Rue de l'abreuvoir, il y a un troquet, appelé affectueusement le Café du Paradis.
Temple de l'absurde, on y rencontre parfois des femmes guère pudiques, des messalines. Mais c'est surtout pour ses tenanciers que les habitutés s'y pressent, agripés au comptoir : Mickael, Jean-Charles, Stéphane, Chattos et sa gouaille généreuse. On peut y téter un petit blanc ou une bonne bière de Bresse, se déniaiser en histoire(s) (d'O) et le jukebox crache constamment du bon hard rock.
Bouchon à la bressane, on y mange plutôt bien également. Cette année, la carte offre onze plats et boissons efficaces, qui macèrent dans le heavy metal des années 80. Iron Maiden n'est jamais bien loin ("Espèce d'icône"), comme le démontrent les harmonies usinées par la guitare de Mickael ("Le bûcher des vanités") ainsi que certaines lignes vocales qui convoquent le
Bruce Dickinson des débuts.
Pas de prise de tête ici. Les textes, savoureux ("Zèle de poulet") et riches de contrepétries, sont déclamés en français comme dans la grande tradition des eighties par un Chattos, sorte d'enfant batard né de l'accouplement sauvage de Christian Décamps (Ange) et de
David Byron (
Uriah Heep).
Ce menu porte le nom de
In Cauda Venenum. Les saveurs progressives, oripeaux du passé, qui pîmentaient encore un peu les mets précédents ("Les cailles au fenouil" notamment) ont cette fois disparu. L'équipe a trouvé ses marques et vidange une musique plus agressive et travaillée ("Toujours plus bas" et son pont instrumental étonnant, "Ecarte-les" : mmmm... tout un programme !). Le chant se veut plus diversifié, sombre ("L"infirme avant") et presque black metal lors du café (le suprenant et très réussi "
In Cauda Venenum").
Les ingrédients sont bien connus des amateurs mais la mayonnaise épaisse, bien préparée dans les cusines du groupe
Furia à Mâcon toujours sous l'oeil du chef Didier Boyat, prend davantage. Chaque plat, assez court, est porté par des grattes biberonnées au heavy des familles (l'intro bien bandante de "Tragic
Circus") et une rythmique chaloupée . Parfois rapides ("Souffler dans le cul de
Lucifer"), ou plus lourds comme un bon cassoulet ("Le bûcher des vanités", "Fin de règne"), ce qui est une nouveauté de la part de
Messaline, tout passe de l'apéro au fromage, aussi facilement que Marlon Brando dans le cul de Maria Schneider dans Le dernier tango à
Paris.
Bref, au Café du paradis, on est comme dans une bonne vieille paire de pantoufles, classiques mais confortables. Les amis s'y retrouvent. La famille aussi. Certains jugeront sans doute le lieu trop provincial mais c'est aussi ce qui fait son charme. Nombreux pisse-copies parisiens seraient bien avisés d'accorder autant de crédit à
Messaline qu'ils le font aux
Killers,
Malediction et autre Manigeance, auquels les Bressans n'ont clairement rien à envier...
Je jetterais une oreille à cet album, merci!
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