Tout comme nombre de formations metal symphonique gothique argentines influencées par
Nightwish et consorts, telles
Daemon Lost,
Dark Whisper ou
Escapist, s'illustre
Equinoxem, jeune quintet à chant féminin originaire de
Buenos Aires, créé en 2008 par Matt Tallón, auteur/compositeur, guitariste et grunter du groupe. Toutefois, il s'en différencie par son originale conjugaison de styles, mêlant allègrement le symphonique gothique au tango et au black ambient. Aussi, ses sources d'influence couvrent un large spectre, allant de
Nightwish, en passant par
Xandria,
Tristania, jusqu'à
Draconian.
Dans ce dessein, Matt a cofondé son projet et sollicité les talents de la mezzo soprano Ashe Alder et du bassiste Nahuel Blade ; membres auxquels s'est adjoint le batteur Franco Canossa pour la réalisation de leur premier et discret EP « Nosce te
Ipsum » sorti en 2009 ; année au cours de laquelle le combo commença à sa produire sur la scène metal locale. Dans la foulée, le batteur Pablo Pompa remplaça Franco et le claviériste Francisco Roldán se substitua à
Marina Fortino.
Aussi, dès 2010, une nouvelle page se tourne et le groupe réalise le single « The Walker », prémisse de « Prophecies of Soul », initial album full length sorti un an plus tard ; plantureuse auto-production où s'enchaînent 13 pistes sur un ruban auditif de 63 généreuses minutes, ayant bénéficié d'un enregistrement de bonne facture, d'un mixage ajusté et d'arrangements soignés signés Roberto Castiglioni. Pour compléter le tableau, on appréciera la finesse du trait de la jaquette d'inspiration fantastique que l'on doit à la frontwoman.
Dans un premier mouvement, le combo a orienté son message musical vers un paysage de notes symphonique pur, avec quelques belles réussites à la clé. Le démarrage des hostilités commence précisément et classiquement par une brève entame instrumentale aux arrangements nightwishiens et un brin orientalisants à l'instar de «
Awakening of Insight ». Jouant également la carte de l'originalité, l'instrumental «
Quinta Essentia » évolue, quant à lui, sur des charbons ardents, et ce, plus de 3 minutes durant, au cours desquelles un serpent synthétique est au corps à corps avec une guitare léonine au fin legato. En outre, des sonorités ''accordéonesques'' empruntées au tango sur fond de corpulente rythmique metal confèrent à cette offrande toute sa singularité et son substrat.
Dans cette veine, à mi-chemin entre
Nightwish et
Xandria (première mouture), l'entraînant « The Walker » distille un riffing effilé sur fond de nappes synthétiques enveloppantes, parallèlement aux cristallines impulsions de la mezzo-soprano. Doté d'un agréable tracé mélodique et d'un refrain propice à l'adhésion, le propos pourra toucher l'amateur de metal symphonique à chant lyrique déjà sensibilisé aux travaux des maîtres inspirateurs de la troupe sud-américaine. On retiendra encore « Winternight », mid tempo progressif aux riffs grésillants qui, non sans rappeler un
Nightwish de la première heure, martèle le tympan par son inaltérable tapping et ses ondulants gimmicks guitaristiques. Dans cette trame à la complexe technicité et à la mélodicité linéaire un tantinet mélancolique s'inscrivent les fines modulations lyriques de la sirène aux faux airs de
Tarja. Raison pour laquelle on n'éludera pas non plus le dynamique « Indigo (While Poetry Is Written) ».
D'autre part, c'est à une ambiance dark gothique que nous convient nos compères, à l'aune de passages empreints de mystère. Autre corde à leur arc réservant leur lot d'émotions et quelques surprises. Ainsi, le tempétueux «
Stonehenge », aux accents power symphonique doublés d'une touche dark gothique, à la manière de
Draconian, distribue ses attaques de riffs acérés au fil des déambulations du duo mixte en voix de contrastes. La fadeur du sillon mélodique est compensée par la puissance d'une rythmique enfiévrée qui jamais ne lâche de lest. Par ailleurs, sur fond d'orgue d'église émerge soudainement des entrailles de la terre une inquiétante bête growleuse sur l'engloutissant mid tempo dark gothique « Nosce Te
Ipsum ». Par contraste, les claires inflexions de la belle viennent en contre-point des attaques de son acolyte sur cette proposition à la touche
Tristania bien marquée. Dommage que l'accélération du tempo se fasse aussi tardive sur une piste en mal de rythme.
Sur le terrain des moments tamisés, le combo surprend par la délicatesse avec laquelle il nous livre ses mots bleus. Bref, un secteur où il s'illustre sans peine, parvenant à nous retenir plus que de raison. Dans cette mouvance, la troublante ballade ambient « Sunrays of
Hope », mise en habits de soie par la maîtresse de cérémonie, n'a tari ni d'arguments mélodiques, ni de charge émotionnelle, pour nous rallier à sa cause. On ne restera pas moins sensibilisé par le low tempo « The Destroyed Pages » pour ses enivrants couplets mis en exergue par les magnétiques patines oratoires de la douce. On aurait cependant souhaité davantage de relief acoustique et moins de linéarité mélodique sur une piste pourtant dotée de sensibles arpèges au piano et d'harmoniques peu courus.
Cependant, d'autres pistes moins inspirées, quelle que soit l'orientation stylistique, se situent dans l'ombre de celles sus-citées. Ainsi, on ira péniblement au terme de « Bleeding
Moon » et «
Equinox », pistes sympho gothique aux riffs écorchés, les séries d'accords dispensées relevant davantage de l'expérimentation pour elle-même que d'une réelle cohérence harmonique. Le tempétueux « Between Light and Truth », pour sa part, livre un convoi instrumental se plaisant à nous secouer mais suivant un cheminement mélodique bourbeux, de surcroît mal négocié tant par la frontwoman que par son comparse. Enfin, low tempo gothique aux relents dark ambient, le souffreteux «
Dusk of Oblivion » nous mène aux confins d'un monde décharné où tout n'est que mornes plaines et champs dévastés. Sur le schéma de la belle et la bête, cette énigmatique offrande aux riffs torturés et à l'ambiance éthérée prend des airs d'un
Draconian à bout de souffle.
Ainsi, c'est à une plantureuse, éclectique mais perfectible offrande à laquelle nous sommes conviés. Certes, la production d'ensemble demeure convaincante et le projet ambitieux et teinté d'une certaine originalité, mais il serait illusoire pour le moment de placer cette formation sur un pied d'égalité avec ses maîtres inspirateurs, ou même à ses homologues générationnels. Il lui faudra donc prendre son temps pour nous octroyer une galette techniquement, artistiquement et surtout mélodiquement plus aboutie. Les lignes de chant, pour leur part, sans s'avérer de mauvais aloi, devront, elles aussi, gagner en justesse et en placement pour nous impacter plus largement. C'est dire que l'on en attend plus, bien plus de ce collectif argentin. A bon entendeur...
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