Encore un énième groupe de metal symphonique à chant féminin, sans doute voué, comme tant de ses pairs, à une disparition anticipée de ce si concurrentiel registre metal, me direz-vous, et vous auriez probablement raison... à quelques nuances près toutefois ! Ce serait faire fi de la féroce détermination à en découdre de la part de ce duo italien sorti de terre en 2021, sous l'impulsion du compositeur, arrangeur et pluri-instrumentiste Mirko Fermani et de la soprano Francesca Bonvini (Note Di Natale, Bonvi, 90 Mania, guest chez Speaking To The Deaf). Quelles seraient alors les atouts de ce combo transalpin pour espérer se démarquer de ses si nombreux homologues, parmi lesquels de jeunes loups aux dents bien longues ?
Ce faisant, et conscient des enjeux et des risques courus à chercher coûte que coûte à imposer leurs riffs, c'est non sans une certaine prudence que nos acolytes se sont lancés dans la bataille. Aussi, ne nous livreront-ils pas moins de trois singles de deux titres chacun («
Inside My Mind », «
Mother of Lies » et «
Creeping in the Dark »), plusieurs mois avant la sortie de leur introductif et présent EP, «
Inside My Mind », auto-production de quatre pistes (dont trois des six titres issus de leurs trois singles) égrainées sur un ruban auditif modeste de ses 15 minutes. Produit et écrit pour l'essentiel par Mirko Fermani, ce propos d'obédience metal mélodico-symphonique aux relents opératiques et gothiques, et inspiré par les récits de fantasy, se fait à la fois solaire, enjoué, chatoyant et un brin romanesque ; une modeste mais envoûtante offrande où les sources d'inspiration seraient à chercher du côté de
Nightwish,
Rhapsody Of Fire,
Xandria,
Epica et
Tristania. Mixé et mastérisé par Frank Micucci au Ganapati Studio, le méfait jouit d'une qualité d'enregistrement difficile à prendre en défaut et de finitions passées au crible. De quoi nous intimer d'aller explorer plus en profondeur les arcanes de l'opus...
C'est sur une cadence mesurée que s'effectue la traversée dans son entièreté, nos compères nous octroyant alors un titre de leur propre répertoire et trois passages éminemment influencés par la fantasy. Ce faisant, la piste de son cru – le cadencé mid tempo symphonique gothique «
Mother of Lies » –, nous aspirera d'un battement de cils, au regard de couplets aussi finement ciselés qu'énigmatiques et de son atmosphère enivrante ; un brin gorgonesque et investi de growls ombrageux, cet intrigant effort au carrefour de
Xandria,
Tristania et
Lacuna Coil n'ira pas sans générer quelques frissons auprès de celui qui y aura plongé le pavillon.
Plus directement inscrits dans l'univers de la fantasy, trois des quatre plages nous transportent alors dans l'espace du merveilleux, qui n'est pas sans stimuler l'imagination du chaland. A commencer par «
Creeping in the Dark », un ''rhapsodien'' mid/up tempo aux truculentes sonorités organiques et recelant un léger tapping. Cette opératique livraison, qui serait un hommage rendu à Shallan Davar, l'une des protagonistes des « Archives de Roshar » ("The Stormlight Archive") – un cycle de fantasy écrit par l'auteur étasunien Brandon Sanderson –, s'avère apte à éveiller d'authentiques plaisirs. Inspiré de la même œuvre, «
Inside My Mind » se pose tel un solaire et théâtral mid tempo aux riffs crochetés, à mi-chemin entre
Epica et
Xandria, que l'on retiendra tant pour l'infiltrant cheminement d'harmoniques qu'il nous invite à suivre que pour son refrain catchy, mis en exergue par les fluides inflexions de la sirène.
Par ailleurs, extraite de la trilogie cinématographique de fantasy Le
Hobbit, réalisée par Peter Jackson, la glaçante ballade a-rythmique « Misty Mountains » se voit ici muée en un pénétrant low tempo symphonique folk, non sans de prégnantes montées en régime du dispositif orchestral inscrites dans sa trame ; magnifiée par les troublantes volutes de la déesse, cette ''nightwishienne'' option incitera le chaland à une remise en selle sitôt l'ultime mesure du propos envolée.
Au final, le combo italien nous livre, certes, une œuvre dans un mouchoir de poche, mais fortement chargée en émotion et bénéficiant d'une ingénierie du son de bon aloi. En dépit du classicisme de l'exercice dispensé, et en raison de lignes mélodiques travaillées en profondeur et des plus immersives, l'accroche s'opère, bien souvent, d'un battement de cils. D'aucuns auraient sans doute espéré un propos plus diversifié sur les plans rythmique et vocal, des exercices de style plus variés (ballades, fresques, duos et instrumentaux manquent cruellement à l'appel) ainsi que l'une ou l'autre prise de risque consentie par nos acolytes. Carences partiellement compensées par des arrangements aux petits oignons, une technicité instrumentale éprouvée mais non ostentatoire et par une atmosphère plurielle. Quoi qu'il en soit, à l'aune de ce seyant et si troublant effort en guise de message de bienvenue, nos compères auraient dores et déjà une belle carte à jouer pour espérer se hisser parmi les sérieux espoirs de ce registre metal. L'avenir seul nous le dira...
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