La page blanche posée sur le bureau patiente, elle attend que l'écrivain retrouve son inspiration. Elle espère, prisonnière de son mutisme éternel, que l'homme assis devant le bureau se décide enfin à écrire. Qu'il prenne son courage à deux mains et se lance enfin.
Tout autour, non loin de ce carré de papier d'un blanc immaculé, gisent, tels des vestiges d'un temps révolu, mais néanmoins non lointain, d'autres feuilles. Celles-ci gribouillées, ont été finalement chiffonnées et jetées négligemment aux différents bords du bureau.
Elle ne veut bien sur pas finir comme ses sœurs, mourir sans la moindre reconnaissance, sans la moindre considération, non elle veut remplir son rôle, elle veut trouver son utilité auprès de l'écrivain, auprès de l'homme assis au bureau.
Le syndrome de la page blanche, un manque total d'idée, un dépérissement de notre imagination voilà ce que craignent tous les artistes qui utilisent leur plume. Les écrivains tout comme les musiciens se doivent d'avoir de l'imagination, de pouvoir écrire les textes et les partitions, de trouver l'équilibre parfait entre la musique et le message ou les idées qu'ils veulent faire passer.
Redemption, groupe américain ne semble pas véritablement connaitre un tel symptôme, premier album en 2002, un deuxième en 2005 puis un troisième en 2007. Bon; il existe des groupes qui arrivent à faire mieux, mais en metal progressif il est tout de même assez rare de voir une telle rapidité quand à la sortie des galettes.
The
Origin Of Ruin est donc le troisième album du groupe. Après deux premiers albums convaincants et surtout un deuxième album tout bonnement magnifique, les espérances et les attentes autour de cet album sont forcément conséquentes.
Les fans du groupe ou ceux qui l'apprécient à sa juste valeur ne seront pas réellement surpris par cet album. En effet, on reste au sein d'un terrain connu, les musiciens ayant vu que leur formule marche, ont décidé tout simplement de garder leur base et de continuer d'avancer sans trop chercher de nouveauté.
Ainsi l'univers du groupe reste sombre et assez froid. Les pistes ont souvent un aspect clinique et aseptisé. On se retrouve vite à penser à du
Evergrey ou à certains autres groupes de metal progressif penchant vers un côté assez ténébreux.
Les pistes s'enchaînent agréablement mais nous sommes assez loin des surprises ou même de la claque tant attendue.
Les pistes bien que de qualité sonnent comme du déjà vu, "
Bleed My
Dry" lasse très vite, des chansons telles que "Used To Be" donnent une impression de déjà vu à l'album. Une impression qui fait qu'irrémédiablement toutes les autres qualités intrinsèques à l'album passent au second plan.
Les qualités sont bien entendu présentes, peut être un peu moins que ce que l'on était en droit d'attendre mais il est toujours bon de les noter.
Les pistes sont tout d'abord loin d'être désagréable à écouter, bien que certaines sont loin d'être passionnantes. Elles sont bien construites et tentent de nous conforter dans l'idée que nos amis de chez
Redemption sont de très bons musiciens.
Et quand au fait que les musiciens soient bons, il n'y a aucun doute là-dessus. La voix chaude de Ray Alder colle à merveille à l'univers du groupe. Il arrive à faire passer avec une maestria exceptionnelle chaque émotion et offre une belle dimension aux pistes.
La guitare, la basse et la batterie sont dans la plus pure tradition progressive et distillent à merveille leurs techniques et feelings qui manquent tellement à certains groupes de nos jours.
Le clavier bien que discret lors de certains passages garde une importance énorme surtout lorsqu'il s'agit de mettre en évidence l'ambiance voulue.
Lorsque l'album se finit, le constat parait assez mitigé, le bon côtoie le moyen, voire même le mauvais.
Certaines pistes se révèlent tout simplement excellentes comme "Memory" et "
Fall On You" ou encore dans une moindre mesure "The
Origin Of Ruin". A n'en pas douter, si toutes les pistes avaient été du même acabit le cd aurait tout simplement été l'un des meilleurs de l'année 2007.
Mais malheureusement on se trouve ici face à un album qui est assez fade, trop avare en nouvelle expérience, trop fébrile lors de certains passages.
Une absence de danger qui permet au groupe de ne pas prendre le risque de décevoir les fans, mais qui peut aussi frustrer ceux qui recherchent de la nouveauté et des albums haut de gammes.
L'homme assit sur sa chaise ne comprend pas ce qui lui arrive. Lui qui avait toujours tellement d'idées, lui qui arrivait à écrire des pages et des pages à la suite. Lui qui ne se trouvait jamais en panne d'inspiration, le voilà qui bloquait.
Et devant lui, il avait cette page vierge qui le narguait, qui se moquait ouvertement de lui. C'était le pire affront qu'il n'avait jamais connu. Lui écrivain respectable, connu de tous, du moins l'espérait-il, connaissait pour la première fois de sa carrière la défaite. Et cela lui était insupportable.
Non il n'abandonnerait pas comme ça, il prit son stylo plume, saisit la feuille, la cadra bien droite, bien en face de lui, et commença à écrire.
Qu'importait si cela n'était pas parfait ou même mauvais, après tous, les gens attendaient de lui qu'une seule et unique chose, qu'il écrive et c'est ce qu'il allait faire.
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