I Disagree

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15/20
Nom du groupe Poppy
Nom de l'album I Disagree
Type Album
Date de parution 10 Janvier 2020
Style MusicalMetal Expérimental
Membres possèdant cet album11

Tracklist

1.
 Concrete
 
2.
 I Disagree
 
3.
 BLOODMONEY
 
4.
 Anything Like Me
 
5.
 Fill the Crown
 
6.
 Nothing I Need
 
7.
 Sit / Stay
 
8.
 Bite Your Teeth
 
9.
 Sick of the Sun
 
10.
 Don't Go Outside
 

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Poppy


Chronique @ Eternalis

19 Janvier 2020

"I Disagree" empile ainsi les contradictions [...] autant putassier qu’artificielle, dérangeante que dérangée ...

Certaines découvertes doivent beaucoup au hasard. Un artwork, une phrase de chronique sur les réseaux sociaux écrite plus grosse que les autres, plus intrigante également. Une flopée d’individus déversant un flot d’insanités sur l’artiste. Que ce soit musicalement, visuellement ou simplement pour ce qu’il représente. Se dire que lorsqu’il s’agit de découvrir un artiste que l’on aime détester, on est souvent l’avocat du diable. Et me voilà sur le point d’écrire cet article sur le troisième opus de Poppy. Rétrospective pour ceux qui ne la connaissent pas.

Comme son nom l’indique, Poppy est une de ces chanteuses initialement préfabriquées, venant de la télé, se mettant en scène comme seuls les Osbourne savait le faire à une époque, avant que chacun soit en mesure de filmer sa vie, qu’elle soit intéressante ou pas. On parle ici de pop sucrée à outrance, d’une jeune femme prenant la forme d’une poupée pour chanter dans des champs de fleurs ou avec de jolies robes pour faire rêver les adolescentes en mal de sensation. Enfin c’était ça...puis, sans trop comprendre, les choses changent. Le producteur se barre (ou est viré, allez savoir), l’ingénue énonce ses désirs et surtout, prend le contrôle.
Si beaucoup se demandent déjà légitimement pourquoi ils liraient « ça » sur ce site, une seule donnée pourrait leur mettre la puce à l’oreille. Sumerian Records. Oui, le label de Animals as Leaders, de Between the Buried and Me, à une époque de The Dillinger Escape Plan ou encore de Jonathan Davis en solo, pour ne citer qu’eux. Un tel label ne s’intéresse pas à quelqu’un si le jeu n’en vaut pas la chandelle.

L’ep "Choke" annonçait déjà la couleur. La pop colorait se parait de sonorités électroniques massives et industrielles, totalement saturées. Mais l’ancienne Poppy était toujours là, apparaissant parfois aux détours de boucles électroniques. Il y avait aussi "Scary Mask", que l’on pouvait facilement rapprocher du Babymetal de "Metal Resistance", avec ses riffs metalcore, ses breaks de batteries et ses hurlements core accompagnant la chanteuse. L’imagerie n’était plus la même, mettant en scène des musiciens sans visage, anonymes et prenant la forme d’objets.
C’est dans la lignée de ces deux morceaux que "I Disagree" prend forme. Une appellation par la négation. Par le refus. Par le combat. Concrètement, beaucoup crieront un opportunisme déplacé, une musicalité représentant un vide abyssal ou surtout des lignes de chants tellement retouchées qu’on ne sait même plus qui de la machine ou de la femme chante. Quelqu’un que l’on adore détester en somme. Comme tant de groupes que l’on rapproche au metal mais qui n’en sont pas totalement. Comme Babymetal. Comme Myrkur. Comme My Own Private Alaska. Autant d’exemples radicalement différents musicalement mais qui témoigne d’artistes que l’on aime ou déteste, qui ne sont pas forcément du metal mais dont le public le plus à même de l’apprécier en fait partie...que l’on taxe d’opportunistes alors qu’il serait tellement plus simple pour eux de faire autre chose. Avant "I Disagree", Poppy avait déjà gagné des récompenses, sorti deux albums et participé à une série TV...autant dire que sortir ce disque est plus un casse-gueule qui risque de la faire éclater que l’inverse. Et pourtant ...

