Le groupe pensylvanien
Halestorm fait partie de ces groupes à mi-chemin entre le
Hard-Rock et le
Metal dont le succès rapide a de quoi faire envie. Leur premier opus, “
Halestorm”, datant de 2009, s’est assez vite imposé dans le public grâce à trois éléments : son efficacité dans ses refrains accrocheurs, taillés pour la scène, ses mélodies, peu inventives mais suffisamment puissantes pour faire adhérer le public et la variété de son spectre musical, passant sans états d’âme du Metalcore easy-listening au Pop-Punk qui nous irritait tant il y a quelques années, mais qu’on se surprend d’accueillir à bras ouverts à l’heure de l’électro-r’nb triomphante. C’est oublier que le matraquage médiatique fut équivalant pour l’un comme pour l’autre. Mais le temps a fait son office, et c’était vraisemblablement le moment de jouer la carte de la nostalgie, du “C’était mieux avant, au moins y avait de la guitare électrique à la radio, en ce temps-là…” Cette carte,
Halestorm l’a jouée. Et, sans être d’une absolue mauvaise foi, on ne peut pas dire qu’il ne l’a pas très bien jouée, pile au bon moment, avec les très bons “
Halestorm” en 2009 et “The Strange Case Of…” en
2012.
La meilleure preuve de cela étant que le groupe est passé récemment du Trabendo au Bataclan, qu’il avait déjà fait en 2013, mais en première partie de
Bullet For My Valentine. Se faire repérer et coopter dans le milieu par un groupe plus installé que vous aide également, et c’est d’ailleurs comme ça que votre serviteur a connu le groupe. Parfois, quand on est talentueux, le succès ne tient décidément pas à grand chose… C’est sur les marches de ce même Trabendo que j’appris, à la mi-2014, l’arrivée prochaine d’un nouvel album. Puis, les premiers titres arrivèrent à ma connaissance. Enfin, l’album sortit et, trépignant d’impatience dans ma retraite finlandaise, je pus bien vite poser une oreille dessus. Brisons la glace tout de suite. J’ai bien aimé cet album mais je ne suis pas pleinement satisfait, et j’ai d’autant plus de peine à l’écrire que je l'attendais beaucoup. Alors pourquoi un tel coup de froid ?
Il convient ici d’être clair. C’est loin d’être une catastrophe. S'il y a quelques accidents, le niveau général de l’album est bon et fourmille de tueries. Et c’est par celles-ci qu’on va commencer. Sur ces 13 pistes, on compte 7 titres purement
Hard-Rock,
Metal ou -nouveauté- Punk. Cela peut paraître un peu juste, mais si on retranche de “The Strange Case Of…” les ballades et les titres Pop-Punk un peu mièvres, on constate qu’il n’y en avait pas davantage. Parlons-en donc. La première d’entre elles, “I Am
The Fire”, quatrième titre de l’album révélé au public, est très appréciable. On peine d’abord a comprendre où nous emmène le refrain, mais on se l’approprie bien vite et on est rapidement conquis par ce riff ravageur qui vient ensuite, par les cris et la voix en sourdine de Lzzy Hale. Dans le même genre, “Apocalyptic", premier titre disponible sur le Net, est un peu difficile à appréhender en première écoute, notamment par son refrain plus subtil que les autres et par le fait que, des titres résolument
Metal de l’album, il est peut-être finalement le moins puissant. Il se grave vite, à la faveur des écoutes, dans notre cerveau. Le solo de guitare en milieu de morceau est aussi, sans être révolutionnaire, plutôt sympathique. Ces deux titres ont aussi le grand avantage de proposer de la nouveauté, quelque chose qu’on peut tout-à-fait avoir déjà vu ailleurs, mais qui n’a jamais été présenté au public du groupe. C’est aussi le cas d’“
Amen”, deuxième clip de l’album. Sa guitare peut sembler un peu pesante, mais se trouve être résolument Heavy. Son refrain est très très chouette et semble fait pour être scandé sur scène, les cris de Lzzy décoiffent bien. Bref, ce titre à tout pour continuer de passer dans les prochaines tournées. Qui plus est, son clip est assez sympa à regarder, nous évoquant ces jours où rien ne va et on a vraiment envie de tout envoyer valser et profiter un peu de la vie.
