Liste des groupes Power Progressif Slain (IND) Here and Beyond

Dans ma recherche sur la scène indienne à tendance progressive et mélodique, je suis tombé sur un jeune groupe de Bangalore (comme souvent), qui avait tout l'air de correspondre à ce que je cherchais. Il s'agit de Slain, un sextet jouant un power metal assez classique agrémenté d'une bonne dose d'influences progressives. Le combo a débuté sa carrière en sortant à un an d'intervalle deux démos. La seconde, Before Beyond, sortie en 2009, disponible en téléchargement gratuit, donnait déjà l'image d'un groupe sympathique, avec des musiciens talentueux, même si tout le côté progressif était inexistant à l'époque. Le line-up se stabilise enfin, pour voir sortir en 2010 le premier full-lenght du groupe, Here and Beyond, dont il est question aujourd'hui.

Voyons maintenant en pratique comment s'en sortent ces petits nouveaux de la NWOIHM comme on l'appelle parfois, et je vous laisse deviner ce que signifie cet acronyme. Sur le papier, on voit que le combo est toujours en auto-production (ce qui ne veux pas dire mauvaise qualité), peut-être ont-ils des difficultés à trouver un label, dans un pays qui a franchement autre chose à faire que d'écouter du metal. En revanche, question pochette, on a un vrai plus ; Slain se différencie complètement de ce que se fait généralement, en proposant un magnifique dessin, coloré et lumineux. Du côté de la tracklist, celle-ci est composée d'une introduction, et de neuf autres morceaux, dont un issu de la seconde démo.

À propos de l'introduction, celle-ci évite simplement de démarrer tout de suite par les hostilités, mais on peut déjà deviner par un subtil filigrane le thème principal de la première chanson. Soldier commence l'album avec une puissance maîtrisée et un habile jeu de guitare, posant une ambiance sérieuse, mais fascinante et envoûtante. Les premières lignes de chant mettent tout doute de côté, même si la voix, un peu particulière, peut gêner. Hormis les délicates sonorités orientales que l'on entend parfois, ce titre impose un metal résolument power mélodique, mais fortement teinté de progressif ; comme on peut le constater lors de l'excellent passage instrumental. Le clavier parvient à nous subjuguer, avec des atmosphères d'un coup plus sombres, plus folles, avant de nous surprendre par un solo de guitare bien senti, d'abord plutôt tranquille, puis ensuite complètement délirant (au sens premier du terme). On retourne alors sur le refrain final, bien entraînant, puissant, avec un chant assez original.

D'autres titres de l'album sont clairement dans cette lignée, proposant un metal mélodique assez accrocheur, mais toujours original. C'est le cas des très agréables Judgement Call et Spread Your Wings. Ces deux morceaux offrent tous deux de belles mélodies accrocheuses, avec toujours un jeu de guitare fort sympathique, ainsi qu'une très bonne prestation du clavier pour le deuxième. Le chant s'en sort plutôt bien, même si on ressent quelques fragilités de temps en temps, notamment dans les aiguës. Les soli sont à chaque fois de très bonne facture, assez recherchés, présentant de petites originalités souvent dues au clavier.

Cependant, Slain n'a pas mis tous ses œufs dans le même panier, et ils ont bien fait. À côté de la tendance dominante power metal mélodique, d'autres titres se démarquent, dans une approche nettement plus progressive. Le groupe annonce d'ailleurs sur sa page web être : "India's answer to progressive metal". Angel in the sky, le premier des trois morceaux concernés par l'aspect progressif, débute par une très longue introduction tout en douceur, avec des sonorités un peu exotiques, qui peuvent rappeler la cornemuse (si si !). Le riff de guitare arrive peu après, sur fond de clavier futuriste. La fin du morceau est remarquable, avec un long solo de guitare bien sympathique.
Vient ensuite Prodigal, certainement mon titre préféré, qui nous fait l'agréable surprise d'une voix féminine. La dualité entre les deux voix donne une très belle sensation, en particulier lors du refrain, soutenu par un piano discret. On se rapproche un instant de la classique power ballade, mais le côté progressif reprend le dessus, le temps d'un petit passage rock mais surtout du superbe pont chanté par Judah Sandhy.
Le dernier morceau, éponyme, est probablement celui qui fait le plus référence au metal progressif européen. Les mélodies à la guitare et au clavier du début font penser à ce que l'on peut entendre actuellement dans ce milieu, mais sans pouvoir définir un groupe en particulier. Le refrain est très bon, puissant, catchy, suivi par un clavier qui donne une impression de gravité et de sérieux. Le passage instrumental, assez alambiqué, est bluffant et troublant, cherchant presque à perdre l'auditeur au détour d'un solo de guitare très technique.

Cependant, l'album est loin d'être parfait, ce qui est un peu évident pour un groupe débutant, sans label, dans un pays où le metal n'a que peu d'importance. Effectivement, on entend quelques soucis au niveau du chant, qui est parfois mal maîtrisés, notamment dans les parties plus aiguës, mais comme cela est dû à la jeunesse du chanteur, on peut espérer des progrès. C'est la même chose pour la batterie, qui manque de puissance, mais là encore le batteur a tout pour s'améliorer. Du côté de la production aussi le plaisir de l'écoute et quelque peu entamé, car tous les instruments ne sont pas toujours audibles. C'est principalement le cas de la basse, mais comme ils sont loin d'être les seuls à commettre cette erreur, on peut s'en passer.

À défaut de pouvoir concurrencer directement les plus grands groupes, Slain se montre tout-de-même comme l'un des chefs de file du metal indien. Le grand point fort du combo est simplement de ne pas vouloir suivre les traces de groupes maintes fois copiés, pour s'approprier une musique personnelle et ses propres sonorités. Compte tenu des l'âge des membres, Here and Beyond est un effort louable, présentant un talent indéniable. Des progrès sont bien sûr à accomplir, mais cet album reste toujours agréable à écouter, pour ses mélodies entraînantes et son originalité. De plus, l'opus est disponible en téléchargement pour une somme modique ; alors, pourquoi s'en priver ?