Les espoirs placés en nous dès le début sont souvent les plus difficiles à concrétiser, encore plus à faire oublier à travers les années.
Souvenons-en nous…de ces jeunes brésiliens qui, encore naissants, avaient balancé un cinglant "
Defying the Rules", emplie d’impertinence et d’un talent si démesurément immense qu’il faisait figure de totale insolence à la vue d’une scène power metal essoufflée et fragile. Certes, l’artwork était immonde et les textes atteignaient la quinzième zone mais la musique atteignait des sommets. Croisement entre le meilleur du heavy britannique et du power allemand, l’album comportait autant de titres que d’hymnes, propulsés par une production dévastatrice, des riffs frisant le génie (particulièrement les divins "
Millenium Quest", "Stare at Yourself" et "
Steel Lord on Wheels") et un vocaliste d’exception, à l’aise dans tous les domaines et dégageant une puissance phénoménale. Le futur du heavy metal était brésilien et, si
Angra ou
Shaman ne concrétisaient pas les balbutiements de leurs nouvelles carrières respectives,
Hibria serait là.
Si le succès au Japon et en Amérique du Sud fut rapide et ne tarira pas les années suivantes, l’album fut très confidentiel en Europe. "The Skulls Collectors", trois ans plus tard, fut en revanche une amère déception. Le son, la hargne et la fougue n’étaient déjà plus là et de sérieuses questions pouvaient déjà se poser, questions qui trouvèrent une réponse fort malheureusement négative à la sortie du fade "
Blind Ride", rentrant désespérément dans le rang d’un heavy metal sans valeur, traditionnel à en crever et sans envergure.
Désormais dans le giron d’AFM Records, label taillé pour un groupe comme
Hibria, "
Silent Revenge" sort mais pour quelles raisons ? L’espoir est-il encore permis ? Les brésiliens, après moult modifications de line-up, peuvent-ils encore nous faire vibrer ?
Sans que le « oui » soit complètement extatique, force est d’admettre que c’est un opus d’un tout autre calibre que le groupe nous a pondu ici. La production est bien plus apre et puissante que sur "
Blind Ride" et il parait évident que Iuri Sanson (chanteur et principal compositeur) a retrouvé une rage qui lui manquait foutrement depuis quelques temps. Le titre éponyme qui ouvre l’album le prouve aisément en débutant sur un pattern de batterie et un riff agressif à souhait, rappelant les débuts du combo et surtout une forme de heavy très puissante, jamais loin du thrash, qui permet de dégager une puissance phénoménale aux compositions. Le chanteur est toujours là, surmontant les riffs de sa voix surpuissante, en profitant une fois de plus pour réaliser quelques écarts extrêmes sur des chœurs très massifs afin de poser un refrain mélodique mais diablement efficace et ravageur. Renato et Abel, les deux guitaristes, sont plus furieux que jamais et les soli donnent le tournis dès ce premier titre, proposant même un solo au tapping de basse impressionnant surmontée d’une attaque proche d’un blast beat. Un apéritif donnant furieusement envie de taper du pied et de lever du poing.
Sans être aussi exceptionnel que le premier opus du groupe, qui s’avère de plus en plus indépassable pour le combo lui-même, "
Silent Revenge" se rapproche néanmoins de son glorieux ainé grâce à certaines compositions inspirées et intelligentes qui tirent de leur classicisme la puissance et l’intelligence que ne contenaient jamais les deux précédents disques. "Deadly
Vengeance", par exemple, pose un refrain simple mais entrainant en s’aidant d’un riff à la fois rapide et accrocheur qui devrait trouver une place rapide dans la setlist d’
Hibria. On sent par ailleurs que l’album a été pensé en ce sens puisque certains passages sont clairement écrits pour laisser de la place au public sans que cela ne sonne creux dans la forme studio. Le génial "The Way is It", long de plus de huit minutes, en est la preuve flagrante.
Outre une dimension épique omniprésente, la composition se compose en plusieurs parties pour se montrer parfois très agressives (la fameuse part thrash ressortant de la plus belle des manières) ou au contraire proche d’une certaine improvisation avec de nombreux soli de basse et de batterie qui se rapprochent presque d’un jam enregistré et qui, soyons-en certains, devraient permettre au public de hurler convenablement. Edurdo Balto, le batteur, est d’ailleurs très en vue tout au long du disque, souvent sur les introductions (celle, fulgurante, de "Walking to Death" par exemple, avec une ligne de basse à tomber) et il est absolument délectable de retrouver les lignes de basse absolument insaisissables et techniques à la Steve Harris qui caractérisaient "
Defying the Rules". "
Silence Will Make you
Suffer" tient d’ailleurs très bien son rôle de single, plus mélodique que le reste du disque, avec des parties de chant moins véhémentes et surtout une omniprésence de lead mélodique, laissant les riffs purs en retrait.
On pourra certainement dire que le résultat n’est pas parfait, qu’
Hibria n’innove pas (ils ne l’ont jamais fait) ou qu’ils recyclent leurs propres idées, je dirais surtout qu’ils sont enfin parvenu à offrir un véritable successeur à un premier album si bon qu’il était fatalement casse-gueule de passer derrière. "
Silent Revenge" aura de plus la double mission de redorer le blason du groupe auprès des fans de la première heure et surtout de donner une plus grande visibilité aux brésiliens avec un deal européen qui lui sied désormais parfaitement. Les cartes sont dans leurs mains…et 2013 pourrait bien être leur année.
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