé sans pour autant s'avérer éruptif, éminemment poignant, varié quant à ses exercices de style, et un brin romantique. Doté d'un petit supplément d'âme le rendant d'autant plus liant, bénéficiant également d'une ingénierie du son plutôt soignée, d'une mélodicité toute de fines nuances cousue et encensé par le cristallin grain de voix de son interprète, ce premier effort aurait donc les armes requises pour propulser dores et déjà le collectif norvégien parmi les sérieux espoirs de ce exigeant registre metal. Un truculent et délicat mouvement en guise de message de bienvenue...
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