« Amis et ennemis des bas fonds, dépressifs et suicidaires en tout genre! N'oubliez pas que l'important n'est pas de traverser, mais descendre le long de la route! »
En 2007,
Thy Light avait marqué de son empreinte le monde du DSBM bien torturé et lancinant avec «Â
Suici.De.pression ». Formation brésilienne issue du cervelet malade et asthénique de Paolo Bruno, homme à tout faire imitant allègrement ses compères multi-instrumentistes venus du nord de la vieille europe,
Thy Light avait crée un son lent, torturé, et pourtant porteur d'une mélodie et d'une atmosphère planantes.
Cette fois-ci, il revient en forme, ou au contraire sans aucune présence de forme, poussant de nouveau la chansonnette dans les recoins les plus abyssaux de nos déprimes passagères pour les transformer en véritables poisons qui feraient passer les chansons de Patrick Sébastien pour des incarnations du bonheur le plus sublime et le plus transcendantal.
Un nouvel album, donc, cinq morceaux pour approximativement trois quart d'heures d'écoute à passer dans l'ambiance qui convient. Aussi fermez les volets et éteignez les lumières afin de profiter pleinement de ce nouvel opus.
Un instrumental au piano* reprenant la construction nominative du jeu de mot farouchement Black
Metal du premier album pour en sortir un synonyme - « Suici.De.Spair » -, ouvre l'album. Bien que le nom pousse vers le kitch, on ne frise pas le ridicule, car dès les premières notes, on reconnaît la patte de notre gourou brésilien:
On sent qu'il n'y aura pas d'expérimentations, pas de changement radical de style et qu'il fera comme il a fait jusqu'à présent. D'abord en posant les ambiances, ensuite les guitares, puis finalement en asseyant son autorité dans le genre afin de profiter de la retombée médiatique plus que celle du sang de ses plaies.
La suite ne surprend pas. Mais ce n'est sans doute pas un mal car on retrouve ce qui plaisait dans «Â
Suici.De.pression ». Les répétitions qui torturent laissant place aux envolées lumineuses mais tellement mélancoliques, font que l'on finit par comprendre que la nécessité de continuer sur la lancée et non d'innover pouvait bien être un choix méticuleusement réfléchi. Les nappes de clavier ouvrent la porte à des atmosphères grandioses, poussant l'auditeur à s'interroger sur son voyage vers les tréfonds, car à côté de ça, chaque soli ou interlude de guitare (exécutés à la perfection) laissent entrevoir des percées de lumière qui pourraient, à trop en abuser, redonner de l'espoir.
Le projet ne stagne pas pour autant. Quelques petites nouveautés font leur apparition, comme sur l'interlude Corredor Seco, où les influences latino-hispaniques se mélangent à la perfection aux arpèges quant à eux trop bien étiquetés
Doom/DSBM, laissant entrer un vent de fraîcheur sur le schéma renouvelé dans ce dernier Full-Length.
Mais la surprise véritable, c'est l'apparition et l'utilisation de chants clairs. Ce qui m'a quand même étonné, d'abord négativement à la première écoute, puis de manière plus neutre sur les suivantes.
Celui de Paolo Bruno ne choque absolument pas sur le final de Wanderer of
Solitude et se fond sans difficulté dans la mélodie, mais peut-être aussi parce qu'il ne fait qu'accompagner la guitare.
Là où les choses se compliquent c'est sur
No Morrow Shall Dawn, car c'est Tim Yatras - que j'ai plus qu'adoré dans ses projets australiens comme
Woods Of Desolation,
Grey Waters ou
Austere - qui prend la place du conteur et qui si j'ose le dire, massacre un peu un passage où il chante en clair, alors que tout poussait à croire que l'effet serait grandiose.
Non pas que ce soit faux, mais le trop plein de reverb et la ligne mélodique choisie dénotent complètement avec le reste, crachant sans vergogne sur l'originalité qui aurait pu en découler et par la même occasion sur l'envie d'écouter davantage de poussées vocales de ce style. Bien heureusement, sur le reste de l'album, le chant reste hurlé est somptueux, comme celui auquel nous avait habitué Paolo sur
Suici.De.pression.
* Le petit astérisque était placé volontairement après le mot piano, car il va sans dire qu'au niveau de la production, hormis un travail plus complet sur le mixage, sur le mastering ainsi que sur le choix des samples – qui cette fois-ci lorsqu'ils imitent un élément naturel tel que le vent, l'orage ou la mer ressemblent vraiment au vent, à l'orage et à la mer, et non pas à un son MIDI de Game Boy copiant ces mêmes sons – il reste encore un choix que je n'arrive pas à assimiler: après plus de six ans d'absence, et une notoriété qui ne s'en est vue que grandie dans le monde du DSBM et du Black
Metal en général, Paolo Bruno a fait le choix de réutiliser des instruments virtuels.
Ainsi, le piano bien que beau et propre, sonne creux et vide. Synthétique, si j'ose dire.
Il en va de même pour la batterie qui est bien évidemment une boîte à rythme à laquelle il n'a même pas cherché à nuancer ni modifier la vélocité des frappes. C'est certes très propre et carré, mais cela manque de présence, et malgré la froideur du genre qui sert à nous glacer le sang, la froideur de la production et la réutilisation d'instruments virtuels ne nous évoquent rien de plus que le choix de la simplicité.
Le nouvel album de
Thy Light, intitulé
No Morrow Shall Dawn, est un bon album.
Perfectible en bien des points et n'ayant pas le même impact qu'a eu son prédécesseur à l'époque, ce disque reste au delà de la moyenne et se classe même dans les « bonnes » sorties de l'année 2013 de par son côté très attendu issu d'un groupe aujourd'hui culte.
Merci!
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