En France, on a la chance d'avoir des groupes qui s'essaient à des styles peu développés et qui tentent de se faire une marque de fabrique toute particulière. Evidemment, il y a à boire et à manger et les albums n'ont pas tous le rendu espéré. Mais il y a certains électrons libres qui arrivent à sortir des sentiers battus avec une musique à la fois directe et créative. Vous l'aurez compris, les Parisiens de
Gorgon font partie de ces électrons libres. Le groupe s'est formé il y a quelques années autour de Paul Thureau et d'Aurel Harmoniaux avec pour ambition de présenter une musique puissante et cinématographique. Et de l'ambition, ils en ont puisqu'ils ont décidé de ne pas faire les choses à moitié pour la sortie de leur tout premier album. Ils se sont adonnés au crowdfunding, un vrai coup de pouce dont certains groupes comme
Klone ou
Hypno5e ont pu bénéficier. Et cela se ressent à la fois dans les plans de communication, l'artwork général (qui rappellerait presque du Skyrim) et même le mastering signé Jens Bogren (
Fleshgod Apocalypse,
Dimmu Borgir...). Rien que ça.
"
Titanomachy" apparaîtrait presque comme l'album d'un groupe ayant beaucoup d'expériences et de compos derrière lui.
Gorgon est encore jeune mais veut avoir l'air mature. Sauf qu'il ne s'agit pas que d'une impression. Les premières notes d'"
Oros Othrys" auraient directement pu sortir d'une BO de film ou de jeux vidéo épiques : percussions, cuivres, allées et venues de violons plantent le décor et nous propulsent dans la Grèce antique, à l'époque des Titans. Car la "titanomachie", c'est la lutte entre les Titans menés par
Cronos et les Olympiens menés par
Zeus, un épisode de la mythologie grecque qui s'est étalé sur dix ans. L'auditeur se retrouve donc dans un conflit qui rappellera à certains le film "Le Choc des Titans" ou les jeux
God Of
War, une thématique déjà plus ou moins exploitée sur le "From the
Past" de
Melted Space.
Pour raconter ces faits,
Gorgon nous propose un death symphonique épique à ne pas comparer à
Fleshgod Apocalypse puisque les Frenchies font davantage dans le mélodique et le folklorique. La technicité, la vitesse et la brutalité ne font pas partie du vocabulaire de ce groupe qui préfère nuancer son propos et étaler son histoire sur les huit morceaux proposés, telle une fresque antique. "
Arising Thunderlord" montre exactement de quoi
Gorgon est capable, avec ces cavalcades de riffs et de violons à la
Shade Empire (l'album "
Omega Arcane"). On est dans du melodeath à l'esprit finlandais soutenu par de puissantes orchestrations et un chant à la Petri Lindroos (
Ensiferum, ex-
Norther) qui nous transportent directement en plein champ de bataille. Et là on sent que le père Bogren, fort de son expérience, a fait un travail de fou puisque la production est impeccable, laissant autant de place aux éléments métalliques qu'aux éléments symphoniques (chose qu'il avait déjà très bien maîtrisée sur le "
King" de Fleshgod). Les amateurs de grosses prods seront donc ravis.
Les mélodies sont très travaillées et en bonne adéquation avec le concept de l'album, en témoigne un "Valley of
Redemption" qui dépote bien avec son énergie débordante mais qui lasse un peu avec son rythme monotone. "
Ashes and Blood" est extraordinaire avec son côté folklorique oriental (à la "
Legacy of the
Snake" de
Stormlord), ses choeurs massifs et ses violons grandiloquents. Le bouzouki, instrument grec, s'y fait une bonne place, rendant l'ensemble encore plus dépaysant.
Les titres ne sont pas très longs mais ont parfois tendance à tirer sur la longueur, et le chant n'est pas très varié en dépit d'un concept qui aurait pu laisser place à des duels vocaux. Cependant, on apprécie fortement la dextérité et la maîtrise des musiciens, ainsi que les nuances apportées aux compos, avec un "Titans
Unleashed" burné, un "
Oracles" instrumental et expressif, ou un "Everlasting
Flame of Olympus" véloce à la
Rhapsody Of Fire.
Nul besoin d'en dire davantage, ce "
Titanomachy" est une très belle réussite pour un premier opus.
Gorgon nous offre un death symphonique de haute volée, avec de l'ambiance, des riffs qui envoient, des orchestrations de malade, et beaucoup de classe. Les paroles, elles aussi, sont très travaillées, avec ce côté théâtral et poétique, malgré quelques clichés. Le potentiel est là, on sent que le groupe peut nous offrir davantage et nous montrer d'autres facettes de sa personnalité. Nous étonner encore plus. On attend déjà la suite avec impatience.
Superbe premier album.
@witchfucker: jette une oreille sur Elegy, leur dernier album. Il surpasse ce pourtant très bon rpremier effort. Les mélodies sont envoutântes de noirceur et de puissance. Le growl caverneux du chanteur y est dévastateur et le "défaut" que tu trouves dans Titanomachy n'est plus de mise. Un groupe exceptionnel vient d'arriver sur la scène death sympho. Qu'on se le dise!
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