Lundi 4 juin 1990. Jour de printemps à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire du death metal puisqu’il coïncide avec la sortie sur le label Earache Records du « Left
Hand Path » du suédois
Entombed ; premier album du mythique combo de Stockholm fondé trois ans plus tôt sur les cendres encore fumantes et asphyxiantes des légendaires
Morbid et
Nihilist. Glacial, surpuissant et surtout définitivement surréaliste notamment grâce à l’utilisation pionnière du fameux son de guitar « buzzsaw » par la paire inspirée Uffe Cederlund/Alex Hellid ; le death metal du gang scandinave fronté par le génial Lars-Göran Petrov peut prétendre atteindre le paroxysme de l’efficacité sur ce disque illustré qui plus est par une splendide cover signée Dan Seagrave. Véritable chef d’œuvre immuable du metal de la mort made in Sweden, « Left
Hand Path » peut se targuer d’avoir grandement contribué à écrire les lettres de noblesse du metal extrême en général et d’avoir influencé de façon indéniable la musique de nombres de combos death à commencer par celle de certains de ses compatriotes et voisins…
Lobotomy se forme initialement sous le nom de
Rapture en 1990 dans la capitale suédoise autour du grunter/six-cordiste Lars Jelleryd, du guitariste Fredrik Ekstrand, du bassiste Patric Carsana et du batteur Daniel Strachal. Après la parution de divers démos/EP’s répondant aux patronymes pour le moins évocateurs de «
When Death Draws Near » (1990), «
Instinct of
Brutality » (1991) ou encore de «
Nailed in Misery » (1993) ; l’année
1994 voit les arrivées successives du vocaliste Max Collin ; qui pour l’occasion fait se concentrer Lars Jelleryd sur sa guitare ; et du guitariste d’origine française et fils de réfugiés politiques chiliens Etienne Belmar à la lead en lieu et place de Fredrik Ekstrand. Après la parution en 1995 d’un relativement bon mais trop timide premier album éponyme sur le modeste Chaos Records,
Lobotomy acquiert enfin les moyens de ses ambitions en signant un deal avec le légendaire label national No Fashion Records (
Marduk,
Bestial Summoning,
Dark Funeral,
Dissection…) qui sort en juin 1997 et sous la référence NFR023 le deuxième opus du quintette death de Stockholm sobrement intitulé «
Kill ».
S’il est bien un style métallique pour lequel efficacité rime irrémédiablement avec puissance et agressivité, le death metal de
Lobotomy semble convenir à la règle de la plus belle des manières à mesure que raisonnent les riffs et la rythmique acerbes de l’introductif « Rise and
Hate » dans les cavités auriculaires de l’amateur espérant revivre avec ce «
Kill » certaines sensations jadis vécues en compagnie des maîtres invétérés et instigateurs du genre death metal d’obédience suédoise que sont les légendaires Grave,
Dismember,
Unleashed et autres
Entombed. Visiblement marqué par une production redoutable d’intensité signé Tomas Skogsberg et Fred Estby des Sunlight Studios qui virent d’ailleurs naître sous la houlette de ces derniers les anthologiques « Left
Hand Path » d’
Entombed dont il est justement question en introduction, mais aussi les « Like an
Ever Flowing
Stream » et « Indecent &
Obscene » de
Dismember entre autres ; ce deuxième effort de
Lobotomy parait rassembler les ingrédients nécessaires à la constitution d’un très bon disque de death metal dans le style propre à l’école de Stockholm et ce malgré un patronyme et un artwork dénués d’originalité avouons-le ; notamment lorsque l’on connait le génie graphique des Dan Seagrave, Chris Moyen et autres Ed Repka dont les somptueuses et détaillesques covers justifient parfois à elles seules l’acquisition d’une galette en version vinyle bien entendu. A la puissance des riffs du binôme Belmar/Jelleryd tendant à tirer la musique de
Lobotomy vers le haut conviennent à s’ajouter les vocaux obligatoirement gutturaux et profonds de Max Collin qui ne sont pas sans rappeler ceux du grunter furieux d’
Entombed d’avec lequel il devient alors de plus en plus difficile de ne pas deviner un incontestable mais on ne peut plus logique lien d’influence. Les très efficaces «
Frozen », « Swerve », « Awaken » et autres « Mindtool » s’avèrent être en compagnie du préambulaire et non moins excellentissime « Rise and
Hate » les meilleurs moments d’une bande sonore inspirée et crédible de la désespérance humaine et des sentiments nihilistes qui peuvent en découler de façon naturelle.
