Surnommé à juste titre l’ennemi public numéro 1 ou encore l’homme aux mille visages, mis à l’honneur par le mythique
Trust en
1980 sur l’album « Répression » avec «
Instinct de
Mort » et « Le Mitard », immortalisé au grand écran par les réalisateurs André Génovès et Jean-François Richet ; Jacques
Mesrine né le 28 décembre 1936 à Clichy-La-Garenne (92) et mort tombé sous les balles de la Brigade de Recherche et d’
Intervention du commissaire Robert Broussard le 2 novembre 1979 Porte de Clignancourt à
Paris s’avère être sans conteste le gangster le plus charismatique et fascinant que la France n’ait jamais connu. Encore présent dans de nombreuses mémoires contemporaines de ses délits dans la région de Compiègne (60) ou il ouvrit en 1967 à Vieux-Moulin un bordel et une salle de jeu clandestine sous l’apparence d’une simple auberge de campagne, opéra à Berneuil-Sur-Aisne un atelier de fausse monnaie, cacha nombre d’armes et de munitions dans une grotte de la forêt de Cuise-la-Motte et enfin s’évada en 1973 du Tribunal de Compiègne en prenant en otage le président de ce dernier grâce à une arme dissimulée dans les toilettes par un complice ; celui qui pratiquait l’évasion d’univers carcéral comme d’autres s’adonnent à la pêche en étang ou au Scrabble le dimanche après-midi a également marqué l’histoire criminelle de la province canadienne du Québec où il fit notamment dans le kidnapping et la séquestration, le braquage d’établissements bancaires bien évidemment mais aussi l’homicide volontaire sur personnes dépositaires de l’autorité publique. Dès lors, comment ne pas s’étonner de l’existence au Canada francophone d’un groupe fier représentant de l’underground grindcore local répondant au sulfureux patronyme de
Mesrine ?
Mesrine se forme au cours de l’été 1997 à Québec City sous le nom de Bean autour du bassiste/vocaliste Christian alias Crocko, du guitariste Fred et du batteur Dan ; trois fanatiques de l’hilarante série télévisée britannique Mr. Bean ayant pour principale velléité musicale de pratiquer un mélange de grindcore old school et de D-beat, un style sonore caractérisé entre autres par des vocaux sous forme de slogans politiques concis, criés et accessoirement incompréhensibles sur fond de punk hardcore à la
Discharge joué au volume maximal si possible. Rebaptisé
Mesrine début 1998 en hommage au célèbre hors-la-loi français, le combo grind connait ses premiers changements de personnel au poste de bassiste/vocaliste notamment avant de multiplier les gigs à partir de l’été de cette même année dans la province ayant vu naître et s'épanouir le cultissime et immuable Voivod. Dan devenu grunter en plus de son job derrière les fûts,
Mesrine enregistre et sort en novembre 1998 une première démo quatre pistes intitulée «
Débile Mental ». Après la sortie en 1999 et 2000 de deux splits 7’’ partagés avec leurs compères bruitistes de
Rot,
Traumatism et
Nyctophobic et l’arrivée de Kevin de
Traumatism justement à la quatre-cordes au sein de son line-up,
Mesrine entre aux Studios Sonum de la rue Bigaouette de la ville de Québec en mai 2000 pour enfanter son premier full length. Ainsi, «
Going to the Morgue » sort au début de l’année 2001 sur le label bordelais Murder Records.
