Comment faire ?
En ces temps où tout semble avoir été fait, où la musique ne paraît être qu'un éternel recommencement, où les vagues revival s'échouent à intervalles réguliers sur les rives de notre soif de découverte, comment faire au 21ème siècle pour se démarquer, laisser son empreinte sur le monde, toucher le plus grand nombre et accéder à une notoriété au final bien subjective ?
Ce genre de questionnement, qu'il soit introspectif ou débattu sur la place publique,
Savage Messiah, jeune groupe londonien, ne semble pas se le poser. Quand on veut faire du thrash, on fait du thrash. Point barre.
Alors évidemment, on peut y mettre les formes : un artwork soigné, sombre et post-apocalytique, des textes traitant des désormais classiques thèmes de la religion, de la soumission, de la révolte, … Mais le plus important reste la musique, et là, point de surprise. Le thrash pratiqué par
Savage Messiah envoie comme il faut, certes, mais dès les premières notes du morceau-titre, on voyage 10 ans en arrière en retrouvant le riff du "D.N.R." de
Testament ! On comprend alors le truc : les gars vont mettre la poignée dans le coin et foncer dans le tas, et tant pis pour la postérité !
Une fois ce postulat établi, on appréciera donc la production moderne, compacte, sans poil qui dépasse, le style nerveux et carré, dans une veine Nevermore /
Testament (depuis 1999), loin donc du style revival actuel.
Pas de reproche à faire aux musiciens, l'interprétation est excellente, sans fioriture, même si certains doublages vocaux paraissent plus travaillés, sur les refrains notamment. La voix de Dave
Silver trouve un bon compromis entre Dave Mustaine et Whitfield Crane, même s'il est aussi capable de cris presque halfordiens. De nombreux soli émaillent le disque et encore une fois, ne révolutionnent en rien le style. Le disque se parcourt sans problème, passe à une vitesse folle, on s'habituerait presque au goût de déjà-vu… C'est donc avec bonheur qu'on tombera sur le furieux "Enemy
Image (Dehumanization)", ponctué de lumineuses cavalcades à la
Iced Earth sur la seconde partie du solo (c'en est troublant), assurément le morceau le plus efficace du disque, suivi de près par les véloces "The
Serpent Tongue of Divinity" et "
Insurrection Rising".
Fatalement, c'est quand le groupe s'éloigne du schéma classique qu'il paraît le moins à l'aise. "In Absence of Liberty" par exemple, n'est pas désagréable à écouter, mais quelques passages trop mélodiques nuisent non seulement à la cohérence mais ont tendance à rapprocher le groupe d'un style qui n'est pas le sien (et qui finirait en -core …). Sur "
Silent Empire", c'est encore le cas : un curieux patchwork de balade et de furie métallique ; un léger manque d'unité qui saute un peu aux oreilles au début, mais globalement, rien de vraiment rédhibitoire, surtout que le refrain est plutôt bien balancé.
Les Anglais savent donc y faire pour ce qui est de l'accroche et de la puissance, au risque de manquer d'originalité. Mais après tout, qu'importe ? Mieux vaut une bonne copie qu'une exécrable bouillie sans queue ni tête servie au nom de l'originalité ultime et du sacrosaint patch underground.
Savage Messiah est encore jeune et affiche brillamment ses influences avec cet
Insurrection Rising humble mais quoi qu'on en dise efficace. A suivre ...
Meme s'il ne renouvelle pas le style ce groupe à tout à fait sa place dans le paysage metallique.
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