Viscera

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18/20
Nom du groupe Strigoi (UK)
Nom de l'album Viscera
Type Album
Date de parution 30 Septembre 2022
Style MusicalDeath Metal
Membres possèdant cet album18

Tracklist

1.
 United in Viscera
 06:44
2.
 King of All Terror
 02:38
3.
 An Ocean of Blood
 04:13
4.
 Napalm Frost
 02:26
5.
 Hollow
 06:20
6.
 A Begotten Son
 03:51
7.
 Bathed in a Black Sun
 04:19
8.
 Byzantine Tragedy
 05:28
9.
 Redeemer
 02:38
10.
 Iron Lung
 07:55

Durée totale : 46:32

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Strigoi (UK)


Chronique @ JeanEdernDesecrator

13 Octobre 2022

La rustre chrysalide est devenue un papillon vampire

Toi qui entre ici, abandonne tout espoir. C'est un peu le message, la devise, le credo, le conseil amical que la musique de Strigoi adressait à l'auditeur infortuné, avec son premier album "Abandon All Faith". Créer de toutes pièces un cauchemar, une vision mise en ondes, ne s'improvise pas et qui de mieux que Greg McIntosh, guitariste de Paradise Lost, pour le réaliser ?

Strigoi est né des cendres de Vallenfyre, projet de Greg McIntosh jouant un Death à la suédoise où il a pu assouvir ses penchants les plus musicalement violents. Vallenfyre n'était pas destiné à perdurer, mais plutôt à être une sorte d'étape musicale. Alors qu'ils mettaient un point final à la carrière du groupe, Greg et le bassiste Chris Casket ont immédiatement formé le noyau de Strigoi, pour sortir un premier album "Abandon All Faith" en novembre 2019. Celui-ci reprenait les bases de Vallenfyre, en étant plus sombre, extrême et tortueux. Le temps de tourner arrivant, ils recrutèrent Ben Ash (ex Carcass) à la guitare, et Guido Zima à la batterie pour compléter le line-up. Greg ne faisant que les vocaux sur scène, Sam Kelly-Wallace est enrôlé en support pour les guitares rythmiques.
Malheureusement pour eux, les concerts ont vite du s'interrompre avec la pandémie, et plutôt que de végéter dans l'immobilité, Greg McIntosh a décidé de profiter de ce temps libre forcé pour se jeter dans la composition d'un deuxième LP. Près d'un an et demie plus tard, c'est aux Orgone Studios (Royaume Uni) que quatorze nouvelles chansons ont été enregistrées avec Jamie Gomez Arrelano aux manettes. Après que les nouveaux membres du groupe ont rajouté leurs parties en octobre 2021, le mixage a été confié à Kurt Ballou (Kvelertak, Torche) au Godcity Studio, et le mastering à Brad Boatright (Audiosiege Studios).

Nous voici en 2022, et Strigoi semble avoir laissé de coté son premier essai pour sauter directement sur la deuxième marche avec "Viscera", changeant au passage de label pour Season Of Mist. A ses débuts, Strigoi pouvait apparaître comme une simple évolution de Vallenfyre, et on pouvait se demander si le groupe allait enfin vraiment tracer sa propre voie.


Dès la première écoute, j'ai eu la sensation d'entrer dans un univers profond, intriguant, dérangeant et obsédant. Parmi la myriade de groupes death/black/doom qu'on peut survoler, le groupe de Greg McIntosh a la capacité de vous capter dès les premiers instants pour vous attirer dans son antre ; il impose une majesté inquiétante, avec une économie d'accords superflus. Ce sont des riffs monolithiques, lourds, taillés comme des blocs de granit, dont la simplicité extrême pourrait rendre jaloux un Max Cavalera. Sur ces fondations solides se greffent des mélodies répétitives et lancinantes ("United In Viscera"). Pas de surenchère de technique, de notes ou signatures rythmiques farfelues, Strigoi y va à la masse, avec une base death old school qui me rappelle les premiers Entombed, Death, Obituary ou Master.

Les ambiances sont absolument délétères, poisseuses : avec ses arrangements, ses mélodies tordues, "An Ocean of Blood" est flippant à souhait. La guitare lead octroie quelques soli courts ("An Ocean of Blood", "A Begotten Son") qui achèvent de peindre des tableaux aussi angoissants les uns que les autres.
"Hollow", avec son début mystique empli de chants cabalistiques, son fond de voix de foules possédées, vous colle dans un film d'horreur dont on se demande s'il n'est pas réel. On se retrouve plongé dans une réalité fantasmagorique, comme avec Septic Flesh ou Cradle Of Filth, surtout quand Strigoi joue avec des poignards black metal ("Hollow", "A Betgotten Son"). Le monstre a beau être souvent lent et lourd, on ne se sent jamais lassé et endormi comme on peut l'être avec beaucoup de groupes de doom : l'intensité est toujours extrême, et on sent que n'importe quoi peut surgir d'une seconde à l'autre.
Des espèces de cornes de brumes géantes se répercutent dans l'espace sonore ("Byzantine Tragedy"), se mêlent à des suppliques de chœurs féminins. On peut trouver des touches d'industriel, avec des cordes de guitares qui grincent, ou quelques patterns froids, comme sur ce passage distordu à la Lament Cityscape, sur "Bathed in a Black Sun". Dans sa façon d'exprimer le désespoir, avec morgue et décadence, Strigoi me rappelle aussi un peu, dans l'esprit, Type O Negative, ou des groupes de Cold Wave à la Christian Death ou Laibach.

