S'il est des formations metal symphonique à chant féminin bien inspirées mais jouant encore dans la catégorie des outsiders, ce jeune groupe allemand en ferait assurément partie, tout comme ses homologues stylistiques et compatriotes
Elvellon,
Once ou encore
Beyond The Black. Toutefois, ce quartet teuton originaire de Karlsruhe, cofondé en 2014 par Markus Neuwirth (guitare, programmation, batterie et choeurs) et Tobias Steinhilper (basse et programmation), souhaite désormais s'en affranchir pour envisager de faire partie des valeurs montantes du metal mélodico-symphonique progressif, particulièrement en vogue dans ces contrées. Et le combo s'est donné les moyens de ses ambitions, à l'instar de « Follow Me », second et rayonnant EP 5 titres, entièrement produit par Markus, succédant au vibrant «
Lost Path », initial EP sorti en 2015.
Ainsi, deux ans d'un travail minutieux en studio ont été requis pour révéler une œuvre, certes encore laconique, mais techniquement plus aboutie, témoignant d'arrangements de bon aloi et d'une indéfectible harmonisation d'ensemble. Ce faisant, le groupe est resté fidèle à ses convictions et à ses courants d'influence, oscillant entre
Nightwish,
Amberian Dawn,
Dark Sarah,
Within Temptation et
Sirenia. On comprend que le collectif germain s'est laissé le temps de mûrir son projet, d'affiner encore ses lignes mélodiques, de diversifier ses ambiances, sans y perdre ni en tonicité ni en volupté. Il a notamment élevé d'un cran le niveau de ses exigences en matière de finesse de composition et surtout de qualité de production, à commencer par un mixage équilibrant à parités égales instrumentations et lignes de chant. On observera également un enregistrement particulièrement soigné, où les notes résiduelles sont devenues peau de chagrin.
Autres indices révélateurs de son évolution : d'une part, devant répondre aux nouvelles orientations du projet, le groupe a récemment intronisé la frissonnante soprano Johanna Braun (en remplacement de la mezzo-soprano Anna Plummer), également auteure des paroles de chacun des titres de l'opus. Avec la participation de l'impressionnant claviériste Niklas Mathes sur «
Pale Flowers ». Quant à l'artwork de la cover, relevant de la patte d'un certain Jan Yrlund (
Amberian Dawn,
Dark Sarah,
Sirenia...), il privilégie les couleurs chaudes et une posture plus frondeuse de la frontwoman ici sollicitée, celle-ci faisant mine de nous intimer de la suivre ; à l'image du titre de l'album et de la dynamique cette fois résolument incisive ressortant des 23 minutes de la brûlante rondelle.
Les amateurs de tubesques instants trouveront de quoi étancher leur soif, le groupe ayant souvent opté pour un metal symphonique accessible, aussi énergisant qu'élégant. A commencer par l'entame de la menue galette. Ainsi, dans le sillage atmosphérique de
Dark Sarah, sous-tendu par des nappes synthétiques typiquement nightwishiennes, le classieux mid tempo progressif «
Will O' the Wisp » dévoile un grésillant et ondulant riffing évoluant dans un champ de turbulences instrumentales qui, lentement, gagne en intensité et en flamboyance. Parallèlement, nous attirent les angéliques volutes de la sirène, à mi-chemin entre
Heidi Parviainen (
Dark Sarah), au regard de son délicat vibrato, et Emmanuelle Zoldan (
Sirenia), eu égard à ses envolées lyriques. On comprend dès lors que le groupe a placé la barre haut, à l'instar de ce hit en puissance, qui n'invente rien mais qui poussera à une inconditionnelle adhésion les aficionados de ses sources d'influence. A la façon d'un
Nightwish de la première heure, lui aussi, au regard de ses arrangements, le mid tempo syncopé et progressif «
Lullaby », par ses couplets bien ciselés relayés par des refrains catchy, happe sans mal le tympan. Surtout, on reste stupéfait par la facilité avec laquelle la soprano tutoie les notes les plus haut perchées, avec une tenue de note ne souffrant d'aucune approximation, notamment sur les gradations, exécutées avec maestria.
Dans une dynamique plus enjouée, avec une certaine aisance affichée, nos gladiateurs font mouche. Ainsi, l'entraînant « Fly with Me », dans l'ombre d'un
Within Temptation des premiers émois, avec un zeste de
Xandria (première période) quant à ses harmoniques, s'il laisse une impression de déjà entendu, n'en demeure pas moins efficace de par ses refrains immersifs à souhait, mis en habits de lumière par les limpides et touchantes inflexions de la déesse. Et la sauce prend une fois encore. On regrettera cependant l'abrupte césure en fin de piste, rompant prématurément la joviale dynamique d'ensemble.
Par ailleurs, nos compères ont su jouer des effets de contraste pour nous rallier à leur cause. Ce que démontre précisément le tortueux mid tempo «
Shadow of the
Moon » qui, dans la lignée sympho gothique d'
Amberian Dawn (seconde mouture), distille d'intarissables riffs corrosifs conjointement à un convoi orchestral se plaisant à nous bringuebaler. Par contraste, les cristallines et ondoyantes impulsions de la belle s'infiltrent tout comme une chorale semblant venue de nulle part. Doté de moult changements de tonalité, de variations rythmiques bien amenées, le morceau interpelle. C'est dire que les effets de surprise sont au rendez-vous de nos attentes. Une piste qui, à sa façon, parvient à nous retenir dans ses filets.
Lorsqu'il touche aux moments intimistes, le groupe surprend par sa faculté à nous émouvoir. En toute humilité, il magnétise alors nos âmes pour mieux s'en emparer et nous faire plier l'échine. Dans cette mouvance, les aériens arpèges au maître instrument à touches dispensés par Niklas ont pour corollaire les gracieuses et caressantes patines oratoires de la maîtresse de cérémonie sur «
Pale Flowers » ; émouvante ballade atmosphérique d'inspiration à la fois classique et pop que pourraient bien lui envier ses pairs,
Once et
Beyond The Black en tête. Le chaland déambule alors dans un véritable havre de paix investi de délectables séries d'accords où toute fausse note est proscrite, laissant entrevoir une légère et opportune progressivité rythmique. Bref, un exercice dans lequel excellent nos acolytes, susceptible de laisser à distance la concurrence.
Force est de constater que, depuis ses débuts, le groupe a progressé tant dans la richesse de ses compositions qu'en ce qui touche aux conditions, quasi optimales, de leur mise en valeur. Aussi, on découvre un propos fringant, prégnant, aux ambiances variées, aux mélodies savamment élaborées, témoignant d'une habileté technique supérieure à ce qu'elle fut au regard de leur premier méfait. En outre, la délectable contribution de l'interprète ne saurait se faire oublier sur la trop courte durée de ce message musical, s'avérant en totale osmose avec le corps instrumental. Malgré ces qualités, on a le sentiment que le potentiel artistique du combo n'est pas encore exploité à son maximum et qu'il devra faire preuve d'un poil d'originalité supplémentaire pour se démarquer plus largement de la concurrence s'il souhaite embrasser une carrière à long terme. Peut-être à l'aune d'un album full length, cette fois ?...
Les 2 EP sont en écoute intégrale sur leur site.
Je préfère la voix de la nouvelle chanteuse.
Vivement l'album.
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