Certains opus font beaucoup parler d’eux plus particulièrement pour ce qu’ils représentent que ce pour qu’ils sont.
En replaçant "
For Aeons Past" dans son contexte, il est évident que sa popularité tient autant d’une absence que d’une réelle exemplarité de l’album.
Scar Symmetry venait de splitter et de livrer un "
Dark Matters Dimensions" intéressant mais souffrant énormément de la comparaison avec le cultissime "Holographic
Universe" qui restait très frais dans l’esprit des fans. Relativement opportuniste et offrant ce que les admirateurs avaient envie d’entendre, le premier Solution .45 fut avant tout le moyen de dire que Christian Alvestam pouvait écrire une musique similaire sans se focaliser uniquement sur
Miseration.
Cinq ans plus tard, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts.
Scar Symmetry, sous l’impulsion de Per Nilsson, a relancé sa carrière avec un excellent dernier opus et le death mélodique passionne de moins en moins, faute de réelles relèves et de grands groupes vivant dans le passé ou le déni de ce qu’ils étaient.
Dans cet environnement, et sans une couverture médiatique énorme, "
Nightmares in the Waking State - pt I" débarque sans forcément beaucoup d’attentes autour de lui. Ce sera peut-être sa plus grande force.
Toujours centré autour de Christian, d’une paire de guitariste affutée et d’un Rolf Pilve (celui de
Stratovarius) plus libéré que chez l’ogre finlandais, Solution .45 se reconnait facilement à l’écoute de l’album (le chanteur n’y étant pas pour rien) mais a surtout mis un point d’honneur a enfin démontrer une réelle personnalité et ne pas réaliser une simple copie de ce qu’aiment les fans. C'est du moins le but affiché par le groupe.
Entendez par là que la musique des suédois se fait plus progressive, plus mélodique et que les claviers y prennent plus de place que jamais, allant même jusqu’à s’engouffrer dans une légère emphase symphonique de temps à autre.
Si "Wanderer from the Fold" reste dans une ambiance reconnaissable facilement, entre des riffs syncopés, la voix inimitable de Alvestam, les soli très mélodiques et l’ambiance cybernétique des claviers (comme pour nous mettre en confiance), les choses changent rapidement ensuite. "
Perfecting the Void" place des passages de chant clair d’une pureté d’une intensité rare, toujours couplé au chant bestial et animal du grand chauve qui démontre toujours à quel point son ambivalence est impressionnante.
Chaque morceau semble aller plus loin dans ce schéma progressif et mélodique pour s’épurer de plus. "Winning Where Losing in All" se montre déjà très mélodique dans les lignes vocales principales et certains lead mélodiques que certains trouveront probablement trop mélo, tout en sachant qu’ils ne possèdent pas le caractère spatial de Per Nilsson qui offre aux interventions mélodiques une aura très particulière. "In Moment of Dispair" va plus loin encore puisqu’il est intégralement chanté en clair, entre mélodies acoustiques et lignes de claviers très planantes, pour en faire presque une ballade moderne (très belle au demeurant et pleine d’une sensibilité de chaque instant).
Le problème dans l’ensemble, malgré un travail fort bien réalisé, une production impressionnante et des instrumentistes parfaitement rodés, c’est le manque de folie qui ressort d’un album ronronnant mais ne mordant jamais, ne passant pas le cap supérieur. Certains titres, tel que "Alter (The Unbearable Weight of
Nothing)" combinent moult aspect entre l’introduction acoustique, les couplets brutaux (ce chanteur reste dingue), les riffs syncopées puis plus mélodiques et les lignes de claviers mais nous avons toujours cette sensation de cahier des charges, de fait accomplis car ils ont voulu en arriver là, sans forcément laisser la musique s’exprimer.
A l’inverse, Solution .45 propose avec "I,
Nemesis", un dernier morceau de onze minutes qui, s’il ne ressemble pas aux autres titres, semble s’être complètement perdu en chemin. Sans cohérence, n’allant nulle part et paraissant affreusement long du haut de ses minutes, il ne termine malheureusement pas l’album sur la meilleure des notes. Très lent dans sa construction, aux riffs comme constamment bloqués dans leur élan ou volontairement ralenti (offrant des faux-airs de
Meshuggah psychédélique) mais ratant le coche émotionnellement, ce dernier titre sème le doute une fois l’album terminé.
Certes, les choses sont très bien faites et il est certain que les adorateurs, plutôt nombreux, du vocaliste suédois risquent de fortement apprécier le disque. "
Nightmares in the Waking State – pt I" a des arguments à revendre et des compositions qui feront très probablement mouche en concert mais, face à de tels musiciens, on peut simplement regretter qu’ils n’aient pas été plus loin, qu’ils n’aient pas cherché à créer quelque chose de plus ambitieux et novateur que, encore une fois, ce que les fans attendent, même si on ressent une nette différence avec "
For Aeons Past". Si l’ensemble est moins proche de
Scar Symmetry, les comparaisons seront inévitables et, tant qu’à faire, entre ce nouveau disque et "The Singularity (Phase 1 – Neohumanity)", je pencherais très largement pour l’ambitieux concept technoïde sorti l’année dernière. A vous de voir.
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