“Gotta Get Mine” est assez classique, plus frontale, mais l’alchimie opère tout de même très bien, notamment grâce à son riff très
Hard-Rock et agréable. Ses “Na ! Na ! Na-Na-Na-Na !”, rappelleront aux amateurs attentifs du groupe le début de “
Daughters of
Darkness”, sur l’album précédent. “
Mayhem” fut sans doute ma plus grande surprise quand je le découvrai, en tant que second titre promo. Après la Pop-Punk,
Halestorm avait fait ce qu’il n’avait jamais osé faire jusque-là. Aller vers le Punk “pur”. Il y a certes des passages plutôt planants entre les refrains hurlés, pour poser une atmosphère, le riff Punk est certes classique, mais on y croit facilement. Par ailleurs, les refrains (et surtout le cri central du morceau) sont gueulés avec une hargne que je n’avais encore jamais vue chez Lzzy. “I Like it Heavy” est aussi très bon dans ce registre avec son chant extrêmement hargneux. Là aussi, le “I Like it ! I Like it ! I Like it Heavy !” sera bien vite nôtre sur scène. Le titre le plus difficile à apprécier dans cette catégorie sera sans aucun doute “
The Reckoning". Il n’est pas à proprement parler mauvais, mais est assez planant (à ce titre, il me rappelle beaucoup “Rock Show” sur l’album précédant), mais en beaucoup plus progressif. Il commence au piano et à la basse, puis la batterie prend ses marques. Enfin, le chant s’emballe et la guitare prend de plus en plus de place, faisant de ce titre quelque chose d’intéressant, à défaut d’être le plus entraînant.
Maintenant que je me suis répandu en éloges sur les titres qui le méritent, passons au reste de l’album, aux titres restants qui font que je ne suis pas pleinement satisfait, qui me forcent à le trouver inégal, à savoir la catégorie des titres qui ne sont pas
Hard-Rock/
Metal/Punk. Je n’ai personnellement rien contre le fait qu’un artiste estampillé
Hard-Rock en fasse, ni qu’un groupe comme
Halestorm en fasse. On sait depuis leur tout premier album qu'ils ont un certain goût pour les styles de musique "pour ados" (Pop-Punk), depuis "
The Strange Case of..." qu'ils apprécient les ballades semi-acoustiques/à piano, et depuis "Reanimate 2.0" qu'ils aiment reprendre
Lady GaGa ou Daft Punk. Néanmoins, dans ces trois cas, la guitare électrique et les riffs
Hard-Rock étaient suffisamment présents pour se faire apprécier d'un tel public. Dans le cas des ballades, on pouvait s'identifier aux textes et donc on pardonnait à ces titres d'être un peu gentillets. De plus, ils étaient concentrés sur "The Strange Case Of", ce qui faisait qu'on ne passait pas du coq à l'âne en permanence. Si vous n'aimiez pas trop la Pop-Punk ou les ballades, le milieu de "
The Strange Case of..." était un mauvais moment à passer, mais le début et la fin de l'album étaient assez rythmés pour bien vite faire oublier cet écart. Et pour ce qui est des reprises de titres Electro-Pop, elles n'étaient pas si mauvaises et assez rigolotes mais ne vous étaient nullement imposées au sein d'un album studio (il fallait acheter un album de reprises pour ça). Si je vous parle de ces éléments, vous supposez sans doute que ce sont eux, qui, à mon sens, posent problème. Alors parlons de ces titres problématiques...
Il y en a de deux types. Il y a tout d’abord les titres inspirés de la musique électronique. Le premier d’entre eux, “
Scream”, le tout premier titre de l’album, est intéressant dans sa démarche mais assez faible pour une entrée en matière, plus en ce qui concerne son refrain, très minimaliste, que son instru. On se souviendra alors avec nostalgie (thème décidément à l’honneur dans cette chronique…) d’une entrée comme “It’s Not You” ou, plus encore “Love Bites (So Do I) qui giflaient littéralement l’auditeur en début de disque. “I Am
The Fire" vient juste après pour rassurer l’auditeur, mais réussir son entrée, c’est important. Et, sur ce point, force est de constater le groupe m’a habitué à mieux. “Sick Individual”, en revanche, est bien meilleure de ce point de vue. La voix modifiée de Lzzy passe bien, le refrain est accrocheur et, surtout, la guitare reste suffisamment présente et catchy pour donner du rythme à la chose et faire accepter le mariage des deux styles. Ce n'est hélas pas le cas pour “New Modern Love”. Il y a, certes, une jolie ouverture avec une guitare très Rock N'Roll (qui reste tout le morceau, par ailleurs), le refrain, à l'image des autres titres du groupe depuis ses débuts, est très facile d'accès, la voix à peine modifiée de Lzzy Hale passe bien, les percussions (djembés) rendent le tout assez chaloupé et intéressant, mais on sera surpris par ce rythme douceâtre, justement. Il y a bien un petit riff en fin de refrain, mais ça reste très limité et minimaliste. Le titre a visiblement été pensé pour être rythmé autrement, pour surprendre. De plus, elle marque un temps d'arrêt avec ce ton, étant placée juste après la ballade "Dear Daughter". Ces titres "électronisés", s'ils avaient pu être meilleurs, ne sont pourtant pas les sorties de route les plus flagrantes sur cet album...
