Mine de rien, ça fait quand même plus de vingt ans que
Ragnarok est dans le circuit. Eternel second couteau de la vague de black norvégien des années 90, la horde nordique emmenée par un Jontho à la ténacité sans faille a petit à petit réussi à s’imposer à force de persévérance et de sorties de qualité sur une scène metallique saturée, et ce malgré un nombre incalculable de changements de line up.
Aujourd’hui, on décrit souvent
Ragnarok comme un simple groupe de black brutal qui envoie la purée sans se poser de questions. Oui, c’est vrai, il y a beaucoup de blasts dans la discographie du groupe, et oui, c’est vrai, d’une manière générale, les Norvégiens ne font pas dans la dentelle quand il s‘agit d’envoyer un black blasphématoire, rapide et puissant. Ceci dit, il serait abusif de résumer
Ragnarok à cette étiquette réductrice et il suffit d’écouter les premières réalisations du groupe pour constater qu’il n’a pas toujours évolué dans ce metal assez scolaire qu’on lui connait aujourd’hui. D’ailleurs, on constatera que la musique, si elle a évolué vers quelque chose de plus brutal et convenu dans les années 2000, a toujours su garder ce sens du riff magique et envoûtant indispensable à tout bon titre de black metal.
Ragnarok nous revient donc avec son huitième album studio, qui, plus que de marquer un tournant dans leur musique (ça se saurait !), revêt une importance symbolique pour le groupe, qui évolue désormais sous forme de trio : exit HansFyrste, c’est désormais Jontho qui assure le chant, assumant pour la première fois pleinement son rôle de leader et de compositeur, et allant pour ce faire jusqu’à délaisser son instrument de prédilection à un Malignant qui s’en sortira avec les honneurs.
A part ça, quoi de neuf ?
Pas grand-chose ma p’tite dame,
Ragnarok fait du
Ragnarok, ceux qui aimaient les albums précédents aimeront celui-là et vice versa. Ceci dit, il serait dommage de ne pas jeter une oreille sur ce Pychopathology, car même s’il ne change pas sa formule, le combo norvégien est plutôt dégourdi quand il s’agit de lâcher un black à la fois rentre-dedans, dévastateur et bien evil.
C‘est un
Dominance and
Submission qui nous accueille sur un début assez typé
Rotting Christ, avec ce blast lourd et ces guitares saccadées et tranchantes. Le morceau, entraînant et puissant notamment via un son énorme, est finalement assez varié et mélodique, même si les parties de blasts sont largement dominantes. I
Hate enchaîne, avec en introduction ce riff lourd appuyé par la double pédale et rythmé par des tambours de guerre avant l’explosion qui survient sous forme de rafales de blasts implacables. Encore une fois, le titre ne se contente pas d’être bêtement linaire, se fendant par trois fois de ce passage lent et rampant faisant la part belle aux guitares acoustiques avant de repartir dans un nouveau déferlement de violence.
En fait ce n’est pas tant la brutalité et la rapidité de
Psychopathology qui sautent aux oreilles que son côté puissant et rouleau compresseur. On remarquera d’ailleurs une influence death sur certaines compos, dont l’excellent titre éponyme, très martial dans sa rythmique et carré dans l’exécution de ses riffs, ou le break à 3,33 minutes d’Into the
Abyss. Cela est en partie dû au son, particulièrement massif, et au jeu de Malignant, qui livre une performance très dynamique et convaincante derrière ses futs.
On appréciera d’ailleurs que, sous ces gros blasts destructeurs, la voix hurlée et haineuse du leader et ces riffs joués à toute blinde, se cache une recherche musicale certaine qui fait en grande partie l’intérêt de ces onze titres: les riffs sont, d’une manière générale, assez complexes et travaillés, et certains sont véritablement possédés, habillés de cette flamme noire et démoniaque qui nous ramène droit dans les années 90, avec un son et une puissance actuels. Le tout va vite, et Malignant nous assomme sous une avalanche de blasts lourds et appuyés, mais les Norvégiens savent aussi ralentir le tempo pour éviter la lassitude, même si l’ensemble reste résolument intense.
En ce sens, Jontho est véritablement un bon compositeur, et chaque morceau possède son petit passage accrocheur voire réellement envoûtant qui aère un peu le charnier qu’est cette guerre totale (le refrain fédérateur de
Infernal Majesty, le pont d’
Heretic, mélancolique, poignant et hypnotique dans ce déferlement de rage destructrice, le riff magique qui entame Into the
Abyss). Where Dreams Go to
Die termine les hostilités de manière fort honorable, alternant passages enlevés et mid tempo plus groovy, se fendant même d'un pont central orientalisant de bonne facture.
Bon, et les défauts alors ? Allez, autant le dire tout de suite, comme ça ce sera fait : le manque d’originalité est flagrant, et une certaine linéarité se ressent tout de même à l’écoute de ces 50 minutes, les structures des morceaux étant assez similaires malgré les efforts du groupe pour aérer le tout. C'est aussi ce qui fait le charme de la musique de
Ragnarok me direz-vous, se prendre un parpaing bien compact de black puissant, brutal et d’une cohérence sans failleen pleine gueule, mais disons que l’album aurait sûrement gagné à être amputé de quelques titres (au pif The
Eight of the
Seven Plagues et
Blood, qui n’ajoutent rien au schmilblik), parce que 50 minutes d’une telle intensité, ça fait quand même beaucoup à s’enfiler d’une traite.
On notera un petit bémol aussi au niveau du son - par ailleurs excellent - avec ce frottement de cordes intempestif et irritant qui gâche un peu le plaisir d’écoute, qui plus est totalement incongru pour une production si moderne, massive et léchée qui semble vouloir se concentrer davantage sur la puissance et la destruction que sur le côté authentique du black originel.
A part ça ? Rien à ajouter, foncez, car
Psychopathology, c’est du tout bon dans son genre, à savoir un black rapide, sombre et furieusement intense. Ajoutez à cela un sens de la composition certain, un travail musical soigné faisant preuve d’une certaine subtilité sous cette déferlante de brutalité, et, l’essentiel, des riffs qui tuent, que demander de plus ? Sans être incontournable,
Psychopathology reste dans le haut du panier du black à tendances brutales, et confirme que l’on peut toujours compter sur
Ragnarok, en 2016 comme en 1995.
Hail Ragnarok, et hail
Satan !
Pour finir l'album est excellent avec de petites lacunes mais peu importe si l'album est excellent \m/.
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