Liste des groupes Metalcore Allt From the New World

Originaire de Suède, Allt est une toute jeune formation de metalcore. Déjà à la tête de deux EPs, le quintet séduit d’ores et déjà par ses tons moroses et grinçants, en témoigne ses illustrations toutes de noir et blanc vêtues. Il en est de même par des noms (Dark Waters et The Seed of Self-Destruction) aux consonances noirâtres et des narrations tout aussi funestes. Mais là où le groupe brille tout particulièrement provient de son approche musicale, de son impulsion progressive et de sa réflexion autour du thall, une version plus extrême du djent développé par Vildjharta et Humanity’s Last Breath. Au-delà de ses mélodies lourdes, le « sous-genre » se démarque par ses mélodies ambiantes claires, entremêlées par des riffings incisifs ce qui permet de modeler une atmosphère apocalyptique et inattendue.

Cette authenticité et cette excentricité, la maison de disques Century Media l’a rapidement repéré. C’est d’ailleurs avec ce label, après un premier essai en autoproduction, que le quintet suédois a publié sa seconde œuvre The Seed of Self-Destruction, une esquisse qui lui a valu une visibilité mesurée et quelques chroniques élogieuses louant l’immense potentiel de ses membres. Pour confirmer les espoirs posés sur ses épaules, le collectif nous dévoile son tout premier full-length intitulé From the New World. L’album est décrit par le groupe comme une immersion et d’une découverte de soi à la suite d’un cataclysme. L’opus exprime notamment les pressions et les appréhensions du monde et étudie les thèmes de la destruction, de la résistance physique au lendemain de cet effondrement et du tableau émotionnel qui en découlerait.

Dans les faits, cette histoire se traduit par des compositions menaçantes, déchirantes qui font allusion à la désolation, un monde sans lendemain. Pour autant, au sein de ses mélodies, le combo laisse entrevoir quelques espoirs, une empathie par rapport aux précédents événements et une beauté qui semble renaître. Cet optimiste se révèle aussi bien dans les arrangements orchestraux, en atteste l’introduction d’Ephemeral où les notes célestes au piano s’unissent à des connotations nippones, que dans les prestations vocales. Si le growling nous enfonce dans l’obscurité et la tourmente, le screaming et le chant clair assurent un discours harmonieux et conciliant. Aquilla est pleinement dans cette démarche, un grain de voix sensible et porteuse d’un futur rayonnant.

Cependant, le lyrique suit rarement cette délicatesse et expose un regard affligeant. Un titre comme Remnant évoque « l’ombre humaine de la mort » qui caractérise les ombres d’Hiroshima, des corps brûlés dans le sol qui font référence à la bombe atomique visible sur la pochette du disque. Les breakdowns dégagent d’ailleurs ce sentiment d’explosion et d’extinction, certains allant même jusqu’à l’élaboration d’ambiances malsaines typiques du black metal.
Notre quintet suédois nous en fait la démonstration sur la longue panne de Memory Of Light avec un riffing distordu. Les émotions contraires s’entremêlent, aussi bien sur les prestations vocales que sur les différentes couches instrumentales. Le chant chavire entre un guttural profond, intense, oppressant et un screaming fragile, douloureux, souffrant. L’instrumental quant à lui est maussade, même si une de ses enveloppes tente une approche plus mélodique.

La comparaison avec Vildjharta et Humanity’s Last Breath est quasiment inévitable, d’autant plus que les deux formations sont également suédoises. On retrouve cette même créativité sur de nombreux riffs et cette volonté d’instaurer des atmosphères contrastées. La preuve la plus flagrante de cette ressemblance est sans conteste le morceau final Cycles, notamment sur son breakdown où l’arrière-plan éthéré détonne avec des guitares discordantes. Les effets vocaux avant la panne insistent également sur cette perception troublée.
Si cette similitude atténue quelque peu l’effet de surprise, la désillusion est de courte durée car le thall demeure un style de niche exploité par une toute petite poignée de groupes. On peut en revanche critiquer l’absence d’approfondissement dans les compositions, principalement dans les breakdowns. C’est le cas de l’outro d’Aquila où la progression est expéditive, là où on aurait davantage apprécié une prolongation de cette disparité entre les pellicules instrumentales.

En conjuguant puissance brute et atmosphères nuancées, Allt parvient à dépeindre une fresque sonore saisissante, à la fois dévastée et empreinte d’espoir. Avec From the New World, le quintet suédois s’affirme comme un acteur prometteur du metalcore progressif, explore avec bravoure les limites du thall et y insuffle une sensibilité émotionnelle rare. Si quelques faiblesses existent dans l’approfondissement de certaines transitions, elles n’entament pas l’intensité globale de l’œuvre, ni l’authenticité de son propos. Cet album inaugural, lourd de thématiques sombres mais traversé de lueurs mélodiques, trace une voie singulière pour le quintet suédois désormais prêt à s’imposer sur une scène où les talents visionnaires sont rares.