Il aura fallu patienter la bagatelle de cinq longues années depuis la sortie de leur premier et friable album full length « Lifelines » avant de voir le combo teuton enfin revenir dans les rangs. Le temps pour nos compères de solidifier leurs compositions, de fluidifier leurs portées et surtout multiplier leurs apparitions scéniques à l'échelle locale (Female
Voices Festival 2014 et 2016 à Bamberg ; MetAmensis Mittelalter OpenAir 2014 à Pastetten,
Free & Easy Festival 2014 à Munich...), ayant alors partagé l'affiche avec quelques pointures du genre, dont :
Xandria,
Leaves' Eyes,
Serenity,
Coronatus et autres Folkstone et
Atrocity. Quelque dix années après sa création, l'expérimenté collectif serait-il désormais en mesure de tenir la dragée haute à ses redoutables challengers,
Beyond The Black,
Elvellon,
Walk In Darkness,
Sleeping Romance ou encore
Metalwings et
Once en tête de peloton ?
Dans ce dessein, le groupe teuton nous a concocté un second opus de longue durée dénommé «
Guardians of Brocéliande » sorti, cette fois, chez
Massacre Records, et jouissant, tout comme son prédécesseur, d'une ingénierie du son d'excellente facture. A nouveau mastérisés mais aussi produits et enregistrés par Alexander Krull (
Leaves' Eyes,
Atrocity) au Mastersound Entertainment (à Steinheim, en Allemagne), les 10 titres s'égrainant sur les 37 minutes de la galette bénéficient d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation, de finitions passées au crible et d'arrangements de bon aloi. Une heureuse mise en relief du nouveau set de compositions doublée d'une plume plus alerte qu'autrefois, qui laissent à penser que nos acolytes auraient alors porté un regard critique sur leur œuvre et relevé d'un cran le niveau de leurs exigences relatives à la production d'ensemble.
Dorénavant, c'est un équipage partiellement renouvelé qui nous fait entrer dans le vaisseau amiral, à savoir : Susan Notohamiprodjo au chant ; Alexander Senkbeil aux guitares ; Stefan Wengenmayr à la basse ; Anderl Löffl à la batterie ; Francesco Macri aux claviers ; Angelina Koschel, en remplacement d'Elli Wiesner, au violon. Avec le concours, pour l'occasion, de vocalistes chevronnés, à l'instar d'Alicja Mroczka et d'
Oliver Tim. De cette étroite collaboration naît une œuvre rock'n'metal mélodico-symphonique et folk à la fois résolument vivifiante, volontiers pimpante, parfois enivrante, un brin romantique, dans la veine de
Xandria,
Delain,
Arven,
Krypteria,
Lyriel,
Leaves' Eyes et
Midnattsol. Un poil plus symphonisante, sans s'avérer grandiloquente, et mélodiquement bien plus affûtée que sa devancière, la cadette fait également la part belle aux choeurs tout en nous octroyant d'inédites variations atmosphériques. Pour notre plus grand plaisir... Mais entrons plutôt dans la cale du navire en quête d'éventuels trésors enfouis...
Tout comme son aîné, le présent méfait parvient aisément à encenser le tympan à la lumière de ses pistes à la cadence mesurée. Ainsi, les symphonisants mid tempi progressifs « Wrath of Nature » et «
Guardians of Brocéliande » ne tardent pas à décocher leurs riffs épais adossés à une rythmique d'une régularité métronomique ; démarche qui n'a nullement exclu l'une ou l'autre montée en puissance du convoi orchestral, loin s'en faut. Dans un cas comme dans l'autre, non sans rappeler un
Leaves' Eyes estampé «
King of
Kings », l'imposante muraille de choeurs s'intercale opportunément, contribuant à densifier le corps oratoire de sa présence tout en s'harmonisant avec les claires impulsions de la sirène.