Ah, les charmes indéfinissables du véritable underground extrême, celui des productions subversives que l’on recherche patiemment et inlassablement en version d’origine bien sûr jusqu’au fameux jour tant attendu ou l’on tient enfin en main un disque objet d’un élan de créativité artistique sincère et désintéressé n’ayant rien à voir avec nombre de vulgaires produits de consommation aseptisés des gros labels capitalistes faisant les choux gras des magazines grand public et des têtes de gondoles des supermarchés de l’inculture. Qui ose répondre à cela que grindcore underground (pléonasme ?) rime immanquablement avec inaudibilité et que ce premier méfait sonore de
Mesrine constitue sans doute aucun une torture auditive comparable à celle que subissent les ouvriers extra-européens non déclarés à l’Urssaf du BTP à coups de marteaux piqueurs Makita ? Non, la production de cet inaugural «
Going to the Morgue » s’avère être tout à fait honorable pour être remarquée et peut être même placée sur un piédestal comme l’une des caractéristiques essentielles de ce premier opus du groupe de Québec City ; conférant notamment lourdeur et puissance imparables à la guitare de Fred sans néanmoins jamais se départir de cet indescriptible grain « do it yourself » assurant au tout une indéniable authenticité. Traitant conceptuellement de diverses âmes sombres que l’humanité ait connues et sans doute méritées, «
Going to the Morgue » entame les hostilités avec le titre « Jean-Paul Mercier », sentence sonore grind d’une minute vingt-neuf secondes évoquant comme son nom l’indique et à coups de grunts absolument inintelligibles cf les influences D-beat avouées de
Mesrine le personnage de Jean-Paul Mercier, complice québécois de Jacques
Mesrine avec lequel il s’évada spectaculairement en août 1972 du centre pénitencier de Saint-Vincent-de-Paul avant de braquer diverses banques et de tuer deux gardes-chasses alors qu’ils s’exercent au tir en forêt près de Saint-Louis-de-Blandford. Inspiré, puissant et dénué de la moindre concession, ce court morceau conditionne l’auditeur à l’écoute plaisante d’un disque de grindcore underground qui lui fera incontestablement perdre au fil de ses vingt-deux pistes son humanité et le sens vital de la raison et des réalités de l’existence quotidienne.
Si l’on excepte les quatre derniers morceaux bonus de la galette constituant de fait la première démo de
Mesrine nommée «
Débile Mental » et initialement éditée en 1998, «
Going to the Morgue » comprend la bagatelle de dix-huit pistes oscillant entre vingt-quatre secondes et deux minutes quarante-et-une secondes pour une durée totale d’environ trente-deux minutes. Autant dire que le grindcore et plus précisément ce genre d’opus on ne peut plus représentatif du style possèdent l’avantage de ne jamais lasser un auditeur en principe relativement réfractaire à une vision progressive de la musique metal au sens large du terme, à de rares exceptions.
Mesrine va en effet droit au but et ne perd jamais son temps à faire dans la dentelle malgré la présence en intro ou en outro sur certains morceaux de samples désopilants probablement tirés de divers films et séries télévisées relativement glauques qu’affectionnent certainement les membres dérangés du groupe nord-américain. Globalement et mis à part quelques contre-exemples, chaque piste de ce sympathique «
Going to the Morgue » s’avère être l’occasion d’un hommage à un criminel du Québec ou de Navarre à l’exemple de « Karla Homolka » et de « Paul Bernardo », couple sadique canadien originaire de l’Ontario jugé coupable d’un double meurtre perpétré en 1992 sur deux adolescentes ; « Le Caporal Denis Lortie », ancien membre des Forces Armées Canadiennes qui en mai 1984 prit d’assaut l’Assemblée Nationale du Québec et y tua trois personnes ou encore « Valery Fabrikant », professeur en génie mécanique à l’Université Concordia de Montréal natif de l’ex U.R.S.S. qui tua en août 1992 quatre de ses collègues au cours d’une fusillade particulièrement sanglante. Au sens strictement et quintessentiellement musical du terme, chacun des morceaux constituant le disque sont également et avant tout l’opportunité pour
Mesrine d’offrir à un auditeur conquis un grindcore grave, inspiré, pesant et malsain au possible ; en résumé jouissif à l’instar des très bons et représentatifs de l’opus « L’Abuseur au Pouce Magique » et son vrai/faux mid tempo, « Kendall François », «
Débile Mental » et son introduction à mourir de rire, « Behram » trahissant indéniablement les influences death du combo au travers de riffs aussi lourds que ravageurs et autres « Richard Speck » notamment.
Authentique, glauque, marqué de bout en bout par une atmosphère on ne peut plus lourde et morbide visant à frapper de malaise un auditeur dont le cerveau ne sortira certainement pas indemne de ce voyage sans véritable retour dans les profondes abîmes de la folie criminelle humaine, «
Going to the Morgue » s’avère être une production remarquable de grindcore souterrain constituant en de nombreux points ce qu’est en droit d’attendre l’amateur du style de la part du premier méfait en bonne et due forme d’un groupe ayant osé adopter le sacro-saint patronyme de
Mesrine comme nom de guerre. Criant d’efficacité et de sincérité dans sa démarche, imprégné inénarrablement d’un charme underground légitime et incontestable, «
Going to the Morgue » est à conseiller aux amateurs de véritable metal extrême avides de sensations auditives malséantes. Tabernacle !
Le grind peu etre varié et pas uniquement pour le délire ou pour le bruit.
J'ai hate de te lire de nouveau
Y
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