Il y a des choses étranges dans la vie, des certitudes qui s’effondrent. Prenez, moi par exemple, j’adorais tout chez «
Vreid ». Faut dire que ses membres étaient des anciens de «
Windir », et que certains ont été à l’instigation du magique «
Cor Scorpii ». Souvenez-vous le dilemme au Hellfest 2014 quand on devait choisir entre «
Vreid » réinterprétant les morceaux de «
Windir » dans sa fameuse tournée Sognametal, et la reformation d’ «
Emperor ». Moi, en bon paganeuneux j’avais opté pour «
Vreid », en croyant voir un signe d’une reformation de «
Windir ». Je m’en suis mordu les doigts de ne pas avoir choisi «
Emperor » à la place. D’une part parce qu’«
Emperor » avait été le concert déterminant du Hellfest 2014, un événement féérique pour ceux qui m’ont rapporté le déroulement, et d’autre part parce que celui de «
Vreid » avait été une vraie constipation occasionnelle. Heureusement, ils se rattrapent avec les pièces. «
Welcome Farewell » sorti en 2013 n'était pas mauvais du tout, juste un peu moins fouillé que le monumental « V », qui siège désormais à la hauteur de leur discographie. En définitive, le prochain opus ne peut faire que bien. Détrompez-vous, les certitudes seront une nouvelle fois ébranlées avec « Solverv ».
Le disque ouvre sur des notes dissonantes. Les premiers pas sont hésitants, presque timides. On se rend vite compte que «
Vreid » effectue une sorte de bond en arrière dans le temps, pour nous jouer un black metal norvégien un peu plus ancien qu’à son habitude. Ça nous remet alors en mémoire ses deux premiers forfaits, qui étaient eux pourtant beaucoup plus mordants que ce que l’on écoute à travers ce «
Haust ». Le chant parait plus effacé, ce n’est pas toujours très soigné. Ce n’est vraiment qu’à partir du break atmosphérique que l’on retrouve le «
Vreid » des deux derniers albums, fluide et élaboré, comprenant même un solo relevé. La plupart des morceaux de l’effort se comportent de la même manière. Ainsi, « Geitaskadl » se déroule dans la plus grande confusion. Les départs en trombe ne sont pas superflus, mais c’est au contraire quand ça prend un rythme constant que l’on déchante. Le black de «
Vreid » devient alors redondant. Le chant est toujours aussi poreux et inhabité, à notre grand désarroi. Ça va encore être la partie gagnée par les prises atmosphériques qui fera la différence, soit lors du dernier tiers de piste.
Le fan de l’illustre formation norvégienne risque d’être quelque peu désemparé, car, le désenchantement va se poursuivre avec « Aetti Sitt Fjedl ». Pourtant, les débuts sont prometteurs, proposant un black metal très léger, mélodique, voire même mélancolique. Tout ce qu’un amateur de black orthodoxe pourrait détester, au contraire des autres. Ce titre très abordable quand on le découvre offre l’originalité de chœurs clairs. En fait, tout va bien dans le meilleur des mondes, on se laisse doucement transporter jusqu’au changement de la seconde partie, au rythme prononcé, compressé, maladroit, au point de s’avérer à la limite du vomitif. De l’inédit chez «
Vreid ». On ne comprend pas pourquoi la caisse claire était autant mise en avant non plus. Heureusement, cela s’arrange à l’approche de la fin. Mais le mal est fait. Cela semble rebondir sur « Nar Byane Brenn », l’entame atmosphérique nous emmenant près de 20 ans en arrière, un peu rutilant, mais faisant son petit effet grâce à son aspect martial. Une ouverture pour un black conquérant et nourri, qui manque toutefois de consistance sur la durée et tourne un peu en rond.
Nous aurons une bien meilleure surprise avec le long et triomphant « Fridom Med Daudens Klang » avec une ouverture impériale, toute solennelle et prenante, suivie imparablement par des secousses nerveuses, parfois un peu datées, mais mettant en relief des riffs et un solo efficaces. S’en suivra un black ambient très curieux sur le dernier tiers. Avec ce dernier morceau réconfortant et riche, l’album, malgré ses déceptions, parvient à se défendre malgré tout en grande partie grâce à des morceaux plus trempés, à l’image aussi d’un éponyme affichant dès le début sa détermination dans un déluge de coups et d’airs tourmentés. C’est le «
Vreid » incisif, au jeu alambiqué de «
Milorg » ou de « V » que l’on y retrouve, même si on décèle sur la seconde moitié ce black metal par à-coups typique du «
Satyricon » des années 2000. Le morceau « Solverv » trouve pour le coup son jumeau, y compris dans sa légère influence de «
Satyricon », avec « Storm Fra Vest ». L’extrait, solide, maniant finesse et agressivité, se montre également plus entrainant sur sa seconde moitié, comme c’est le cas d’ailleurs d’une bonne partie des titres de cet opus.
Ne comptez pas voir un jour la célébration du solstice d’Hiver supplanter celle de Noël. Parfois le retour dans le temps s’avère vain. Sur ce « Solverv » paru en 2015, il y aurait le sentiment d’une volonté de revenir sur les traces d’un black metal sous une forme plus classique, aux riffs rompus, comme le faisait «
Vreid » dans ses premières livraisons : «
Kraft » et «
Pitch Black Brigade ». Seulement, «
Vreid » n’offre pas la performance de ses deux premiers albums. Il se découvre moins inspiré et moins nerveux dans son jeu que dans le passé. On peut comprendre ça comme un gâchis quand on connait les deux albums fugaces et techniques qui ont précédé « Solverv ». Un retour en arrière inutile donc. Une nostalgie qui n’avait pas lieu d’être. Ainsi, l’effort paraîtra comme le (ou l’un des) plus faible(s) de la discographie. Néanmoins, il parvient pour autant à se défendre avec quelques titres bien travaillés. Une déconvenue, pas un désastre, en somme.
13/20
Je les ai vu en live en novembre dernier et c'était une tuerie. J'ai hâte de les revoir en 2016 car une nouvelle tournée et en préparation (j'espère secrètement une tournée Pitch Black pour le 10ème anniv de l'album)
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