Si le nom d'
Emil Bulls ne vous dit absolument rien, il y a fort à parier que vous ne résidez pas dans les contrées germaniques. En effet, si ces munichois n'ont à peu de choses prés aucun statut en France, même vous avez peut-être pu y être confronté lors de leur passage en première partie de
Die Apokalyptischen Reiter en
2012 ; outre-Rhin, c'est une autre paire de birkenstocks : en effet, il ne s'agit ni plus ni moins que de leur neuvième album, depuis le premier datant de 1997, et les six prédécesseurs de ce «
Sacrifice to Venus » sont entré dans les charts allemands en matière de vente de disques, «
Oceanic » le dernier tenant jusque là la corde avec une seizième place, rien que ça...
Pour autant s'il n'est pas rare que des groupes cultes allemands peinent à atteindre à l'étranger et notamment en France, l'aura qu'ils ont derrière leurs frontières (on pensera à
In Extremo même si leur statut s'améliore depuis peu ou encore à Subway to Sally, groupe au statut tout à fait anecdotique chez nous et qui en Allemagne peuvent tourner avec
Lordi et
Korpiklaani en premières parties sur la même tournée...), le facteur langue est souvent mis en avant pour expliquer cette différence de perception, or ici, il ne peut en être de même puisque
Emil Bulls ne chante qu'en anglais.
Une des autres raisons est le coté nettement moins cloisonné qu'il y a en Allemagne entre une certaine frange de la scène metal même avec vraie voix agressive (évidemment pas celle d'
Endstille ou
Defeated Sanity) et la scène rock ; un peu ce qu'avaient essayé de faire dans le début des années 2000, des groupes comme
Pleymo ou autres
Enhancer voir Empyr (hum...). Ils avaient d'ailleurs échoué, la plupart disparaissant simplement, d'autres évoluant par la suite vers quelque chose de plus orienté metal comme Aqme.
En effet, il y a des groupes éminemment metal qu'ils soient neo, core, alternatif qui sont suivis et soutenus par un public pas forcément metal lui-même (d'où peut-être le top 50).
Enfin, bref, puisque le mot a été lancé, autant le dire maintenant, même si catalogué « fusion » sur le site,
Emil Bulls n'a pas grand chose à voir avec
Waltari ou
Primus. En effet, ils mélangent motifs metal, rock alternatif, hardcore et à l'occasion un peu de hip-hop, dans une musique qui pris dans le contexte de la création du groupe mi-90 a indubitablement légitimité à être qualifiée de neo metal.
Attendez, ne fuyez pas direct ! Et ce, même si j'ai cité Empyr dans la chronique...
Déja, parce qu'
Emil Bulls pratique une musique directe et entraînante, très énergique et au final relativement plaisante dans son ensemble. Là où un certain nombre de groupes de nu metal se sont fait dévorer par la déferlante metalcore début 2000,
Emil Bulls s'en est nourri.
Ainsi, dés le début de « The Grave », on se rendra vite compte que la musique pratiquée n'est pas restée bloquée en arrière mais est résolument moderne et malgré son coté pas si abouti que ça, ce titre n'est pas au stade de la guimauve ni de l'inhomogène electro-funk-rap-metal.
Certes,
Emil Bulls n’innove vraiment pas avec leurs structures, leurs pre-chorus hargneux et bas-du-frond et ce fameux refrain avec la voix mi-claire de Christoph Freydorf qui en agacera certains, je suis sûr que vous voyez de quoi je veux parler, un peu à la Chester Bennington. Mais il faudrait être malhonnête pour dénier une certaine valeur à des titres comme « The Age of Revolution » ou « Hearteater », des offrandes efficaces et pas si pauvres que ça avec notamment un solo entraînant dans le second nommé. Même si certains morceaux évoquent quand même d'autres groupes de référence par exemple
Limp Bizkit (
Sacrifice to Venus), Sum 41 (Keep on
Dreaming) ou
Linkin Park (The Way of The
Warrior),
Emil Bulls parvient à avoir une identité et à être reconnaissable à l'écoute. Ainsi, les chœurs entêtants et répétitifs typiquement hardcores d'un « Man or Mouse » et surtout « Pants
Down » (une nouvelle version du « Tomber la chemise » de Zebda?) apportent une identité propre, dans un disque assez long où aucun morceau ne se ressemble.
Finalement, il n'y a que peu de surprises (la seule exception étant le titre final « Behind The Sun » et sa démarche bien plus post et planant) et les fans allemands retrouveront le groupe là où ils l'avaient laissé.
Hormis quelques fausses notes, l'insipide ballade « Gone Baby Gone » ou le très niais et saoulant « I Wanna Feel You »,
Emil Bulls sort une galette tout à fait correcte, dans la lignée de leurs productions habituelles et ne s’essouffle pas, battant encore avec cet album ce qu'ils avaient fait auparavant en terme de vente dans leur pays (sixième au top 50 ).
S'il est fort peu probable que le phénomène qu'est l'ami Émile (sans ses images) en pays teuton, ne se propage par chez nous, il serait regrettable qu'il soit définitivement classé dans un neo-metalcore sans intérêt aucun.
Certes, leur musique n'est pas à mettre entre les mains de tous les métalleux français et certains trouveront sans doute le tout basique et commercial, mais le constat demeure, des groupes de ce statut, on n'en a tout simplement pas...
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