"Concrete" s’ouvre sur une sirène, une narration parlée et un riff etouffant accompagné d’un petit tapping bien malsain...avant que Poppy ne fasse se que l’on connait d’elle. Une voix niaise. Une voix d’enfant. Une licorne qui danse sur un arc-en-ciel...on se dit que ça ne va pas le faire. A quoi bon continuer ? Parce que quelques secondes plus tard, ce riff si lourd revient nous agresser avec quelques hurlements masculins en accompagnement et de nouveau Poppy qui parle, tel un robot. Mais qu’est-ce que c’est que ce bordel proprement incohérent ? Une certaine idée de la schizophrénie peut-être ... et ce n’est pas cette fin façon « hair metal 80’ » avec son solo de guitare et ses chœurs qui font « Poppy, Poppy Poppy » qui nous fait sortir de cette bulle d’incompréhension persistante. Ça ne semble vouloir absolument rien dire. Allez, rideau, se dit-on...mais l’éponyme déboule déjà. On retrouve la même ambiance que sur "Choke". Un gros riff épais, beaucoup de samples, des vocaux presque entièrement narratifs et robotiques et l’ombre de Babymetal renait. L’ensemble se veut plus cohérent. Plus efficace...et surtout beaucoup plus malsain. Le break complètement halluciné, les larsens hurlants et cet aspect proprement déshumanisé nous écartèle entre malaise et ... envie de dire que ce « truc » est juste un trip des mauvais jours. Mais le clip, assez hardcore, montrant la jeune femme brulant ce qui s’apparente à des hommes d’affaires (la société ? les gouvernants ? les décisionnaires ?) démontre que tout ça n’est pas qu’un trip mais bien une volonté artistique d’aller plus loin dans une espèce de noirceur humaine.

La jeune femme le dit. Désormais interviewée par des medias metal (Sumerian, forcément) et présentée dans la presse spécialisée, elle n’a pas vocation de faire du metal. Et ne l’a même jamais revendiquée. Simplement que les différentes influences passent autant par là que l’indus ou l’electro. Un indus parfois suffocant sur "Anything Like Me", aliénant et hypnotique qui pourrait nous ramener aux premières heures de Marilyn Manson ou de Trent Reznor. Il n’y a pas grand-chose d’humain dans ce titre, écrasant et malfaisant, avec des tonnes d’effets et de sons mécaniques superposés les uns sur les autres pour confiner à l’isolement et à la paranoïa. Encore une fois, les premières écoutes nous laisse songeur...écoutons-nous de la bonne pop électronique matinée de mauvais metal prévisible ? Du metal avec de la pop ? Et puis, au bout d’un moment, un constat se fait. On a envie d’y revenir. De réécouter. Parce que l’album et la musique est hypnotique. Et que plutôt que se chercher des excuses, on en vient à admettre que les compositions ont quelque chose d’indéfinissable qui fait qu’on replonge dedans, de plus en plus profondément. Comme ce "BLOODMONEY" complètement outrancier aux percussions industrielles ultra épaisses sans aucune respiration et impossible à passer en radio.