Lorsqu'elle flirte avec l'univers pop, la troupe semble aujourd'hui plus à même de nous rallier à sa cause. Ce qu'illustre, d'une part, le tubesque « A
Life for You », un entraînant méfait à mi-chemin entre
Delain et
Amberian Dawn (seconde mouture). Doté de couplets finement sculptés relayés chacun d'un refrain catchy, et pourvu d'enchaînements de séries d'accords coulés dans le bronze, l'enjoué propos se pare également de sensibles gammes au piano et se voit magnifié par les graciles volutes de la déesse. On serait désormais bien loin d'un tâtonnant «
Devil's Babe » ou encore d'un friable «
Last Hope ». On retiendra également «
Fire of My
Heart », pimpante et ''delainienne'' plage mise en exergue par un saisissant duo féminin unissant les limpides empreintes vocales de Susan et Alicja Mroczka. Un hit en puissance pourvu d'un refrain apte à laisser quelques traces indélébiles dans les mémoires de ceux qui y auront plongé.
Dans ses moments enfiévrés, plus qu'il ne l'avait consenti jusqu'alors, le collectif germanique se montre là encore apte à aspirer le pavillon. Aussi sera-t-on bringuebalé par une cavalerie semblant ne jamais vouloir interrompre sa course à l'aune de « Speed of Light » ; tonique et ''krypteriane'' offrande à la basse vrombissante, voguant sur une avenante sente mélodique et armée d'un entêtant refrain. Dans cette lignée, l'offensif «
Escape from Alcatraz » dissémine ses riffs crochetés tout en offrant un duo mixte en voix claires des plus infiltrants entre les angéliques patines de Susan et les troublantes attaques d'
Oliver Tim, à peine interrompu par une chorale aux abois sur un break opportun. Délivrant un refrain agréable à défaut d'être des plus mémorables, le manifeste emprunte, par ailleurs, quelques chemins de traverse susceptibles de désarçonner un tympan non averti.
Quand la lumière se fait douce et que s'apaisent les tensions, nos compères trouvent à nouveau les clés pour nous retenir plus que de raison. Ainsi, la petite larme au coin de l'oeil ne pourra que malaisément être esquivée à l'instar de « My Last Melody », romantique et ''nightwishienne'' ballade aux airs d'un slow qui emballe, calée sur une ligne mélodique d'une confondante fluidité. Mise en habits de soie par les limpides et ensorcelantes inflexions de la maîtresse de cérémonie, la caressante proposition joue les bourreaux des cœurs en bataille. On appréciera également le joli toucher d'archet d'Angelina Koschel coalisé à un fin picking à la guitare acoustique émanant des entrailles de « Summer Days », mélancolique ballade a-rythmique dans le sillage de « A
Winter's
Dream ». Enjolivée par les grisantes envolées semi-lyriques de la belle, la tendre aubade révèle une mélodicité toute de nuances vêtue.
En dépit de ses mérites, la rondelle accuse d'incompressibles baisses de régimes. Dans cette énergie, s'inscrit le tempétueux up tempo d'obédience power symphonique « Now It's Time ». Libérant une sidérante force de frappe qui rarement s'affadit, le brûlot dissémine parallèlement un inaltérable et martelant tapping ainsi que d'oscillants gimmicks guitaristiques, dans la veine d'
Ancient Bards. On regrettera toutefois un sillon mélodique en proie à de tenaces linéarités et de répétitives séquences d'accords.
Plus déconcertant encore, au regard de ses séries de notes aux enchaînements mal assurés et de l'usante répétibilité de son cheminement d'harmoniques, l'incisif « The Signs » bien souvent nous égare, sans jamais parvenir à nous raccrocher. On passera donc son chemin.
Message a donc été reçu par nos acolytes de devoir réviser leur copie, ces derniers nous octroyant, cette fois, un propos à la fois vitaminé, enjoué, émouvant, et surtout personnel, jouissant, en prime, d'une ingénierie du son plutôt soignée et d'arrangements de fort bon aloi. Témoignant d'une technicité instrumentale éprouvée et d'une empreinte vocale plus impactante aujourd'hui qu'hier, la galette bénéficie également de lignes mélodiques plus immersives et de cheminements d'harmoniques plus infiltrants qu'autrefois.
Cela étant, on aurait peut-être souhaité l'octroi d'exercices de style plus variés (instrumentaux, fresques...) ainsi que l'une ou l'autre prise de risque. Si quelques bémols viennent émailler la surface du skeud, la diversification atmosphérique, rythmique et vocale de l'offre permet de compenser ces irrégularités. Le combo teuton aurait donc les cartes en main pour pouvoir désormais s'imposer parmi les valeurs montantes du metal symphonique à chant féminin. Quand la chrysalide devient papillon...
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