Les jeunes formations metal gothique argentines, depuis quelques années déjà, se poussent au portillon pour vernir fouler les planches d'une scène metal surinvestie. Après
Abrasantia,
Boudika,
Cinnamun Beloved et autres
Daemon Lost ou Enigmatica, c'est au tout de
Forget My Pain de venir livrer bataille. Créé en 2007 à
Buenos Aires par le batteur Ciro, comptant également dans ses rangs le bassiste/choriste Viruz, le guitariste/claviériste/choriste German et la frontwoman Natty, le combo sud-américain s'inscrit dans cette énergie, prêt à en découdre. Ce faisant, à l'aune des vingt-cinq minutes que compte cette démo de cinq titres, le groupe officie dans un metal gothique, à la touche doom, voire dark, par moments, dans une atmosphère non loin de
Draconian ou
Tristania.
Une fois n'est pas coutume, le groupe ouvre la marche avec un substantiel instrumental. Une entame sous couvert d'un délicat picking à la guitare acoustique nous plonge dans l'atmosphère gothique de l'instrumental « Prelude to the
Darkness », mid tempo progressif doté d'une souplesse rythmique quasi féline et de riffs effilés. Au cœur de cette stimulante trame aux arrangements efficaces, suivant un tracé mélodique invitatoire à l'enivrement de nos sens, un sémillant solo de guitare achèvera de nous convaincre de rester assigné à résidence.
Sinon, le propos se fait offensif, avec toutefois peu de rayonnement mélodique ou de relief acoustique. Ainsi, le revigorant « The
Revenge of the
Darkness » distribue riffs blastés et écornés dans un climat crépusculaire, évoluant sur des chemins de traverse peu sécurisants. Un duo mixte en voix claire se cale dans une mouture où la rythmique, dans la veine de
Draconian, resserre ses griffes. Des growls se superposent à nos deux acolytes, offrant une triangulation oratoire aux effets angoissants. Mais, la sauce ne prend pas réellement, le corps vocal restant mal assuré, proche de la fausse note, alors que les caverneux coups de serpe se placent à des moments qui ne les mettent pas suffisamment en valeur pour être crédibles. Au final, le bateau prendrait l'eau sur un morceau n'offrant que peu de relief de champ acoustique. Par ailleurs, sur une section rythmique entraînante, «
Reflection of My
Dark », titre metal gothique un poil doom, laisse échapper des riffs acérés au fil d'un cheminement harmonique subtil. On appréciera les arpèges au piano disséminés en filigranne ainsi que la douce empreinte vocale de la sirène, même si davantage de relief acoustique eût été plus propice à sa mise en lumière. Dans le sillage de
Draconian, les séries d'accord distillées offrent quelques passages convaincants, au détriment d'une ligne mélodique quasi lunaire, aplatissant les refrains au point de pousser à la désaffection auditive, in fine.
Le combo a également pensé à ralentir la cadence. A ce titre, le tempéré «
Shadow of a
Stranger » est une piste doom gothique échafaudée en mid tempo. Riffs corrosifs et rythmique plombante sont au programme, suivant une ligne mélodique insuffisamment travaillée, taquinant la déroute à chaque virage verglacé. De plus, le duo mixte est sous-mixé et ne convainc que peu tant il se montre hésitant dans ses montées en puissance.
Pas plus heureuse, l'instrumentation s'embourbe dans des plans qui n'auront que peu de chances de susciter l'adhésion. Dans cette mouvance, la pièce ne s'achève pas pour autant sur un bémol. Ainsi, une power ballade nous est octroyée à l'instar de «
Autumn Nights », délicat et frissonnant instant eu égard aux gammes déployées et aux harmoniques investies. De son côté, dans l'ombre de
Tristania, le duo témoigne d'une sensibilité à fleur de peau, sur les couplets comme sur les refrains. Des nappes synthétiques doucereuses et bien amenées contribuent à rendre le moment plus intimiste. Une plage agréable à défaut d'être réellement émouvante.
A l'issue de l'écoute de la menue rondelle, à l'instar des irrégularités qu'elle contient, on comprend qu'il s'agit là d'un coup d'essai pour le jeune collectif. Une production encore taillée dans la roche qui a pour corollaire un lissage sonore peu propice à l'engagement auditif à long terme. Il conviendra pour une écoute ou deux, pour le plaisir de la découverte, à un public orienté metal gothique à chant féminin clair. Mais, il en faudra plus, bien plus pour que le combo nous embarque dans son projet comme il le souhaiterait. On attend donc un sursaut de sa part, à l'image d'un album de longue durée, notamment, où il pourra plus largement s'exprimer. On l'appréciera d'autant plus qu'il se sera laissé le temps nécessaire à la maturité de son œuvre. Wait and see...
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