Liste des groupes Black Metal Kjeld Skym

On est un bon matin de début 2015, petit plaid et café chaud, je fais mes courses musicales du mois dans mon canapé.
Mail ouvert, je constate l'ouverture des précommandes sur le label Hammerheart Records pour le premier album de Kjeld, intitulé "Skym".

Je fais quelques recherches les concernant et je découvre leur premier EP, "De Tiid Hâldt Gjin Skoft". D'une durée de 17 minutes, c'est une première bonne surprise et bien qu'emballé, je sais déjà qu'il tournera une ou deux fois, puis moisira dans ma collection durant quelques années, comme d'habitude, malheureusement.

Du coup hop, emballé c'est pesé, il n'y a plus qu'à attendre le jour de la sortie. Et le grand jour arriva plus vite que prévu ! J'enfile la galette, les petits crépitements annoncent les hostilités et là, sans prévenir, je me prends une rafale de parpaings à travers la gueule. Déjà parce que j'avais oublié de baisser le son de mon matos (oui, quand tu écoutes du vieux black enregistré avec le cul, tu pousses un peu les potards), mais aussi parce que avec cet album, "Skym", le terme gonflette prend tout son sens.

Bon, niveau line-up il y a l'arrivée du chanteur appelé "Skier" remplaçant "Asega" qui officiait sur le premier EP cité plutôt et qui honnêtement envoyait du sale ! Sinon on prend les mêmes et on recommence, sauf que…

Musicalement on est sur une durée de pistes se situant entre trois et huit minutes… oui, huit minutes pour du Black, relativement loin du contexte atmosphérique comme Paysage d'Hiver ou de la vague "Metal Progressif" le propose c'est étonnant mais sans être choquant.

Disons-le honnêtement, le rendu final apporté à "Skym" est imposant tout en étant impersonnel dans le sens où le son est non seulement extrêmement lisse et sonne un poil synthétique (voir peut-être trop pour certains), mais aussi très conventionnel dans son approche concernant le mixage / mastering où le rendu est gonflé de tous les côtés. J'aurais peut-être préféré le son du premier EP qui restait plus acoustique que celui-ci même si à bien écouter, on en est pas si loin…mais la différence est quand même bien là.

Là où j'y ai vu un bon potentiel, beaucoup y ont vu un opus banal, gonflé aux hormones sans identité en le citant de trop "modernisé"… mais à juste titre oui. Le choix de s'être dirigé sur une production telle que celle-ci, filtre un certain type d'auditeur et du reste beaucoup de reproches tournent autour du rendu final, pas de la musique en soit bien qu'on entende les éternels "c'était mieux avant", "c'est du réchauffe" etc, etc...

En passant sur l'aspect composition, à la fin de la première face du vinyle, j'ai lancé un bon gros "oh, bordel", tout en légèreté. Ça faisait longtemps que je n'avais pas fait tourner une galette qui me faisait autant frissonner d'un bout à l'autre, du moins en terme de Black Metal, de cette décennie, comme celui-ci.

"Skym", c'est un condensé de nervosité Hollandaise, alliant intelligemment nappes atmosphériques éparses voire futuristes par moments et gros décalottages comme sur la piste "Gerlofs Donia" qui, pour moi, reste la crème de cet opus. Le refrain, si on peut l'appeler comme ça, est un concentré de puissance increvable. Ils prennent le temps de poser quelque chose de structuré, immersif et sauvage avant d'envoyer un déluge par-dessus un orage alors qu'on le pensait déjà être à son apogée.

Techniquement, c'est violent, travaillé et maîtrisé sans spécialement paraître technique. On y retrouve quelques clins d'œil à la scène nordique sur la piste éponyme, reprenant schématiquement des riffs hyper rythmés et posés comme le propose Taake sur sa piste "Nordbundet", sans s'y perdre et sans en abuser. Ils reviennent rapidement à "leur son", en alternant roulements de grosse caisse et blasts dévastateurs qui sont particulièrement impressionnants. Grossièrement parlant, c'est du blast, de la double, du shred extrêmement qualitatif, mais en même temps, c'est tout une maîtrise musicale qu'ils ont réussi à concrétiser même si on en revient toujours au même point.

La piste " Ús Grûn" par exemple, propose une montée en puissance redoutablement efficace en doublant purement et simplement sa vitesse d'exécution en à peine quatre minutes. C'est le genre type de composition réalisée avec intelligence et technique qui me laisse tout bonnement sur le cul. Cette force de frappe et cette qualité d'exécution les rapprochent intensément du côté de la scène Polonaise comme Outre pour le côté progressif et MasseMord pour le côté sauvage. Le batteur, Fjildslach m'a particulièrement étonné sur son jeu et ses blasts qui me laissent sans voix bien qu'un peu plus de feeling, moins orienté "machine automatique" aurait fait un peu de bien. La piste "Stoarm" est un exemple frappant de diversité de jeu comparativement à l'ensemble de l'album où les rythmes s'entremêlent et passent par du mid-tempo, du blast et de la déstructuration. C'est une piste qui donne du souffle, qui reste malgré tout isolée mais c'est le genre qu'on retrouvera un peu plus fréquemment sur l'album "Ôfstân" sorti en 2021.

Kjeld sait aussi proposer quelque chose de plus conventionnel et plus en mode "tiens, manges-toi ça et silence" où pendant trois bonnes minutes, la piste te scalpe la moitié de la gueule avec une série de riffs absolument redoutables en ponctuant par un gros "Brek En Bran", qui n'est autre que le titre de la piste, hurlé par "Skier".

On le sait tous, beaucoup de chanteurs ont cette fâcheuse tendance à sur-gonfler leurs voix à la Disto en studio pour donner plus de dimensions à leurs growls à défaut, parfois, d'avoir le talent. C'est sans compter aussi sur ceux qui doublent graves et aigus en simultané pour paraître possédés à défaut de l'être réellement. Là, ça sort du ventre, c'est froid, brut, c'est dynamique et il y a du coffre, beaucoup de coffre.
Vocalement c'est très énervé et "Skier", n'officiant dans aucun autre groupe référencé du moins en tant que chanteur, met pas mal de bonhommes à quatre pattes.

Mon ressenti sur cet opus c'est qu'il fait clairement partie de mes favoris dans un genre bien particulier qu'on pourrait qualifier de Black Metal moderne sans en arriver à créer un énième sous genre, qu'on soit bien d'accord.
Avec l'arrivée du nouvel album intitulé "Ôfstân", plusieurs petits reproches cités plus haut ont été corrigés au détriment d'autres aspect que j'adore sur celui-ci et j'espère avoir l'énergie de le chroniquer prochainement.