Erroneous Enlightenment

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Nom du groupe Methadrone
Nom de l'album Erroneous Enlightenment
Type Demo
Date de parution 2004
Style MusicalDrone
Membres possèdant cet album2

Tracklist

Limited to 222 copies.
1. Dozer
2. Erroneous Enlightenment
3. Placebo
4. Contaminate
5. Affliction
6. Dextropropoxyphene

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Methadrone


Chronique @ TasteofEternity

15 Juillet 2013

« Les 40 jours dans le désert ne sont rien à côté de ce qui vous attend ici »

Il n’est pas chose aisée de rentrer dans la galaxie musicale du sulfureux Craig Pillard (ex-Incantation, Womb, Disma, Disciples of Mockery, Carnage…) véritable pilier de la scène extrême underground du New-Jersey (NY). En 2004, il revient avec le projet assourdissant Methadrone qui a pour objectif de repousser les limites du son au prix d’une composition chimiquement complexe mêlant doom, indus et drone (bien loin du death qui a fait sa renommée). Pour être un peu plus précis, Methadrone se situerait à la croisée du dark/ambient de Lustmord, de l'indus de Laibach et de l'expérimentation version Swans (auquel le groupe rend hommage sur Retrogression en reprenant le titre Sex, God, Sex).

Pour tenter de saisir l’essence de Methadrone, un flashback s’impose. Lorsqu’il quitte Incantation en 1994, Craig Pillard en profite pour embarquer le bassiste Ronnie Deo et le batteur Jim Roe, afin de monter Womb, un projet doom qui aura la particularité d’officier déjà avec deux basses, et sans guitare. Le groupe sortira une démo passée inaperçue en 1995, puis un split en 2001 en compagnie d’un autre rejeton du sieur Pillard, Disciples of Mockery de manière très confidentielle mais prometteur. Puis Womb disparaît, et Methadrone surgit alors de l’ombre. De l’aveu de son propre maître, Methadrone n’est pas à considérer comme le prolongement de Womb, même s’il en reprend certaines composantes (les deux basses et le côté doom) mais comme une expérience encore plus poussée et personnelle. Cette fois-ci, Craig Pillard (vox, lead bass, drum programming) n’est plus accompagné que par un seul de ses acolytes Randy Stokes (rythm bass), présent aussi dans Disma.

Maintenant que le décor est planté, plongeons au cœur du processus. Comme le laisse présager le nom du groupe, le drone tient une part décisive dans la musique de Methadrone, mais non exclusive. C’est en effet le doom qui domine l’ensemble à travers les riffs sombres et massifs développés par la lead bass dans un environnement typé indus accentuant l’aspect froid et mécanique. Le drone en définitive est la note finale qui va permettre l’éclosion d’atmosphères à la fois profondes, et suffocantes, et donner naissance à des paysages désertiques. Petit rappel, le drone est une musique minimaliste qui joue sur la résonance et la répétition afin d’opérer une perte totale de repères de l’auditeur dans le but de rétablir une relation directe et naturelle (c’est-à-dire intuitive et non intellectuelle) au son. Le paradoxe (en apparence !) résidant dans le recours à l’indus, donc à des sonorités ô ne peut plus artificielles, pour rétablir ce lien. Le drone initialement est un son continu. Transposé dans le metal, cela se matérialise par un bourdonnement qui ne cesse de s’amplifier au fil des boucles sonores hypnotiques et éthérées, qui dans le cas de Methadrone deviennent des vagues d’ondes sonores qui agressent et infectent l’auditeur allant jusqu’à le faire vaciller dans ses convictions les plus profondes. C’est ici que l’emploi des deux basses marque toute sa spécificité, et son efficacité, en plus de permettre de s’accorder dans une tonalité très basse, en jouant sur l’hyper saturation et les infra-basses ad nauseam.

Mais jusque là, on a fait qu’effleurer toute la puissance et l’originalité de Methadrone. En effet, le patronyme du groupe ne fait pas qu’indiquer le style de musique, il en délivre aussi le sens, je m’explique. On ne peut manquer d’observer que Methadrone est un néologisme fabriqué à partir du préfixe grec metha (au-dessus) et du suffixe drone, mais aussi et surtout renvoie au terme méthadone (analgésique de synthèse très controversé, voisin de la morphine, proposé dans le sevrage des héroïnomanes, devenu à son tour sujet à addiction). Et c’est là qu’une nouvelle dimension s’ouvre à nous, Methadrone devenant un processus musical révélateur des distorsions causées par un tel traitement. Sans verser dans l’interprétation fumeuse, les titres des chansons (et la bio de Craig Pillard) justifient une telle approche : Dozer, Placebo ou encore Dextropropoxyphene. La musique de Methadrone témoigne des effets induits par la prise de ce type de traitement de substition dans le cadre d’une cure de désintoxication. Elle nous immerge méticuleusement dans un chaos sonore symptomatique des « effets indésirables » caractéristiques de ce type de traitement, Contaminate et Affliction ne laissent aucun doute à ce sujet. De la complainte de Craig Pillard à la voix méconnaissable, vide d’humanité et à la tessiture d’outre tombe, en passant par la lead bass qui se fait plus tranchante et grinçante, alors que sa jumelle rythmique broie le peu d’espoir qu’il nous restait, chaque note sonne le glas du pauvre hère qui a osé s’aventurer dans des contrées où seule règne la désolation, avec le vertige et la nausée comme uniques compagnons de route. Et quand on pense en être sorti, à l’écoute de quelques notes enchanteresses (intros de Dozer & Placebo) introduites par des sonorités qui rappellent la douce et mélodieuse voix des sirènes qui tentaient de charmer Ulysse, le piège ne fait que se refermer un peu plus. La musique se fait alors anesthésiante, annihilant nos dernières résistances pour nous plonger dans l’extase des paradis artificielles. Dans ces conditions chaque élément devient une source de danger potentiel, le poison est distillé à tous niveaux. Que retirer d’un tel périple hormis le fait de rappeler un enseignement connu de tous et qui bénéficie d’un nouvel éclairage grâce à cette démo que le remède peut être parfois pire que le mal…

