Lorsqu'un jeune groupe sort son premier album il se peut que celui-ci offre une recette réellement personnelle et plaisante, lui donnant un charme certain et provoquant une curieuse envie chez les auditeurs de voir son évolution lorsque les musiciens auront plus de maturité.
Enthroned n'est cependant pas de ceux-ci. Si les retours de "
Prophecies of Pagan Fire" ont été assez bons, il n'est pas question pour le duo Sabathan/
Cernunnos de se reposer sur ses lauriers et d'amener comme deuxième offrande à la seconde vague de Black
Metal un Prophecies-bis. Partant pour le studio Hautregard Recordings au printemps 1997, l'âme du groupe est intact bien que de nouvelles idées fourmillent en la tête des deux compères afin de propager leur satanisme sous un Black
Metal plus vivace et moins atmosphérique. Cependant, tout ne se passera pas comme prévu et le résultat n'est au final pas à la hauteur des attentes.
Là où le premier opus officiait dans un registre d'obédience "true", accentuant sa musique de nappes de clavier bien distillées apportant tantôt un côté épique, tantôt un break atmosphérique ou bien une ambiance pagan, "
Towards the Skullthrone of Satan" propose un Black
Metal dans sa forme la plus traditionnelle, les riffs étant toujours assez minimalistes mais disposant tout de même de ces fameuses variations bien placées qui faisaient la force des titres du premier album lors de leur enchaînement, la surprise étant de mise. Ici, les breaks et autres envolées musicales sont tout de même moins bien trouvées et moins surprenantes, le duo de guitaristes Nornageist/
Nebiros préférant annoncer la couleur dès le début des morceaux et laisser la place à quelques décélérations en milieu de piste en guise de profondeur. Cette forme de composition n'est pas entièrement un mal car un lot de titres prenant et imprégnés de la "pâte" d'
Enthroned sont bien présents à la manière du premier :"The Ultimate
Horde Fights" qui délivre un riff belliqueux qui prend bien aux tripes sous le couvert d'une rafale de blast jouissive dans toute sa durée ou encore le bon "
Evil Church" où l'on retrouve bien l'esprit du premier full-lenght en son départ (peut-être à cause des claviers...). Cependant, la solidité des compositions se retrouve tout de même amoindris en dépit de la qualité indéniable de certaines, le sentiment d'envoûtement que provoquait la messe noire musicale du groupe s'estompant car l'essence de la subtilité des morceaux impressionne moins.
Le son est également un élément de déception. La production de "Prophecies..." était sèche, glaciale et haineuse et donnait un réel charme au tout malgré quelques approximations. Celle offerte par Andre Gielen est certes haineuse et développe quelque chose de sombre, mais la qualité d'écoute est sacrifiée dans un mauvais sens cette fois-ci. Le jeu de batterie de
Cernunnos et Da Cardoen (
Cernunnos s'étant suicidé lors de l'enregistrement, Da Cardoen est intervenu en tant que membre session) est des plus louable, les blasts et changements de rythmes étant à la hauteur de toutes espérances lors de l'acquisition d'un album de ce registre comme le démontre le matraquage frénétique de "The
Forest Of Nathrath", mais se retrouve gâché par un rendu beaucoup trop sourd, manquant de cette puissance qui aurait rendu justice à la prestation des deux batteurs, les cymbales peinant elles aussi à se faire remarquer ("
Dusk Of
Forgotten Darkness"). La basse est quant à elle bien plus approximative que précédemment dans son rendement, parfois inaudible et parfois trop en avant claquant dans le vide par-dessus les guitares assourdis.
Le chant de Sabathan s'en tire avec les honneurs, la prestation du ce dernier étant vicieuse à souhait dans la psalmodie de ses lyriques blasphématoires et assez recherchés comme en témoigne les paroles de "Ha Shaitan", sa voix écorchée et nasillarde se prêtant tout à fait à la musique.
Ce morceau sus-cité fait également partis des titres valables de cet opus avec sa rythmique efficace laissant place à de bons décrescendos assez marquants où l'âme du groupe demeure assez forte, sans oublier le dyptique final "When Horny
Flames Begin To Rise"/"Hertogenwald" qui clôture l'album d'un bonne manière, l'atmosphère du premier étant assez marquante avec son riff secondaire plus profond développant un sentiment assez particulier en son break central, le deuxième sublimant ceci par ses choeurs et ses claviers doublés d'un riff belliqueux assez basique à ce stade mais tout de même savourable.
"
Towards the Skullthrone of Satan" est une deuxième sortie correcte dans son ensemble mais qui souffre de la comparaison avec le premier opus, d'une production approximative sur certains points et d'une linéarité en ses pistes centrales. Il dispose tout de même de morceaux tout à fait valables et de l'essence du groupe encore bien présente et qui est délectable pour peu qu'on apprécie le premier. "
The Apocalypse Manifesto" n'offrira malheureusement pas autant de plaisir et enfoncera le clou pour le groupe, mais c'est un autre chapitre...
Cependant, il faut passer outre les premières écoutes, qui donne une relative impression d'interchangibilité des morceaux (excepté Evil Church, qui s'impose d'emblée comme un hymme du Black Metal).
Autrement très bonne chronique même, si je ne suis pas d'accord concernant le rendu sonore et que j'aurais bien rajouté 2 points.
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