Poppy est une artiste énigmatique, aussi bien sur l’image qu’elle dégage que sur ses expérimentations musicales. Chacun de ses opus lui a permis de dévoiler une de ses nombreuses identités, toutes intrigantes et dérangeantes. On retrouve tout d’abord la chanteuse au début de sa carrière dans un environnement vide où le silence était prédominant. 3:36 (Music To
Sleep To) et Poppy laissaient entrevoir une femme à l’expression monotone, souvent enfermée dans des boîtes transparentes. Ces deux premiers albums représentaient une critique de la culture pop, de la symbolisation de groupes ou musiciens insensibles et redondants.
Sur sa troisième parution Am I A
Girl ?, la jeune Américaine soulevait des questions d’identités de genre. Dans une période juridiquement compliquée, elle avouera ne s’identifier à aucun genre en particulier, qu’elle se sent parfois gars, parfois fille et que ses sentiments, ses ressentis sont en totale corrélation avec son projet musicale, versatile et imprévisible.
Son quatrième disque
I Disagree est sans conteste le tournant de sa carrière musicale. Au-delà des premières reconnaissances, des immenses tournées qui s’en sont suivies et d’une acclamation des critiques, l’œuvre est considérée par son autrice comme « fidèle à sa personnalité ». Cette entreprise marque aussi un changement radical de style avec une patte
Metal omniprésente.
Depuis, la compositrice a publié deux autres galettes,
Flux et Zig, qui ne sont qu’une confirmation de cet aspect caméléon qui lui tient tant à cœur. Le premier s’installe dans des sonorités davantage rock et shoegaze, là où le second revient dans des structures pop alternatives et électroniques. Cependant, Poppy a préservé un caractère brut et révoltée qui lui colle parfaitement à la peau.
C’est dans cette lancée que nous retrouvons l’Américaine dans sa septième pièce intitulée
Negative Space. Produit par Jordan
Fish (
Bring Me The Horizon, Spiritbox,
Architects), cette œuvre renoue avec le véritable tempérament de l’artiste, une figure sauvage, indisciplinée et un grand retour vers des résonances métalliques. Les récentes collaborations avec
Bad Omens sur le titre V.A.N ou avec
Knocked Loose sur
Suffocate, à l’occasion de laquelle elle a été invitée sur le prestigieux plateau de l’animateur de télévision Jimmy Kimmel, ont été sources d’inspirations sur certaines compositions.
Cette mouvance
Metalcore/hardcore est pleinement perceptible sur the center’s falling out : après un bref passage drum’n’bass, le climat austère se développe par une rythmique hâtive, un accent particulier sur les percussions et un riffing sévère. La prestation vocale n’est pas en reste avec un screaming grinçant, intimidant et le breakdown n’est qu’une confirmation de cette inquiétude avec son tempo languissant et ces riffs alarmants. Les accords ne sont non sans rappeler l’association entre
Motionless In White et …
Knocked Loose sur le morceau
Slaughterhouse.
Ce souffle rustique est souvent en accompagnement avec plus ou moins de brio d’une esthétique pop comme sur
They’re All Around Us. Si les couplets à l’approche industriel et au riffing élémentaire témoignent de cette brutalité, les refrains sont davantage dans la légèreté et l’émotionnel. Le vocal suit cette même tendance entre screaming et chant clair, dans un divertissement clair-obscur qui, malgré sa simplicité, tape dans le mille. Son prédécesseur nothing livre d’ailleurs cette même formule avec cette même réussite. Dans leur ensemble, les titres sont spontanés, sommaires dans leur écriture, en témoigne leurs durées et leurs riffs primitifs. Pourtant, malgré ce côté rudimentaire et les quelques similitudes, l’écoute est fluide et on se surprend même d’éprouver un goût de reviens-y.
Car ce qui fait le charme et la force de ce disque, à l’instar d’
I Disagree, c’est cette capacité de la part de Poppy de multiplier les genres et maintenir une cohésion tout au long de l’album. Entre l’hyperpop accrocheur de crystallized, le pop punk du morceau éponyme aux airs d’Avril Lavigne ou le shoegaze Deftonien de surviving in defiance, la musicienne entretient un intérêt constant. Mais là où l’artiste américaine impressionne, c’est sur sa palette vocale qui s’est bien étoffée avec le temps. Le screaming est plus profond et est surtout capable d’être prolongé dans la durée, là où l’on sentait notre chanteuse en souffrance sur ses premières esquisses. Cette dernière s’essaye même à un scream plus grave, presque guturral sur l’outro de the cost of giving up, un registre où on espère la revoir.
Avec
Negative Space, Poppy réaffirme sa place singulière dans l'univers de la musique contemporaine. En naviguant avec audace entre brutalité métallique et douceur pop, l'artiste livre un album à la fois cohérent et surprenant, où chaque morceau dévoile une facette de sa créativité foisonnante. Ce disque, reflet d'une maturité artistique pleinement assumée, illustre une artiste au sommet de son art, capable d'explorer les contrastes les plus saisissants sans jamais perdre de vue son identité. Ce septième opus n'est pas seulement une nouvelle étape dans sa carrière : c'est une déclaration de liberté musicale, une preuve éclatante que l’Américaine continue de redéfinir les frontières de la pop et du
Metal, pour le plus grand plaisir des oreilles curieuses.
Je voulais le chroniquer tiens.
Un de mes albums de cette fin d'année. Poppy est vraiment cinglé et que ce soit la prod, les compos et la diversité du propos, elle coche toutes les cases avec son album le plus brital de sa carrière. Dans mon top 10 à n'en pas douter ;)
C'est bien meilleur que le précédent, c'est clair.
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