On a la possibilité de conquérir une place forte, l’intérêt serait encore de la conserver. «
Human Fortress » est une forteresse fragile, elle a connu maintes érosions, et elle a failli connaître un destin funeste en 2008. Néanmoins, la troupe emmenée par le duo de guitaristes Torsten
Wolf et Volker Trost a réussi à sauver la mise avec son album «
Raided Land », sorti chez le prestigieux AFM, après l’adoption d’une nouvelle formule et l’intégration dans le line-up de nouveaux membres expérimentés. C’est avec eux que se poursuit l’aventure et qu’est réalisé immanquablement quelques années plus tard un nouvel album chez ce même label, encore une fois mixé par
Sebastian Levermann («
Orden Ogan »). Fort est de constater qu’avec «
Thieves of the Night », la formation «
Human Fortress » n’a point conservé ses acquis d’il y a 3 ans. Pire, on peut considérer cela comme une véritable fuite éperdue vers nulle part.
L’entrée s’illustre des plus banales, presque indigne d’une formation assez notable en cette année 2016. Les notes de claviers de l’entame du premier morceau donnent une impression de revenir longtemps en arrière, au début des années 2000, quand des troupeaux entiers de groupes faisaient dans les mélodies Bontempi. Il en sera fait plus tard un instrumental entier du même acabit sur « Smite on the
Anvil ». Ce faux cristal ouvre pour un heavy mélodique montrant un peu de vigueur, aux riffs concassés. S’impose véritablement alors le chant d’orfèvre de Gus Monsanto, admirable encore une fois. On notera par la suite que le chanteur est un peu seul pour maintenir de la hauteur à l’ouvrage. « Amberstow » fait donc preuve de maladresse malgré un chant vibrant. Et, il n’est pas le seul. « Dungeons of
Doom » ne relève aucunement «
Human Fortress » dans l’exercice. Les à-coups produits par la guitare rythmique font preuve d’hésitation et d’un réel manque d’inspiration. Mais c’est encore mieux en comparaison de l’horrible son de gamelles qui provient de la batterie. L’instrument d’Apostolos Zaois sera d’ailleurs mis à l’index sur d’autres morceaux.
L’équipe touche le fond sur un très redondant et pénible « Hellrider », se singularisant par un riffing par à-coups amorphes sur les couplets, sa pauvreté, sa béatitude, sa répétitivité surtout. Et cela, hormis la formidable énergie du refrain et du chant de Gus. Les refrains, bien que très classiques dans leur illustration, sont les points forts des différents extraits. En vérité, pratiquement les seuls instants où nous daigneront lever les yeux. Ce regain se note particulièrement sur « Last Prayer to the
Lord », peu aisé dans l’articulation, redondant même, mais restant potable. Tout comme la fragile cavalcade lancée par « Just a Graze », où on distingue bien la nature épique de «
Human Fortress ». Rappelant aussi quelque peu les travaux des argentins de «
Skiltron », par contre en l’absence de part celtique. La correspondance tient également pour « Thrice
Blood », davantage parce que le chant de Gus s’associe bien à celui de son collègue Diego Valdez, car les guitares et la batterie apportent une lourdeur pataude qui est plutôt dommageable.
On dénote un peu plus d’entrain à travers le titre « Rise or
Fall », et c’est étonnement le chanteur qui pêche par des paroles creuses, trop souvent scandées. Et cela au milieu d’un remous heavy mélodique affreusement basique. Preuve, s’il en est, d’une composition furtive et très moyennement inspirée. C’est ce que l’on dit aujourd’hui parfois injustement d’«
Axel Rudi Pell », dont le groupe «
Human Fortress » semble s’apparenter sur certains morceaux comme l’éponyme «
Thieves of the Night » ou encore «
Vicious Circle ». Notons tout de même sur «
Vicious Circle » un petit air de «
Primal Fear » mal-ficelé en mode mid tempo, assez éloigné de la demi-performance de «
Gift of
Prophecy ». « Demi », car le titre n’est satisfaisant qu’à moitié. Il fait preuve d’adresse et d’ambition dans son somptueux arpège acoustique de départ, pour se perdre ensuite dans une fausse restitution de «
Freedom Call », un heavy mélodique réjoui comportant quelques longueurs. On pourra donc mieux se contenter alors du très classique et tendre « Alone », une ballade façon «
Scorpions » peut-être kitch, mais pour une fois rondement menée de bout en bout.
Perte de vitesse, perte d’ambition, perte de lumière, perte de repères. Ainsi «
Human Fortress », après le sursaut salvateur de 2013, court derechef à sa perte. On peut pardonner à «
Thieves of the Night » son côté niais, mais aucunement ses titres sans relief, sans âme. On en vient même à douter des qualités techniques des musiciens. L’ouvrage n’est qu’une vaste platitude qui laisserait l’auditeur de marbre ou en proie au sommeil. Et le chanteur se retrouve seul élément professionnel au milieu du vide, tentant au mieux, mais en vain, de soutenir un décorum mélodico-épique fait en carton-pâte. Oui, tu peux continuer de courser dans la brume. Mais pour quelle destination imaginaire ? Pourquoi as-tu quitté les murs solidifiés de ta forteresse, ta seule vraie demeure sûre, qui est de nouveau aujourd’hui en péril ? J’espère que tu reviendras sur tes pas, cavalier, et que tu sauveras ton honneur. Fais-le ! Rebrousse chemin pendant qu’il en est encore temps.
11/20
Là ça sera sans moi!
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