Un "beumeux" peut très bien écouter ce que l'on apelle du
Deathcore. Ce style, d'habitude franchement énervant par ses gimmicks et ses systématiques copier/coller d'un groupe à l'autre, peut parfois réserver quelques bonnes surprises, tapies aux milieu de groupes aux noms souvent plus débiles les uns que les autres. En parlant de noms idiots, justement, en voilà un joli : la guerre de la bouche d'une prostituée. Non seulement ça ne veut rien dire (c'est toujours plus drôle qu'Apporte Moi l'
Horizon), mais en plus, ça peut laisser présager le pire.
Mais non, bien au contraire. WFAHM est un groupe que j'apprécie énormément : mélanger rythmiques Jazz et sonorités très typées Grind en un seul disque relève pour moi d'un sacré culot plus que d'un désir frénétique de proposer à tout prix quelque chose de novateur (au risque d'accoucher d'un produit batard et ennuyeux - les exemple sont très nombreux). Ayant beaucoup aimé "
In Shoals", que j'ai d'ailleurs chroniqué, c'est tout naturellement que j'ai décidé de me procurer leur dernier bébé, "MMX", promis comme plus violent, mais non moins complexe que leur précèdent opus.
Une pochette très belle, comme à leur habitude, met l'auditeur dans un climat propice à la dégustation de leur nouveau monolithe. A l'image de cet homme apeuré, nous sommes plongé dans "MMX" comme un agoraphobe dans la foule.
Il transpire de ce disque une frénésie, une énergie assez incroyables, et surtout, une imagination sans bornes. WFAHM prend un malin plaisir à brouiller les pistes, ce qui fait qu'on ne peut leur coller absolument aucune étiquette précise sinon "
Metal". Le métalleux, qu'il soit fan de Machin-core, de Black ou de musique expérimentale, trouvera de quoi se nourrir sur "MMX", tant le groupe passe par des styles différents. Chose très agréable pour les fans, les coupures sont bien mieux gérées que sur "
In Shoals", ou les compositions passaient bien trop brutalement du Grind au Jazz.
Ne pensez cependant pas qu'à cause de cette recherche dans les compositions, WFAHM s'est adouci. L'envie de botter des culs sceptiques est toujours aussi grande. Prenons par exemple un titre comme "To Age and Obsolete", mélangeant passages presque Screamo, breakdowns typiques du
Deathcore et un rythme ultra Jazzy : cette pièce est à elle toute seule un manifeste de violence et de recherche.
Pas complexe à la manière d'un
Antigama ou d'un
Meshuggah, certes, mais l'auditeur devra franchement s'accrocher pour comprendre quelque chose à ce maelström terrifiant.
Mention spéciale, comme sur "
In Shoals", au batteur, capable de jouer tant bien rapidement que de manière très technique. Les autres ne sont pas en reste non plus, et certains titres font même carrément penser à du
Psyopus et son "Migraine
Metal", comme j'aime à le nommer (je pense à "The Increased Sensation of Dullness" notamment).
"
Sleep is the Brother of
Dead" (dédicace masquée à BMTH ?) sonne comme du
Meshuggah. Je dis bien "comme". WFAHM s'approprie la polyrythmie sans laquelle le groupe suédois ne serait qu'un énième groupe de métal, et la transforme, la modèle pour en faire un titre très dissonant et angoissant. Une des pièces les plus intéressantes du disque, de très loin. Aussi courte qu'excellente, l'écouter en regardant la pochette est une expérience à vivre (riez, riez). Titre qui trouve un écho dans la deuxième pièce maîtresse de l'album, "
Cancer Man", mélange improbable entre
Meshuggah et
Veil of Maya (même si le sample final est totalement inutile).
Et que dire de "Recluse MMX", terrifiant par sa violence dissonante et ses breakdowns massifs ? Le hurleur y beugle avec conviction, apportant la touche finale à ce titre franchement monstrueux, qui se découd totalement au fur et à mesure : les rythmiques se font plus hachées, plus instables, bref, à l'image d'un caméléon que l'on aurait placé en face d'une oeuvre de Picasso : ne sachant plus en quoi se muer.
"MMX" est un bon disque. Malheureusement un peu trop difficile à s'enfiler dans son intégralité. N'essayer pas, comme j'ai pu le faire, de l'écouter le matin, au saut du lit, en buvant votre café. Ou vous retournerez vous coucher fissa. Il convient d'apprécier ce disque la tête vide, presque apathique, en déconnectant toutes les neurones superflues pour ne garder que celles permettant de décortiquer les morceaux tous plus biscornus les uns que les autres de ce "MMX". Pour tout vous dire, j'en suis à une dizaine d'écoute, et je n'arrive pas à venir à bout de ce disque.
Il y a également deux points négatifs qui mériteraient une mise en relief : "MMX" est bien moins varié qu'"
In Shoals". WFAHM aura probablement voulu mettre les expérimentations sonores un peu de côté pour se concentrer sur les meilleurs moyens de faire perdre pied à l'auditeur, à savoir des rythmiques complexes. Et, entendons nous bien, Complexité et Variété ne font pas toujours la paire. Enfin, dernier point négatif, la production est également assez déçevante, comparée à celle d'"
In Shoals". Le son de grosse caisse assourdissant n'est plus, et c'est bien dommage.
Ces points négatifs se font parfois cruellement ressentir, mais ne crachons pas dans la soupe, WFAHM nous a pondu un excellent disque, qui, comme j'ai coutume de dire, "ne fait pas rire".
Plus noir qu'un
Psyopus, parfois aussi difficile à suivre qu'un
Meshuggah, l'amateur de musique décousue (que je suis) peut se ruer sur l'objet les yeux fermés. Espèrons cependant que le groupe ose un peu plus partir dans de gros délires sur un hypothétique futur album.
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