Madrost est un quatuor californien apparu au début des années 2010, dont le second album (
Into the Aquatic Sector - 2014 - chroniqué en ces pages) a su capturer l'essence des groupes thrash allemands fauchés des années 80 (
Darkness, early
Destruction pour situer) avec des compositions rêches et bourrées de références stylistiques. Sans pour autant copier comme certains autres les grands anciens avec une sincérité palpable,
Madrost méritait donc d'être suivi pour cette nouvelle livraison, toujours auto-produite, et au logo différent.
A l'image de sa pochette, bien plus élaborée et professionnelle,
Madrost a bien évolué en trois années. Presque le grand écart.
Exit le thrash arraché de l'album précédent, place à un techno-thrash plus moderne, illustré par des titres de morceaux représentatifs de l'évolution souhaitée. Des rythmiques un peu syncopées font jour, les vocaux de Poppit présentent une dimension plus maîtrisée (DiSanto de
Vektor est tout proche), et la mise en place renvoie également au grand
Vektor, à base de plans imaginatifs et enchevêtrés de grande classe ("The
Silence In
Ruins", à l'image des sept morceaux du disque).
Madrost a ainsi choisi son camp, et les progrès paraissent phénoménaux dans la richesse des compositions.
Sans toutefois singer réellement les Arizoniens,
Madrost s'approprie l'héritage tout frais du techno-thrash moderne, avec un sens du riff et de la cassure rythmique subite ("From
Sand to
Dust", virevoltant). Tout cela fonctionne parfaitement, à l'image de nombreux leads bien trouvés et imbriqués dans des méandres de ce
The Essence of Time Matches No Flesh. Les vocaux sont quand même moins présents que chez
Vektor, laissant des respirations bienvenues et privilégiant breaks et dynamisme général à toute épreuve (le génial "Abstractions"). Les morceaux, autour des six minutes chacun, ont le temps de s'installer sans tomber dans la superposition gratuite, chaque titre ayant sa propre idée maîtresse, tant et si bien qu'on aimerait parfois voir certains plans se renouveler (les soli à partir de 5'15" de "
No Future", ou à 3'00" de "Scorned"). Le disque passe ainsi très rapidement, n'étant d'ailleurs pas très long et ne laissant jamais l'ennui s'installer.
Sans refaire deux fois le même album (qui a réellement entendu parler d'eux avant ?),
Madrost rejoint avec
The Essence of Time Matches No Flesh le cercle fermé des espoirs d'un techno-thrash inventif, puisant dans ses racines les bases de sa musique, mais avec un rendu (très) actuel, un peu à l'image d'un
Black Fast, le côté black en moins.
Pas sûr que la fan-base d'origine adhère à 100% à ce changement, toutefois, tant l'écart en trois ans est ici immense. Les fans de
Vektor patienteront ainsi plus qu'agréablement le temps que DiSanto retrouve des musiciens, ou que Mameli (
Pestilence) retrouve enfin l'inspiration.
Madrost gagnerait maintenant à trouver un distributeur fiable pour s'exporter, promouvoir cet excellent album, et ainsi représenter le futur de ce style. Admirable.
Je titre me botte moyennement, faudra que j'écoute le tout.
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