Notre esprit conservateur rend l’écoute encore plus schizophrène. Avant de lâcher définitivement prise. Pour un technoïde "Sit / Stay" efficace au possible, on se dit que la jeune femme a des idées. Pour passer d’un riff rock indus à un passage pop électronique à la Muse dans une totale cohérence, avec un refrain cette fois fédérateur mais pas spécifiquement accessible et laissant entrevoir un brin de voix beaucoup plus intéressant que ce que nous étions prêt à admettre avant. On se prend à penser à Lycosia qui avait, à une époque, fait le pari de marier de la pop, du rock, de l’indus et de la musique gothique. Il y a, dans cette veine, "Fill the Crown" d’où émane une mélancolie enfantine, comme une enfance perdue, une chute en avant de l’innocence qui ne devient rien d’autre qu’une existence robotique et aliénante, le chant de Poppy se faisant, une fois encore, accompagné d’une voix musculine grave et menaçante, bien que plus chantée que précédemment. "Bite your Teeth", au contraire, dévoile une radicalité nouvelle et une facette cette fois-ci totalement metal, s’ouvrant sur un gros riff et un pattern de caisse claire surpuissant. Un passage aérien, semblant hallucinatoire, sert de tremplin à la fin du titre saturée et très néo, entre riffs de gratte-sous accordés et hurlements d’aliénés psychiatriques sans visage. Il n’y a finalement que "Sick of the Sun" qui fasse tâche, comme un lien avec l’ancienne Poppy, empilant ce que l’on imaginait écouter avant de plonger dans "I Disagree".
Car "Don’t Go Outside" surprend pour finir l’album, par sa mélodie acoustique et épurée, très simple et décharnée. Quelques effets de styles, pour vieillir le son et lui donner une impression d’infini et de lointain accompagne cette voix de femme enfant qui ne sait pas réellement qui elle est. Une boucle électronique accompagne la mélodie et vient « salir » le spectre sonore avant qu’un riff de guitare électronique et des claviers n’apportent une certaine intensité quasiment progressive.

On ressort de l’écoute songeur puis, au fil du temps, de plus en plus intéressé. Comme une fuite en avant, "I Disagree" est une négation d’un peu près tout. D’une jeune gamine qui pourrait plaire aux ados mais qui va probablement sourire de leurs incompréhensions. D’une scène professionnelle qui ne saura peut-être pas la prendre au sérieux. De metalleux ou de fan d’electro qui aimeront la détester. Une négation de la musique organique tant les compositions sont volontairement artificielles, asphyxiantes et synthétiques. Une volonté de simplement provoquer le débat, à commencer par un artwork qui fait avant tout parler, ni laid ni beau, mais suffisamment dérangeant pour le grand public pour ne pas passer à la télévision tout en paraissant bien trop too much dans une scène réellement dark.
"I Disagree" empile ainsi les contradictions. Mais finalement, est-ce que l’on ne s’en fout pas totalement ? Poppy est à l’image du monde, autant putassier qu’artificielle, dérangeante que dérangée, à même de gêner non pas pour sa musique mais pour ce qu’elle est et représente. On ne serait pas surpris de voir finir l’américaine au Hellfest sous la Valley le dimanche soir. Il y en aura toujours pour dire que le mythe n’en finirait plus d’être détruit mais est-ce que Poppy, Carpenter Brut ou Atari Teenage Riot ce n’est pas un peu le même combat ? Chacun en jugera ...

4 Commentaires

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AlonewithL - 19 Janvier 2020:

Manson et Lady Gaga ont fait un enfant sur le tournage de Kill Bill......et l'ont abandonné. Triste!

Groaw - 19 Janvier 2020:

Mince, tu m'es passé devant :(. Même si j'avais déjà écouté l'album, j'attendais la promo pour la chronique.

Pas grand chose à redire, mon avis est assez similaire. On aime ou on n'aime pas mais on ne ressort pas indifférent. Perso, j'adhère. Attention néanmoins aux quelques fautes, comme "Animals As LeaderS" ou "sorti deux albums".

JeanEdernDesecrator - 20 Janvier 2020:

Merci pour la chronique, le coté barré / schizophréne est assez frappant et extrême, va falloir écouter ça  !

hexate - 03 Décembre 2020:

Impossible de ne pas réagir aux paroles prophétiques de cette excellente chronique, apparement notre jeune artiste serait compromise dans la tounée américaine de Deftones avec Gojira.. Peut on imaginer que la scène du Hellfest se raproche à petits pas?

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