Un vent d'inspiration renouvelé nous parvient des lointaines contrées scandinaves au moment où
Epica,
Nightwish,
Within Temptation et autres
Xandria et
Leaves' Eyes font valoir leurs gammes et leurs arpèges aux quatre coins de la planète. Et ce, à l'aune d'une formation de metal symphonique gothique danoise initialisée en 2004 par le guitariste et programmeur Morten Harboe (ex-Slay The
Shepherd) et la mezzo soprano et claviériste Tanya Bell. Rejoints par le bassiste Stefan Nielsen et le batteur Peter Buur (ex-
Sickness Within), nos acolytes proposent depuis leurs débuts un metal symphonique mélodique et atmosphérique avec des relents gothiques, dynamique et romantique à la fois. Et cela, non sans rappeler
Within Temptation concernant la section rythmique,
Imperia sur le plan harmonique,
Epica sur les accords de fond, dont Simone Simons, sur le versant vocal. Dernière source d'influence qui n'est pas sans renvoyer à la patte experte de Jacob Hansen (
Amaranthe,
Epica,
Primal Fear,
Volbeat) au mastering de ce troisième effort du quartet venu de Silkeborg.
Suite à un roboratif «
Angels of Revenge », premier EP sorti en 2006, à une menue démo, «
Lost Forest », parue un an plus tard,
Akoma s'est laissé le temps nécessaire à la maturité de son second EP, à l'instar de ce «
The Other Side », invitant opus auto-produit de six pistes s'égrainant sur une bande auditive de près de vingt-huit minutes. D'emblée, on observe des progrès accomplis sur l'enregistrement et la production dans son ensemble, travail de fourmi réalisé par Morten, Jacob ayant complété son offre par un mixage laissant filtrer instruments et voix à parités égales. Un certain souci global du détail, des finitions, autant que des enchaînements achève de nous convaincre que l'écoute devrait s'opérer dans des conditions optimales. La qualité des arrangements aidant, cette hypothèse ne sera aucunement démentie. On est d'autant plus rassuré que les compositions témoignent de portées aux accords efficaces, corroborées d'un jeu d'écriture n'ayant pas plaint sa peine et d'un artwork d'inspiration fantastique aux traits épurés et à l'empreinte romanesque. Pénétrons dans les arcanes de cette œuvre sans plus attendre et voyons ce qu'elle nous réserve...
On découvre quelques instants assez vivifiants, mais sans débordements percussifs, pour des rondes du plus bel effet. A commencer par l'envoûtante entame et fresque de la rondelle. Ainsi, «
Bittersweet Memories », mid tempo symphonique gothique au riffing corrosif et aux nappes synthétiques enveloppantes un brin énigmatiques déploie un tapis mélodique des plus subtils, à la façon d'
Imperia, mis en habits de lumière par la maîtresse de ces lieux. Son délicat vibrato allié à des envolées lyriques d'une stupéfiante légèreté et d'une parfaite justesse, évoquant immanquablement Simone Simons (
Epica), avec des notes plus fermement tenues en arrière-fond, ajoutent à la magie de l'instant posé. La captation de nos émotions s'opère malgré nous, notamment à l'abord de refrains rayonnants, les ondulations de la sirène n'étant pas étrangères à cet état de fait. D'autres moments de cette obédience nous attendent. Rythmique syncopée, riffs acérés, dense espace percussif, et, par contraste, fines gouttes pianistiques, sont au programme de «
Immortal Love », morceau power symphonique gothique dans la lignée atmosphérique d'
Imperia, là encore. On n'échappera pas non plus aux magnétiques impulsions de la mezzo soprano, faisant mouche où qu'elle se meut, conférant une saveur délectable à une plage déjà instrumentalement ragoûtante.
Le combo a aussi veillé à desserrer l'étreinte, le faisant de différentes façons.
Plus souples rythmiquement, ces espaces introspectifs se sont révélés constituer des havres de paix autant que des moments de pure jouissance auditive. Ainsi, « Your
Sacrifice », ballade power symphonique atmosphérique et progressive, nous immerge dans un bain orchestral aux doux remous, où les riffs s'arrondissent, les tapisseries synthétiques s'éclaircissent et où l'empreinte mélodique, tout en nuances, nous parcourt pour nous pénétrer sans crier gare. Et ce n'est pas la céleste présence vocale, finement modulée, de la déesse qui nous fera lâcher prise, loin s'en faut. Un enivrant instant suspendu à appréhender dans son jus, à l'image d'
Evanescence à leurs débuts. Là ne s'arrête pas le voyage. Ballade mystique où crissent les riffs et vrombit une rythmique tout en retenue, « Without You » déploie des harmoniques un poil torturées le long d'un cheminement mélodique moins immédiat, toutefois non sans intérêt sur le plan atmosphérique. Mais la magie va opérer plus en profondeur sur sa voisine. Des perles de pluie inondent l'atmosphère doucereuse de « My Love », annonçant une sensible power ballade où les oscillantes notes haut perchées de la belle inspirent prestement le plus profond respect. De soyeuses nappes synthétiques contribuent à sous-tendre le filet harmonique dans lequel nous allons être cueillis, annihilant peu à peu toute tentative de défense. A quoi bon tenter d'esquiver l'imparable et intarissable appel de la sirène, à la croisée des chemins entre Helena Michaelsen (
Imperia) et Simone Simons (
Epica), ce serait peine perdue... Enfin, difficile de se soustraire à l'outro, d'une étonnante sobriété instrumentale et à l'atmosphère pastel. Ainsi, une guitare acoustique et des larmes pianistiques s'échappent du sensuel et affectueux «
Guardian Angel (Keep Me Safe) ». Ballade sulfureuse et langoureuse, sans rythme autre que celui de la musique des mots insufflés par l'infiltrant rai de lumière vocale de la valeureuse interprète, elle peut rappeler les premiers émois d'All About Eve. Malgré l'apparence linéarité du cheminement mélodique, on reste scotché par les jeux oratoires de Tanya de bout en bout. Chapeau bas.
On ressort de l'écoute de cette goûteuse galette avec le doux sentiment d'avoir décelé un groupe tapi dans l'ombre depuis de longues années, qui ne demande qu'à émerger de l'océan de productions de metal symphonique à chant féminin actuel, et qui semble tirer son épingle du jeu. Et ce, notamment en raison d'une production propre, sans ombre au tableau, mélodiquement efficace, techniquement irréprochable, suffisamment immersive pour stimuler l'envie d'y revenir. A défaut de se montrer original dans son propos, dont une majorité de ballades, le combo a joué la carte de la sécurité pour asseoir ses soyeuses gammes et délivrer ses magnétiques arpèges. On attend donc qu'il élargisse la palette de son offre, varie ses effets, diversifie ses plans vocaux et/ou orchestraux pour le voir s'inscrire parmi les groupes montants de son registre metal. Néanmoins, pour l'heure, nul doute qu'il pourra étoffer le panel de son auditorat, notamment, mais pas seulement, auprès d'amateurs de metal symphonique gothique à chant féminin, dans le sillage de ses sources d'influence. On espère désormais une offrande d'envergure, à l'aune d'un album full length, qui pourrait bien, d'ici peu, sortir des cartons...
Tania Bell a réellement une superbe voix! Même si le côté atmosphérique est trop présent pour moi, objectivement on peut dire que ce groupe talentueux mérite d'aller plus loin que cet Ep.
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