Suite à un premier et très encourageant EP, «
Saturnine Moon », d'aucuns pouvaient subodorer que le quintet luxembourgeois n'allait pas s'arrêter en si bon chemin. Pari gagné ! Le voici donc de retour, quelque trois années plus tard, muni d'un album full length, cette fois, répondant au nom de «
Reflections ». Ce qui ne signifie nullement que le combo soit resté tapi dans l'ombre ce laps de temps durant, loin s'en faut. Aussi, réalisera-t-il quelques concerts sur la scène metal locale (''Arts Without Borders'', à Luxembourg City, en 2021 ; ''Rock Café'', à Remich, et ''
Hell Keller'', à Wellenstein, en 2022 ; ''Sang&Klang'', à Luxembourg City, en 2023...) et accouchera-t-il de trois singles dans la foulée («
Ghost Inside », «
Void » et «
Fallen Kingdom »), quelques semaines préalablement à la sortie de son premier et présent effort de longue durée. Ce faisant, les dix pistes inédites de cette auto-production seraient-elles à même de porter la troupe parmi les valeurs montantes du si concurrentiel espace metal symphonique à chant féminin ?
Dans ce dessein, le line-up de la dernière traversée n'a subi aucun remaniement, signe d'une indéfectible collaboration entre Natascha Schmit, chanteuse aux puissantes inflexions et au cristallin filet de voix, Andy Schanen aux guitares, Gábor Bándi (MIY) à la basse, Jimmy Schumacher aux claviers et Mike Bertrang à la batterie. Conformément à ses aspirations premières tout en inséminant à son propos de nouvelles sonorités, le quintet ainsi constitué nous immerge au sein d'un metal mélodico-symphonique gothique, aux relents power et folk plus manifestes qu'autrefois ; ainsi se dessine un message musical à la fois enjoué, intrigant et romanesque, dans la veine coalisée de
Nightwish,
Xandria,
Delain,
Lyriel,
Coronatus et
Diabulus In Musica, la petite touche personnelle en prime.
Mixées au Colour Radio, à Cologne, par Mario Hann (vocaliste/guitariste/bassiste (Feradur, Bongtomy...), ayant également assuré mix et mastering pour Luzidity,
Firtan, Behold, entre autres) et mastérisées aux Finnvox Studios, à Helsinki, par un certain Mika Jussila (
Amorphis,
Amberian Dawn,
Edenbridge,
Masterplan,
Nightwish...), les 43 minutes du ruban auditif de ce set de compositions bénéficient d'une qualité de production d'ensemble difficile à prendre en défaut. En émane une belle profondeur de champ acoustique doublée de finitions passées au crible. Mais embarquons sans plus attendre à bord du sécurisant vaisseau, et laissons nos cinq corsaires nous emmener pour une croisière que l'on espère ponctuée d'îlots enchanteurs...
C'est sur une mer on ne peut plus agitée, secouée par les vents dévastateurs d'une tempête rageuse, que commence notre périple, à l'instar de « Hearken You All » ; une brève et cinématique entame aux arrangements ''nightwishiens'' où un anxiogène récitatif insufflé par une empreinte masculine aux abyssales inflexions nous est alors conté, évoquant le caractère tragique de la situation dans laquelle nous allons être plongés. On comprend dès lors que les événements ne sauraient tarder à se déchaîner, à commencer par son voisin de bobine, « Rungholt », mid/up tempo power symphonique folk aux riffs épais et doublés d'un martelant tapping, à la confluence de
Nightwish et
Coronatus ; livrant un refrain catchy, mis en exergue par les cristallines impulsions de la sirène, et bien que recelant un pont techniciste qui ne s'imposait pas, ce propos à la fois impulsif et empreint de jovialité ne se quittera qu'à regret. Dans cette mouvance, le pulsionnel «
Fallen Kingdom » retiendra tant pour ses sémillants arpèges d'accords que pour sa touche death opportunément positionnée, cristallisée par des growls glaçants. On pourra encore opter pour le pétillant et ''delainien'' «
Void », eu égard à ses invitants harmoniques et à son énergie aisément communicative, même si l'on regrettera la platitude d'un final prématurément amorcé.
Quand le rythme de ses frappes se fait plus mesuré, le combo trouve quelques clés pour nous aspirer dans la tourmente. Ce qu'atteste, d'une part, «
Dark Oceans Tide », ''xandrien'' mid tempo aux riffs crochetés. Dotées d'un grisant refrain mis en habits de lumière par les angéliques ondulations de la déesse, mais parsemées de ponts instrumentaux en proie à une tenace répétibilité, les quelque 6:11 minutes de l'avenante offrande pourront interpeler le chaland sans pour autant prétendre à une inconditionnelle adhésion. Entamée et conclue par un fin picking à la guitare acoustique, évoluant sur de soyeuses nappes synthétiques et témoignant de grisants contrastes rythmiques, la fresque «
Ira Naturae », elle, aurait bien des arguments pour nous aspirer plus sûrement dans son sillage si elle n'était émaillée d'une interminable et usante séquence instrumentale. Un poil plus cadencé, et dans la dynamique de
Diabulus In Musica, se pose l'invitant « Between
Two Worlds », que l'on cochera surtout pour ses couplets finement ciselés et un final en crescendo judicieusement positionné et des plus galvanisants. Enfin, infiltré d'un seyant legato à la lead guitare et d'une belle gradation du corps orchestral, le mid tempo cinématique et progressif « Vallée de la Sûre » nous convie à une traversée instrumentale du plus bel effet.
En dépit de ses mérites, cet essai n'ira pas sans accuser l'un ou l'autre bémol. Ainsi, s'écoulant tous deux le long d'une ligne mélodique en proie à quelques linéarités et investis d'une longue et fade plage instrumentale en leur centre, l'incisif et ''delainien'' «
Ghost Inside » comme le trépidant et ''xandrien'' « City of
Rats » peineront à convaincre de leur efficacité.
En définitive, cette traversée en eaux profondes réserve bien d'invitants instants assortis de quelques surprises du meilleur effet, pour le moins, aptes à aspirer un tympan déjà familiarisé avec les travaux des maîtres inspirateurs du collectif. Cependant, entrecoupés de zones de remplissage cristallisées par moult ponts technicistes qui ne s'imposaient pas, certains passages ratent leur cible de peu, et, par voie de conséquence, n'emportent que difficilement l'adhésion. Cela étant, disposant d'une technicité instrumentale aiguisée, de mélodies le plus souvent finement esquissées, et d'une ingénierie du son plutôt soignée, nombreuses sont les armes de cet opus susceptibles d'assurer sa défense. Aussi, 7 ans après sa sortie de terre, le combo luxembourgeois peut espérer jouer les outsiders, à défaut de venir grossir les rangs des valeurs montantes de ce registre metal. Bref, une œuvre, certes, seyante et des plus enivrantes, mais en proie à d'impondérables irrégularités...
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