Loin de rester dans une veine doom/Death, Strigoi ne se gêne pas pour appuyer sur l'accélérateur, à l'image des lapidaires "King of All Terror" et "Napalm Frost***", entre hardcore et grind, ou à la façon d'un SOD mâtiné de Carnivore sur "Redeemer". Si le rythme général est moindre que sur le premier LP, il reste bon nombre de blasts, utilisés de manière toujours justifiée, qui appuient les riffs les plus violents avec efficacité. Je ne doute pas que ces titres seront parfaits pour réveiller les foules en concert en leur rentrant dans le lard sans pitié.

La batterie est brute, avec des toms âpres, Guido Zima les utilise beaucoup et cela renforce le coté sombre et mystique de Strigoi. Le son de basse est énorme, gras et compact comme un loukoum à l'arsenic. Le chant de Greg McIntosh est impressionnant, et pas si éloigné de celui de Nick Holmes dans Paradise Lost : la profondeur de son growl est abyssale, et il joue avec ses textures vocales en y mettant un cœur noir comme l'enfer. Le son des guitares de Greg MacIntosh et Ben Ash est très saturé, presque boursouflé, surtout quand ils jouent à l'unisson, particulièrement si on l'écoute fort sur enceintes. Ce serait un hybride improbable entre le son death suédois et celui très brut de décoffrage des premiers groupes death thrash de la fin des années 80. La production de Kurt Ballou a su rendre la singularité de la musique de Strigoi, vampire death venu du fond des âges.
Sur cet opus, le combo prend le temps de développer ses idées sur certains titres, qui dépassent les six ou sept minutes, comme l'opener "United in Viscera", "Hollow" ou le morceau final "Iron Lung". C'est d'ailleurs sur ce dernier que Strigoi baisse un peu le pied et se dilue un peu trop dans la lenteur à mon goût. Mais il est pardonné, je n'ai pas envie de me prendre une malédiction, ou de sentir deux canines hypertrophiées chercher ma carotide.


Avec "Viscera", Strigoi est devenu quelque chose de totalement différent, un papillon de nuit vénéneux et effrayant sorti d'une chrysalide rustre et commune. Le mélange entre rugosité death, mélodies dévoyées et ambiances d'orgies de cimetière donne quelque chose de très particulier, disons-le assez original, dans la façon dont les éléments sont imbriqués, superposés, ou enchaînés. Sa brutalité s'est faite insidieuse, hypnotique, et tout le décorum finement agencé plonge l'auditeur dans une ambiance délicieusement glaçante. Après une transformation pareille, il serait dommage que Strigoi reste dans l'ombre…


5 Commentaires

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Jibe - 14 Octobre 2022:

Félicitations pour la chronique, c'est quasiment un livre chapitré !
Avec mention spéciale pour la comparaison "gras et compact comme un loukoum à l'arsenic" ;-), ça m'a bien fait rire !!!

grogwy - 14 Octobre 2022:

Merci pour cette chronique de ce très bon disque de Doom/Death Metal saupoudré, selon les titres, de Black Metal, d'Industriel, et de Dark Ambient.Sinon Christian Death c'est du Death Rock (du moins sur ses premiers disques) et Laibach de l'Industriel (la Cold Wave, pour faire vite, c'est Joy Division et les débuts de The Cure).

JeanEdernDesecrator - 16 Octobre 2022:

Merci pour vos commentaires ! Cet album sort du lot, je trouve, un train fantôme pour adultes 

Grogwy : pour les références à la cold wave, Christian Death, Laibach, c'est diffus à base de souvenirs de cassettes au début des années 90 ...

svad - 18 Novembre 2022:

Merci pour ta chronique très complète. J'ai beaucoup aimé le premier, donc celui-ci va être une future acquisition c'est certain. Parmi tous les groupes que je connais, Strigoi est sans conteste parmi les plus lourds et plus malsain, avec ce côté old school très prononcé, tout en cultivant une identité très forte. Un des rares groupes qui m'impressionne... J'espère qu'ils vont tourner !

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