Parfois, la seule détermination du patronyme d'une formation musicale est loin de s'apparenter à un long fleuve tranquille, dont celle de ce groupe de metal symphonique folk originaire de Donostia-San Sebastián, dans le pays basque espagnol : depuis sa création, en 2010, et jusqu'en 2014, le groupe se nommait alors
Legacy ; dénomination qui se muera en Unforgotten
Legacy entre 2016 et 2017, pour un retour aux sources entre 2020 et 2023. Et c'est seulement suite à la réalisation de sa première démo, «
Eternidad , que le combo se nommera
Legacy Of The Seas. Quelques mois plus tard à peine naîtra un EP éponyme de cette démo ; auto-production de cinq titres, incluant les deux pistes issues de sa devancière, en titres bonus, elles-mêmes ayant été remastérisées et insérées parmi les trois premiers morceaux de la rondelle. Cela étant, quelles seraient les armes de nos acolytes pour espérer se jouer de l'âpre concurrence dont ce registre metal continue de faire l'objet ?
Dans ce dessein, et suite à de nombreux changements de line up, le collectif ibérique réunit aujourd'hui les talents de : Laura Peralta au chant principal sur les trois premiers titres, suivie de Loinaz Merino, sur les pistes bonus ; Alex González (Mandrabera, ex-Krait, feu Tarmelaÿn...) à la guitare et à la basse ; Julen Cestero (feu Tarmelaÿn) aux claviers ; Juan Pedro Pérez (Khymaira, Neura, ex-
Blast Wave, feu Tarmelaÿn...) à la batterie. De cette étroite collaboration émane un propos metal symphonique folk à la fois enjoué, rayonnant et romanesque, au carrefour entre
Diabulus In Musica,
Arven,
Coronatus,
Midnattsol,
Evenoire et
Lyriel. S'il bénéficie d'un mix bien ajusté entre lignes de chant et instrumentation, cet opus accuse cependant un manque de profondeur de champ acoustique quand quelques finitions manquent encore à l'appel. Mais suivons plutôt nos acolytes dans leurs pérégrinations...
C'est dans une atmosphère des plus joviales que le groupe se plaît tout d'abord à nous projeter, non sans nous amener à esquisser un irrépressible pas de danse. Ainsi, « Zarcanás, el Visigodo » se pose tel un entraînant up tempo aux riffs crochetés adossés à une frondeuse rythmique ; égrainant de sémillants arpèges d'accords que suivent les cristallines inflexions de la sirène, et recelant un pont techniciste bien amené, empreint d'une flûte de pan et d'un saxo samplés, de truculentes rampes synthétiques et d'un vibrant solo de guitare, sans oublier quelques notes acidulées échappées d'un accordéon des plus avenants, cette plage endiablée ne se quittera qu'à regret. La version démo, quant à elle, témoigne d'une production plus lacunaire, dont davantage d'effets de compression. Par ailleurs, la basse tonalité des médiums de Loinaz s'avère moins en phase avec l'atmosphère quasi festive de cette plage, que ceux, plus haut perchés, de sa successeuse.
Lorsque le convoi instrumental ralentit un tantinet la cadence, la troupe parvient à nouveau à nous retenir, un peu malgré nous. Ce à quoi nous sensibilise «
Ragnarok », mid/up tempo épique et roots aux riffs épais, à la confluence de
Diabulus In Musica,
Arven et
Evenoire. Pourvu d'enchaînements intra piste ultra sécurisés et d'un break opportun souligné par de délicats arpèges pianistiques, alors prestement balayé par une bondissante reprise sur la crête d'un refrain immersif à souhait mis en exergue par les angéliques impulsions de la déesse, ce chatoyant effort poussera à un headbang bien senti. Autant de points de force déjà relevés à l'instar de l'originale, pour laquelle les troublantes volutes de Loinaz colleraient davantage avec l'ambiance chevaleresque du manifeste.
Quand ils nous mènent en des espaces tamisés, nos compères se muent alors en de véritables bourreaux des cœurs en bataille, nous livrant par là même leurs mots bleus les plus sensibles. Ce qu'illustre « The
Forest of the
Visigoth », ballade romantique jusqu'au bout des ongles que n'auraient sans doute reniée ni
Midnattsol ni
Arven. Sous-tendu par de seyantes gammes au maître instrument à touches, et glissant le long d'une radieuse rivière mélodique sur laquelle se greffe le frissonnant vibrato de la maîtresse de cérémonie, l'instant privilégié comblera assurément les attentes de l'aficionado de moments intimistes.
En définitive, le combo espagnol nous immerge au cœur d'un propos aussi jovial et épique qu'empreint d'élégance, où s'esquissent d'engageantes lignes mélodiques doublées d'une technicité instrumentale bien rodée. Pour espérer happer durablement un tympan déjà accoutumé aux vibes de leurs maîtres inspirateurs, nos acolytes devront cependant relever leur niveau d'exigence en matière d'ingénierie du son, davantage varier leurs exercices de style qu'ils ne l'ont fait, et consentir à l'une ou l'autre prise de risque. Si un réel potentiel se dessine à l'aune de ce premier mouvement, il s'avère donc encore prématuré de placer ce collectif parmi les sérieux espoirs de ce registre metal. Bref, une introductive offrande délicieusement trépidante et empreinte de délicatesse, un brin expérimentale...
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