Si l’atmosphère générale de l’album à l’image ou plutôt au son des titres précédemment cités se veut être efficace tant d’un point strictement musical que subjectivement émotionnel, «
Kill » possède également son lot d’imperfections qui tendent alors à rendre légitime la pensée que
Lobotomy soit d’une façon relativement compréhensible un éternel second couteau de la scène death metal de Stockholm. Ainsi et au-delà de son titre et artwork peu originaux et on ne peut moins recherchés dignes d’un premier effort autoproduit, relevons quelques titres singuliers et surtout en deçà des morceaux les plus efficients de la galette. Effectivement, « Cells
Divide » et son introduction tribale assez maladroite ainsi que « On
Red Ground » peinent à susciter l’attention d’un auditeur alors conditionné par le death metal puissant et surtout très efficace des jouissifs et précédents « Rise and
Hate », «
Frozen » et autres « Awaken ». Rompant quelque peu l’unité et la cohérence de l’album ; les très dispensables « Cells
Divide » et « On
Red Ground » s’avèrent tous deux poussifs et peut être représentatifs d’une faille d’inspiration dans la démarche créatrice de
Lobotomy vécue au cours de l’écriture de l’album en 1996. Des lors, pourquoi avoir inclu ces morceaux inférieurs au reste dans le tracklisting de «
Kill » alors qu’à son écoute épargnée de ces deux interrogations sonores, le deuxième opus du groupe de Lars Jelleryd mute en une réelle petite bombe de death metal que l’on pourrait écouter des dizaines de fois de suite sans considérer le temps qui passe ? Néanmoins et pour la plus grande satisfaction de qui écoute le disque pour la toute première fois, l’album ne s’arrête fort heureusement pas sur une note négative puisque le très bon morceau éponyme et mid-tempo «
Kill » doté d’une excellente introduction grave et mélancolique se voit décerner l’honneur de constituer le digne épilogue d’un album finalement des plus intéressants dans son ensemble. Enfin, le court instrumental « Serial
Dream » clôt définitivement le voyage introspectif de l’auditeur dans les abîmes les plus sombres de son âme tourmentée avec la lancinance et la monotonie sonore d’une machine rappelant alors à l’Homme son irréfutable condition d’être pour lequel la liberté se veut être en définitive la pire des prisons.
Malgré quelques erreurs et maladresses de jeunesse qui néanmoins tendent à l’empreindre d’un charme particulier et sans pour autant le considérer tel un chef d’œuvre immuable du genre auquel on le rattache ; «
Kill » de
Lobotomy s’avère être une démarche efficace de la part d’un groupe qui aurait peut être mérité plus d’exposition bien que n’ayant pas été actif discographiquement parlant durant les saintes années 1989-1993 ; âge d’or incontesté du death metal de Scandinavie en Floride en passant par le Royaume-Uni et l’Allemagne notamment. Doté d’une production puissante signé Tomas Skogsberg des Sunlight Studios, «
Kill » n’est pas sans rappeler non plus le
Entombed des inoubliables « Left
Hand Path » et «
Clandestine » sans pour autant constituer un vulgaire ersatz sans âme du légendaire groupe né sur les cendres des
Morbid et autres
Nihilist. Un album inspiré à la personnalité relativement marquée qui de par son efficacité générale ravira sans doute les amateurs de death metal d’obédience old school las des productions lisses et formatées qui font malheureusement l'actualité majeure de la scène death actuelle.
Dés les premières syllabes, j'eus une impression de déjà-entendu, la voix de Max Collin me rappelant furieusement celle de Johan Livaa en particulier lorsqu'il officiait pour Arch Enemy. Kill propose de belles variations sur fond de death made in Stockholm maintes fois rebattues. Les atmosphères sont soignées et la production encore très savoureuse. Il y a beaucoup de sobriété dans l'exécution et une technique remarquable de maîtrise. Un disque puissant et enthousiasmant, enseveli sous malheureusement des milliers d'autres, ni pire, ni meilleur. Le genre de disque qui a pu marqué lorsqu'il a été découvert à sa sortie, ou alors redécouvert par des archéologues spécialistes de death suédois.
Merci Art' pour ton point de vue fort pertinent (la vie est une succession de points de vue et non de certitudes, comprenne qui pourra) sur ce substantiel 2ème Lobotomy qui m'est particulièrement cher, car tout premier disque de death fucking metal à m'être passé entre les mains. RISE AND HATE
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