Un one-man band black metal, dans notre imaginaire collectif, évolue soit dans un registre ambiant dépouillé, soit dans un true black metal à la production crade. Mais le job de chroniqueur, c'est aussi d'essayer de casser les images d’Épinal, et en l’occurrence,
Self-Inflicted Violence et son leader Adam Magnox me donne une opportunité toute trouvée en pratiquant un métal à la fois moderne et progressif sans pour autant être trop ambiant, plus proche d'
Altar of Plagues ou
Alcest que de
Belketre ou
Hypothermia...
Si le nom ne me disait rien, il s'agit en réalité du second album puisqu'en 2009, un premier album « A Perception of Matter and
Energy » avait vu le jour, nappé de quelques bonnes chroniques.
Mais de grosses différences, sont à noter entre les deux albums, déjà, de duo, le groupe est devenu le projet solitaire d'Adam Magnox (ce qui n'est pas nouveau pour lui puisqu'il évolue également seul aux commandes de deux autres groupes, pas forcément si éloignés que ça de
Self-Inflicted Violence :
Hypnologica, purement dans la lignée post-black-shoegaze à la
Alcest et consorts et Ealdulf, un poil plus true) depuis le départ de William Theccan, qui était en charge de tous les instruments sur l'album, Magnox n'y faisant à l'époque que la voix. C'est donc bien un nouveau challenge, avec une redistribution des cartes musicales que ce « The Sanctimonious Hypocrites of Reality » incarne avec son artwork mystérieux dont l'esthétique globale m'évoque celle du dernier
Carcass...
Si la justification d'avoir désormais trois projets en one-man n'est pas évidente (hormis peut-être d'éviter de sortir quinze albums ou EP par an à la
Buckethead) d'autant que la musique développée ici est pile poil entre ses deux autres groupes, le sieur Magnox est loin de se moquer de nous avec huit vrais morceaux et des ambiances variées, dans une production maison qui n'est pas ridicule, avec notamment un son de batterie qui bien que probablement sorti d'une boite à rythmes, tient la route...
Musicalement, le tout est plutôt intéressant et personnel, exprimant une sorte de nostalgie sans insister autant sur le coté dépressif que le premier album, et parfois plutôt progressif, à l'image de l'instrumental par lequel commencera l'album « Influx », aux nappes de guitare innovantes et aux multiples couches pour un résultat pouvant parfois frôler les démarches de certains instrumentistes, pas si éloigné d'un Guillaume Pingard par exemple.
La voix est majoritairement claire, dans des tons lancinants et mélancoliques, assez attachante malgré sa justesse parfois plutôt approximative avec des passages en voix hurlée en alternance sur certains titres (comme « Blender »). L'ensemble est assez moderniste sans être réellement avant-gardiste, si on excepte les bruits de manège sur Carrousel, qui évoquera un peu
Lifelover. Le rythme est plutôt posé voir aérien, malgré quelques pointes de vitesse sur «
Lost » par exemple et on sera très loin du tape à l’œil mais plutôt dans une œuvre posée et contenue, unique mais encore quelque peu scolaire. On sent que Magnox a mis beaucoup de lui dans le processus de création et que cet album est plus proche de sa sensibilité que ne l'était le premier album. Ainsi l'album est moins torturé et peut être aussi malheureusement moins efficace que ne l'était « A Perception of Matter and
Energy avec des titres moins inoubliables que ne l'était par exemple un « A
Mental Cancer » sans être un vraie baisse de ton, mais plutôt à voir comme une nécessité d'ajustement après la perte de 50% de la valeur créatrice du groupe.
Ce « A Perception of Matter and
Energy » semble donc être un excellent résumé de ce que peut proposer le désormais one-man anglais, s'il est à déconseiller à ceux qui ne jurent que par le true black metal, ceux qui apprécient qu'on y amène une certaine fraîcheur et modernité quitte à s'éloigner du Bm original pourraient bien apprécier... En tout cas, c'est un album intéressant et convaincant, assumant le passé du groupe tout en lui insufflant quelque chose de neuf, qui donne envie de s'intéresser à la suite, sans nous donner suffisamment d'éléments pour réellement nous enflammer ou trop nous enthousiasmer en tant que tel.
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