C'est avec la rage au ventre que cette novice formation de metal alternatif espagnole vient prendre ses quartiers sur la scène metal internationale. Ainsi, le jeune quintet nous invite à partager sa première auto-production à l'instar de cet EP de quatre titres d'égale longueur, offrant près d'un quart d'heure d'une musique à la rythmique incandescente oscillant entre metal et rock. Dans un contexte de forte croissance en groupes de metal à chant féminin de tous bords, quelles seraient ses atouts pour ne pas nous égarer au beau milieu de cet espace auditif particulier ?
Les maîtres d'oeuvre de cette menue galette s'avancent vers nous. Dans l'ordre, voici : la charismatique et puissante chanteuse Eve Nezer, l'adroit guitariste Jordi
Domínguez, le guitariste et screamer Aitor Torres, le bassiste vrombissant Jose Escobar et le batteur à la frappe sèche Álvaro García. A cette équipe s'est rajouté le guitariste Gerard Rigau (
Blaze Out) sur «
Never Coming
Home ». Concernant les aspects techniques et artistiques de la production, le combo s'est octroyé les services de diverses compétences, quelque soit le domaine d'intervention, Ainsi, le disque a été produit, mixé, enregistré et mastérisé précisément par Gerard Rigau ainsi que par Carles Comas. Ce qui n'a pas été sans effets sur la qualité sonore d'ensemble de la rondelle. Quant à l'artwork de la pochette, à l'image sombre et inquiétante d'un contexte de guerre, il est l'oeuvre de Jun Matsuura. Le design est le fait du guitariste Jordi Dominguez et d'Eve Giménez.
L'aspiration du groupe à l'explosivité de ses notes a pour corollaire une cinglante instrumentation, dans chaque espace sonore où il se meut. Lorsque la ligne mélodique est maintenue sereine, la sauce prend plus largement. Ce qui est le cas de l'entame «
Bitch », à la rythmique véloce et aux riffs épais, sur lesquels évolue une sirène à l'organe aussi musclé que chatoyant, non sans rappeler
Ela, qu'elle distille sur des refrains mélodieux. Elle se fait rattraper par des screams en faction qui restent en arrière-fond de l'espace oral. Du coup, ils n'affectent pas le chemin mélodique, plutôt convaincant d'ailleurs. Dans cette veine s'inscrit «
Never Coming
Home », à la rythmique au tempo rapide étreinte de riffs échevelés, à la façon de
Satyrian. Les couplets se suivent sans encombres grâce notamment au chant puissant, éraillé et aux modulations maîtrisées de la frétillante interprète, assistée d'une voix masculine. Aussi, les refrains s'avèrent mélodieux et nous aspirent sans soucis, non sans rappeler
Bif Naked. Soudain, un silence survient avant une bondissante reprise avec un solo de guitare signé Gerard Rigau et une dynamique instrumentation. La piste s'achève toutefois par une chute qu'on aurait aimée moins brutale.
Quand les colères de l'orchestration finissent par noyer les mélodies, les confusions atmosphériques peuvent émerger et nous faire décrocher du fil du propos musical. Ainsi, « Take it
Down », titre à la puissante rythmique et aux riffs sémillants, suit un chemin harmonique plus flou, baveux par moments, car desservi par des growls trop présents pour que l'impact soit plus immédiat. On aurait même tendance à s'y perdre au sein de cette profusion d'impulsions vociférantes. De même, «
Grievance » peine à convaincre. Ici, screams impitoyables et riffs crochus s'imposent dans cet espace auditif sacrifié à une rythmique plombante, au sein de laquelle la belle émerge, notamment sur les refrains. Les couplets sont mus par des écorchures vocales communes tout le long, sans réel positionnement sur quelque accord que ce soit. Seuls les refrains tirent leur épingle du jeu, et encore... Difficile dans ces conditions de retenir cette plage comme une indispensable proposition à nos tympans. Passons plutôt notre chemin.
Le pari était osé et le jeune combo espagnol n'a démérité ni en volonté d'en découdre, ni en vivacité, mais il manque bien des accords et des arpèges pour nous rallier à leur cause. Fraîcheur et authenticité sont au programme certes, mais l'ensemble manque cruellement d'emphase sur le plan harmonique et finalement, les soli ne s'offrent que peu à notre écoute. De plus, l'identité stylistique ne se dessine pas encore clairement. Aussi, peu de mesures le différencient des groupes sus-cités. Par ailleurs, on reste rivé sur un tempo quasi similaire de bout en bout. C'est dire qu'aucune alternative ne nous est proposée. Donc, pas de ballades, ni de duos, ni d'instrumentaux, ni de variations rythmiques, pour cette fois. Malgré une production plutôt soignée, l'adhésion ne s'opère que partiellement et ponctuellement, selon les pistes.
Pour le plaisir de la découverte, on pourra aller jeter une oreille, notamment pour les amateurs de metal alternatif à tendance rock. Pour un quart d'heure d'une diluvienne ambiance au son de riffs en fusion, pourquoi pas. Pour l'acquisition de l'EP, par contre, la réflexion sera à privilégier à la passion du moment.
Pour un premier jet, l'exercice est encore balbutiant, on l'aura compris. Mais on perçoit tout de même un potentiel sous-jacent chez ce groupe, à exploiter et à développer encore pour nous inciter à y revenir. A eux de trouver le chemin d'une inspiration créatrice renouvelée pour pouvoir se placer, comme il se doit, sous les feux des projecteurs. On ne peut que le leur souhaiter...
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