A des années lumières de s'exprimer avec la chaleur éclaboussante et le feeling du guitar hero, direct et incisif, Potmanteau est certainement le plus extrême des albums de
Cloudkicker. Formant alors un triptyque avec
The Discovery et
The Map Is Not the Territory, il est le plus rapide et bref du cycle, suite logique des évolutions apportées par son prédécesseur.
Sans négliger un certain aspect planant, il propose de se jeter dans une effusion de mouvements aplatis, contemplatifs, mécaniques, désertiques, actifs, expression d'un artiste à la démarche sincèrement hors courant précis.
L'orchestre démarre cette fois sur des percussions naïves et métalliques rappelant l'album Roots de
Sepultura, pour subitement virer en une cascade, une déferlante linéaire relativement technique, presque bourrin, se rendant et se révélant finalement planante...viendront d'autres expérimentations exploitant comme souvent à l'excès et comme un véritable métronome le son des cuivres, des nappes ambiantes tels des flux ondulatoires ou encore des riffs Math et Djent visant à dompter le feu avec une liberté revendiquée sans jamais perdre bien longtemps son jardin de vue.
Gardant l'humilité et la sagesse de l'homme des grandes plaines, du travailleur d'industrie apaisé, Ben Sharp décide de nous emmener aux limites de ses perceptions, accepte pudiquement de dévoiler ce qui l'approche le plus de la folie, d'oser distordre, détourner sa musique pour la rendre plus introspective que ce qu'elle est. Afin de mieux l'exorciser, sans doute.
Véritable enveloppe soumise à un test de résistance, comme l'indique le titre Modulator/Demodulator, toujours légèrement frustrante par ce qu'elle a de retenue mais concevant ainsi un modèle de transcription du réel unique en son genre, elle permet d'atteindre des sommets, ou plutôt des crêtes d'appréciation incomparables.
Ra, le soleil, est un élément important du paysage, mais ni source ni enclume dans un concept s'accaparant d'une violence Pop Art et l'acceptant pour la réexploiter à son propre compte. De nombreux artistes contemporains présentent le rêve américain dans ce qu'il a de plus désirable ou détestable : dans sa splendeur impériale et son insanité.
Cloudkicker se contente d'y rechercher une version simplement enviable et son cheminement pour nous les proposer et nous faire voyager, comme avec un western transposé dans le monde actuel et ne donnant pas dans le surhumain caricatural, ou comme un film Eastwoodien réussi.
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