Encore un énième groupe metal symphonique à chant féminin à venir tenter sa chance dans ce si concurrentiel registre, et probablement voué comme tant d'autres à une disparition prématurée, me direz-vous, et vous auriez raison...à quelques nuances près, toutefois ! Ce serait faire fi de sa détermination à en découdre, ce qui n'a nullement exclu un brin de prudence dans sa démarche ; dynamique d'ensemble ayant pour corollaire un bel élan créatif de la part de chacun de ses membres. En effet, créé en 2018 à
Vancouver, ce jeune quintet canadien n'accouche de son premier bébé qu'une année plus tard, et ce, à l'aune de ce modeste EP dénommé «
Savage Love » ; auto-production où s'enchaînent sereinement 3 titres sur un ruban auditif d'un quart d'heure tout au plus. Cette œuvre tenant dans un mouchoir de poche sera-t-elle de nature à propulser le combo nord-américain parmi les valeurs montantes de cet espace metal, à l'image de
Beyond The Black,
Elvellon,
Sleeping Romance,
Walk In Darkness et autres
Once et
Metalwings ?
Ce faisant, la frontwoman Chelsea
Rose, le guitariste et vocaliste Mark Anthony Richardson, le claviériste et programmeur Jamie Meyer (ex-
Devin Townsend, ex-
Strapping Young Lad (live)), le bassiste Sylvain Maltais (Anarcheon,
Omega Crom) et le batteur Kyle Summers (Apprentice, Gatekeeper (live)) ont conjugué leurs talents pour nous plonger au cœur d'un rock'n'metal mélodico-symphonique gothique dans le sillage de
Nightwish,
Xandria,
Delain,
Amberian Dawn et consorts, où esthétique mélodique rime avec grisante impulsivité rythmique ; fulgurance percussive avec sensibilité à fleur de peau. Pour l'occasion, ont été sollicités les apports du batteur Max Friesen. Bénéficiant d'un enregistrement de bonne facture et d'un mixage à parités égales entre lignes de chant et instrumentation, signés Jamie Meyer, le laconique opus accuse peu de sonorités résiduelles tout en octroyant une saisissante profondeur de champ acoustique.
Dans sa globalité, le propos demeure à la fois vivifiant et enivrant. Aussi ne tarde-t-on pas à entrer dans la danse à l'aune du ''delainien'' mid tempo progressif «
Destroyed in Delight ». Une fois ses délicats arpèges au piano envolés, et dès les premières attaques de sa section rythmique, le collectif canadien donne le la. Calé sur un tapping aéré, laissant vrombir à l'envi ses lignes de basse, le brûlot dissémine parallèlement ses couplets taillés au scalpel que relayent des refrains certes convenus mais des plus accrocheurs. Mis en exergue par les chatoyantes inflexions de la sirène que viennent renforcer des choeurs aux abois, le méfait réserve par ailleurs de saisissantes montées en puissance, dans la mouvance de
Xandria (seconde mouture), ainsi qu'un fin legato à le lead guitare. Bref, une entrée en matière sur des chapeaux de roue à l'aune d'une piste headbangante et déjà inscriptible dans les charts.
Lorsqu'elle accélère d'un cran la cadence, là encore, la troupe trouve sans mal les clés pour nous rallier à sa cause. Aussi sera-t-on happé à la fois par l'indéfectible énergie émanant des entrailles de «
Savage Love » et l'inaliénable fureur de « Anybody's Daughter » ; deux sémillants up tempi d'obédience metal symphonique pur, à mi-chemin entre un
Nightwish des premiers émois, eu égard à leurs cheminements d'harmoniques, et
Amberian Dawn (seconde période), quant à leurs rayonnantes lignes mélodiques. Dotés de refrains d'une efficacité redoutable et de troublantes séries d'accords, ces solaires manifestes se parent également de truculents gimmicks guitaristiques. Enjolivées par les félines oscillations de la maîtresse de cérémonie, ces deux compositions s'apparenteraient à une enivrante ronde de saveurs. Autres gemmes à mettre à l'actif du combo, donc...
A l'issue de notre brève mais grisante traversée, force est d'observer que le message musical pousse irrémédiablement à la remise du couvert aussitôt l'ultime mesure envolée et qu'un potentiel technique et surtout mélodique s'esquisse déjà. Ainsi, marchant sur les pas de leurs maîtres inspirateurs tout en sachant judicieusement s'en écarter, nos compères ont bien appris leurs gammes, et ce, au point de les avoir suffisamment digérées pour se les approprier, et donc exister par eux-mêmes. On aurait peut-être souhaité un panel plus étoffé de l'offre, par l'octroi, entre autres, de l'un ou l'autre instrumental, d'une ballade, d'une fresque ou encore d'un duo. De plus, les prises de risques étant réduites à néant, le menu propos demeure éminemment classique dans sa forme, répondant trait pour trait aux standards du genre. Pour l'heure, sans lui autoriser l'accès au rang de valeur montante, cette première livraison pourrait déjà placer le combo canadien parmi les espoirs du metal symphonique à chant féminin non lyrique. Affaire à suivre...
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