Scorn, c'est le nom du projet de Mick Harris. Aidé sur cet album du bassiste chanteur et ancien acolyte de l'époque
Napalm Death Nicolas James Bullen et du génial guitariste de
Godflesh Justin Broadrick. Mick Harris officiait dans le légendaire
Napalm Death et il décida de monter son propre projet. Cet album, énorme, colossal, vil, ne laisse nullement présager de ce que donnera par la suite la discographie de
Scorn. En effet, Mick Harris n'aura de cesse d’évoluer à chaque album, abandonnant progressivement le chant et les guitares saturées pour entrer dans un dub hypnotique qui fera de lui le chef de file d'un mouvement aujourd'hui bien installé. Il s'illustrera aussi dans nombre de projets parallèles.
Mais revenons à
Vae Solis qui, pour sa part, reste ancré dans l'univers métallique. La guitare de J.Broadrick déverse des flots de larsens et de distorsions qui submerge l'auditeur. Pourtant, ici, tout est calculé, maitrisé, orienté afin de créer cette ambiance unique. La basse et la batterie complètent l'ensemble, apportant une rythmique implacable qui vous collera au mur d'une façon presque éprouvante (Walls of My
Heart n'aurait pas un tel impact sans cette basse, Thoughts of
Escape et son final ravageur). Le chant vous emporte par ses différents accents vers un univers sale et crasseux. Avec un délicieux détachement, cette voix finit d'incarner le vice, couleur de cet album. Les samples mécaniques ou de voix finissent l'habillage mais sont loin de constituer les charnières des titres, au contraire de certains autres albums. D'entrée,
Vae Solis nous plonge dans un univers chaotique et assourdissant.
Spasm,
Suck and Eat You, Hit servis par une voix pétrifiante comme un regard de méduse. Tout ici est démesuré (comme le final de Hit), colossal est le mot. On a l'impression, par le biais de cette reverb générale, de se trouver dans une des grottes immenses ou Cthulu pourrait se tapir et nous observer. C'est comme une cathédrale à la gloire de cette dimension sale et vicieuse qui habite l'esprit humain de façon indicible et souvent refoulée.
Il faut dire que l'artwork de cet album y contribue allègrement. La pochette nous montre un orifice organique indescriptible et à l'intérieur se succèdent des représentations qui nous plongent dans le trouble. Notamment en pleine page, une femme mal fichue qui semble attachée et maculée d'ombres. Limite SM même. On l'aura compris, ce n'est pas de la musique pour les enfants ni les esprits faibles. C'est du lourd, c'est dur et sans pitié. Cet album m'a ravagé de bonheur car réussir à générer autant d'émotions noires tient du chef d'œuvre. Il gênera d’ailleurs surement pas mal de monde comme on se détourne de certaines images insoutenables. Deep in...Eaten Over and Over ressemble à une chute infinie dans un gouffre obscur où votre âme finira de se pervertir, aidée par une gratte distordue et des cris de perdition. Le chant, tremblotant tant il semble jouir de toute cette noirceur se chargera du reste. Si vous voulez flinguer une bonne soirée entre amis pour vous retrouver seul, mettez cette galette. On Ice est servie par un petit chant faussement inoffensif (trahi par des samples de voix torturées) cachant habillement l'esprit nauséabond de cet album. J'ai connu pas mal de monde qui ont flashé sur ce titre, surpris d'entendre ça au milieu de tout ce maelstrom de noirceur. Pourtant, la petite nappe présente tout du long ne laisse pas le doute planer. A partir de Heavy
Blood l'album bascule dans une atmosphère différente, moins peuplée de larsens et de fureur.
Orgy of Holliness et Still
Life vous aideront a ressurgir de cette immersion.
Vous l'aurez compris, ce n'est pas un album habituel mais chez
Scorn, il n'y a pas grand chose d'habituel.
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