Quand on évolue dans un groupe nommé
Totalselfhatred, il y a peu de chance que l’on fasse du power metal ou du pagan folk pouet pouet. En effet, c’est dans un black très mélancolique aux confins du DSBM que les Finlandais s’illustrent depuis 2005, et le
Solitude que voilà est leur troisième album.
Sept ans après un
Apocalypse in Your Heart bien plus direct et violent qui avait pas mal désarçonné les amateurs du premier album éponyme, le quintette revient avec son full length le plus aérien, lumineux et mélodique. MMXIII commence sur des notes de piano lentes qui nous emplissent doucement d’un sentiment de tristesse et de deuil, et sur lesquelles viennent se greffer des arpèges nus et froids. Le chant malade et arraché résonne en fond, puis le premier coup de tom vient donner plus de corps au malaise, délivrant une cascade de guitares aux mélodies aussi belles que désespérées. Au fur et à mesure de ces 9,15 minutes, le morceau se fait plus intense, hanté par des hurlements à glacer le sang ainsi qu’une double pédale qui vient appuyer le rythme. Les guitares, le piano et les différents chants - agissant comme des instruments à part entière avec leurs plaintes tantôt très aigues tantôt plus rauques mais toujours très expressives - fusionnent en un tourbillon d’émotions où douleur, beauté et dépression mêlent leurs humeurs, le tout magnifié par un blast en fin de morceau. Un superbe morceau qui fout la chair de poule.
Sur
Cold Numbness, ce sont les plaintes du violon qui nous accueillent, rappelant vaguement le cauchemar béat de
Requiem for a
Dream, vite bousculées par les secousses d’une basse impétueuse et un jeu de batterie particulièrement riche et fourni pour le style. Le contraste est assez frappant entre ces notes de guitare éthérées et cette fatalité qui nous écrase. D’une manière générale, les leads sont limpides et très pures, largement influencées par le post black, mais l’ensemble pue la dépression, fleurant le bon vieux DSBM du cimetière avec ces mélodies tristes, ces mid lugubres renforcés par la double pédale et ces vocaux insoutenables et vibrants de souffrance (Hallow,
Black Infinity). On constate d’ailleurs que le tempo général a largement baissé (il n’y a presque plus de blasts) et que
Totalselfhatred semble revenir à ses premières amours, proposant néanmoins une musique moins claustrophobe au son plus clair et privilégiant largement les intros acoustiques et les longs passages instrumentaux.
Quelque part entre les ambiances spectrales et moroses d’un An
Autumn for Crippled
Children, les mélodies aériennes et le chant arraché de
Numenorean et les penchants suicidaires d’un
Austere, la musique de
Totalselfhatred n’est pas violente, mais elle est sacrément intense, d’une beauté dangereuse qui peut vite faire basculer dans la négativité voire l’autodestruction. Ces 41 minutes combleront sans doute tous les amateurs de black atmosphérique, de post black et de DSBM qui apprécieront comme il se doit ce
Solitude très fignolé qui oscille entre contemplation calme (la fin de
Cold Numbness aux envolées célestes très post rock, le très mélodique Nyktophilia à la longue intro apaisante, mêlant arpèges et piano avec une simplicité touchante) et tempêtes émotionnelles qui risquent de pousser les plus faibles d’entre nous à commettre l’irréparable.
Pour résumer l’essence de ce troisième album, une fois n’est pas coutume, je ne tenterai pas de jeux de mot pourri ou d’ouverture pseudo philosophique mais je laisserai la parole au groupe lui-même : « Eteignez les lumières, vautrez-vous dans la douceur de cette négativité recluse et laissez-vous librement emporter par le flot d’émotions que notre
Solitude va vous procurer ». Tout est dit. A savourer, mais avec modération tout de même, et à déconseiller aux esprits chagrins et aux âmes dépressives…
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