On les trouvera du côté des ballades, pourtant un des points forts de l’album précédant. Ici, on oscillera entre le bon et l’insupportable. “Dear Daughter” est assez réussie et fait penser à “Break In” avec son piano, sans en atteindre l’intensité dans l’émotion, toutefois, et ce, malgré un texte très correct. “What
Sober Couldn’t Say” reprend les cordes acoustiques et le texte sur les choses qu’on n’ose pas dire à l’autre d’ “In Your Room”, mais la guitare électrique est trop peu présente, ce qui faisait le charme de son aînée. Alors, oui, ça s’énerve un peu à la fin, tant sur le chant que sur la guitare, mais elle est clairement trop Pop, et semble un peu en trop. De plus, elle casse le rythme car elle est placée entre deux titres
Hard-Rock, à savoir "Apocalyptic" et "I Like It Heavy". En tout cas, elle est nettement moins en trop que le plus gros plantage de cet album, à savoir “Bad Girls World”. Cette chanson est ultra décevante. Son refrain fait déjà entendu mille fois, sonne comme la Pop la plus commerciale qui soit (au point que j'ai cherché si ce n'était pas une reprise et... j'aurais préféré !), dure 5 minutes (ce qui est interminable pour un titre aussi peu intéressant que ça) et une fois de plus, se place entre les deux très bons "
Mayhem" et "Gotta Get Mine". Deux soli ultra frustrants, aussi. Le premier, placé en milieu de morceau, accompagné d'un réveil de la batterie, nous fait entrevoir un décollage badass, genre "Alors ? On vous a fait peur, hein ?!", mais hélas, c'est pour mieux retomber dans la Pop inspide ensuite... Le second, devant assurer la transition avec "Gotta Get Mine", fait par ailleurs vraiment comique, comme si le groupe s'était rendu compte que, là, ils avaient un peu abusé, et qu'ils s'étaient dépêchés de mettre quelque chose d'un peu
Hard à la fin, pour pas que ça se voie trop... Sauf que ça se voit et que ça rend le truc encore plus grotesque...
Vous l'aurez compris, Ces deux titres sont vraiment le point noir de l'album, car ils fragilisent l'ensemble du disque. Ils le fragilisent d'autant plus qu'ils se cumulent à des titres un peu molassons (mais pas si mauvais), comme "Dear Daughter", "
The Reckoning", "
Scream" et "New Modern Love". Parce que 6 titres qui sont "pas mauvais mais un peu mous" ou qui sont des ballades, mine de rien, sur 13, ça fait beaucoup. Ça fait trop, même. C'est là que le bât blesse, en définitive. Il blesse d'autant plus que les durées de “
Halestorm” (37 minutes) et de “The Strange Case Of…” (41 minutes) étaient largement dépassées (49 minutes, soit 8 de plus, c'est-à-dire la durée cumulée des deux titres en question) et qu’on aurait très bien pu s’en tenir à 11 titres. Surtout si c'était pour rajouter ceux-là... Il apparaît que l'écoute de l'album est nettement plus agréable quand on retire "What
Sober Couldn't Say" et "Bad Girls World" (je vous invite à essayer : ils ne seront de toute façon jamais joués en concerts...), mais je me dois de tenir compte de leur présence malheureuse dans ma notation.
Entre les titres punchy qu'on aime et les titres mollassons trop nombreux, il semble qu'
Halestorm n'arrive pas à choisir. Dans "
Into the Wild Life", la volonté d'accorder de la place aux ballades, aux nouvelles expérimentations électro, sans s'aliéner le public
Hard-Rock/
Metal qui l'a porté, se traduit par un ouvrage qui possède son lot de pépites, mais qui maltraite l'auditeur par ses changements de styles incessants. Il restera un opus patchwork d'expérimentation. Et expérimenter, proposer, essayer, voir ce qui a plu et déplu, c'est très positif. Bousculer également. Encore faut-il savoir bousculer avec mesure et subtilité...
Je ne connaissais que de nom et j'ai été faire un tour sur YT. Lizzy est sexy et la musique me plaît. je vais donc approfondir. La chronique est complète et intéressante, d'autant plus que les autres albums ne sont pas chroniqués. Encore merci ;-)
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