En conclusion, cette première démo naviguant entre différents styles surprend par son intensité et sa gravité. Le décalage entre les différentes atmosphères donne l’impression d’une œuvre inachevée voire disparate alors qu’elle ne fait que retranscrire les états mentaux délétères dans lesquels elle nous projette sans complaisance. C’est dérangeant, dévastateur, mais surtout implacable car maîtrisé de bout en bout. Plus qu’une simple expérimentation, nous avons à faire à un témoignage d’une descente aux enfers qui n’en finit pas… Perdu quelque part entre la lobotomie salvatrice et un syndrome de persécution jouissif, le délire s'échafaude jusqu'à devenir l'unique issue possible.

Saisissant.

2 Commentaires

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ZazPanzer - 17 Juillet 2013: Deux gars qui détiennent cet objet rare, et deux chroniques, il doit y avoir un truc ! Et tu le décris fort bien, comme toujours. Encore un disque qui remue les tripes, qu'on ne peut apprécier que lorsqu'on a difficilement trouvé sa porte d'entrée... Merci pour cette incursion dans le Noir.
TasteofEternity - 17 Juillet 2013: Merci Zaz', effectivement une fois le doigt dans l'engrenage Methadrone, difficile de ne pas se laisser emporter dans l'oeil du cyclone qui offre une perception vraiment différente. Il fallait que j'écrive quelque chose dessus tant pour rendre hommage au concepteur de l'oeuvre qu'à Svartolycka qui m'a donné l'envie de découvrir ce groupe.
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Chronique @ Svartolycka

26 Mars 2006
Methadrone est un groupe à classer, à l’instar de Nadja dans le registre d’un drone-sludge monolithique et hypnotique. Cependant, cette (brève) comparaison s’arrête ici-même, car si le groupe américain peut, d’une certaine manière, se rapprocher de la musique d’Aidan Baker, Methadrone serait plutôt une némésis maléfique ou du moins plus agressive du Canadien.
Vestige d'un ancien groupe auquel officiaient déjà Greg Pillar et Randy Stock, ce nouveau groupe est le prolongement logique de ce qui était déjà en œuvre auparavant.

Surprenant, Methadrone l’est assurément. Décrire la musique du groupe n’est pas vraiment chose aisée. En effet, les compositions suggèrent un doom hybride à la sonorité pour le moins particulière, métallique et décalée. Le fait que la voix de Greg Pillar soit rauque renforce cet aspect, car, il faut le dire, Methadrone contient les règles fondamentales à tous combos de doom qui se respectent. Tempo très lent, sonorité en écho renvoyant un à « ailleurs », voix sépulcrale et ambiance éthérée en amont, le cahier des charges est rempli. Cependant, plusieurs écoutes font sentir que le « doom » de Methadrone n’est en fait qu’une toile passée en filigrane dans la structure des titres. Oui, les bases sont là, mais le groupe est en constant mouvement et recherche par-dessus tout une sonorité, un son singulier qui le fait sortir du lot. La raison, une absence totale de guitares remplacée ici uniquement par deux basses (Je précise que le groupe n’est en aucun cas pionniers en la matière, en effet, Necromantia travaillait ses morceaux avec la même matière) triturant infra-basses et échos déformants pour un résultant tout simplement bluffant.

Methadrone est, ni plus, ni moins qu’une recherche métaphysique ("Meth." et "Drone", faites l’assemblage) sur le son même (environnant, organique et mécanique). Les effets conjugués donne certes une charge plus agressive, mais surtout, parviennent à insuffler un caractère immatériel tout simplement immense. Il est d’autant plus ahurissant que l’on a cette impression innéfable et immersive de naviguer au milieu de paysages hivernaux au milieu d’une déformation métallique. Expérimentation sans borne, « Erroneous Enlightnment » vire à l’abstraction la plus totale par ces sons changeants sans cesse donnant ainsi le sentiment d’un étirement sonore prodiguant une intensité drone marquante… Jamais le sens du mot « drone » (bourdonnement) n’a été à ce point questionné…

Plus qu’un album, cet objet est au final une mise en abyme, un déplacement total, conceptuel et profond (voir existentiel) dont les sonorités hybrides (entre l’éthéré et le compact) hantent pendant longtemps, plongeant celui qui l’écoute dans une mer de sons tordus, sinueux et difformes…
Je ne sais pas quoi ajouter… ?
Jetez vous dessus ou bien… oubliez…

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