Parmi les rares formations metal gothique lettones à venir se lancer dans l'arène s'inscrit ce discret mais prometteur combo originaire de Riga. Né en 2006 d'une idée originale du guitariste/vocaliste
Vlad Pucens, dont le nom fut influencé à la fois par les goûts musicaux et les thématiques chères à son concepteur, telles que la mort, l'amour, la passion, la solitude, la misère, entre autres, Everlust évolue dans un registre rock'n'metal gothique mélodique aux relents doom, dans le sillage de
Lacuna Coil,
Trees Of Eternity,
Theatre Of Tragedy,
The Flaw,
The Gathering,
Darkwell,
Mandragora Scream,
Flowing Tears,
The 69 Eyes et consorts. Si le style s'est affermi et l'expérience scénique solidifiée au fil du temps, l'histoire de ce collectif est loin de s'apparenter à un long fleuve tranquille...
Alors dans l'incapacité de créer un groupe au line up bien défini,
Vlad sortit en 2007 une démo à titre personnel, «
Unreal » ; s'ensuivit une période de latence de 6 ans avant de voir le groupe se former. Après plusieurs changements de line-up, le groupe commença à se produire, enchaînant concerts metal, acoustiques et festivals sur la scène locale dès 2014, avant de se voir attribuer un ''Rock'n'Roll Award'' au festival ''Osvalds 2015''. Tout en démarrant les enregistrements de son premier album studio, «
Hurts to Live », la troupe continua à essaimer ses concerts aux quatre coins de son pays natal en 2016, avant de se produire en Lituanie, l'un de ses pays voisins, et de finaliser la réalisation de son opus, un an plus tard. Porté par ce déjà solide background, le combo réalisera en 2018 le clip de « Undead », l'une des dix pistes de la galette. Alors à la barre, la chanteuse aux chatoyantes inflexions, Natalia Shevckuk, quittera le navire peu après, alors prestement remplacée par Kate Brown, une chanteuse au cristallin grain de voix. C'est là la première page d'une nouvelle histoire...
Suite à une refonte de son équipe, le line-up ne se stabilisera qu'en 2019,
Vlad et Kate se voyant dès lors assistés de Max Reksna à la guitare rythmique, Alex Shangin à la batterie, Pavels Savins à la basse et Andrew Jirgensons aux claviers. Et voici le groupe prêt à arpenter les routes, investir les planches de la scène metal et travailler sur un nouveau matériau. De cette fraîche mais étroite collaboration émanera, en mars 2021, le clip de «
Land of Dreams », l'un des 11 titres de son second album studio, «
Diary of Existence » ; une intrigante et enivrante galette d'une durée quasi optimale de 47 minutes signée, cette fois, chez le prolifique label italien Wormholedeath Records, et jouissant d'une production d'ensemble de fort bonne facture, à commencer par une qualité d'enregistrement difficile à prendre en défaut. A l'aune de cette offrande, sans pour autant avoir changé leur fusil d'épaule, il semble que nos acolytes soient entrés dans une tout autre dimension...
C'est sur un tempo refréné que s'effectue le plus clair de la traversée, le combo se plaisant alors à essaimer ces intrigants mais enveloppants arpèges d'accords qui, longtemps après y avoir immergé le pavillon, vous resteront gravés en mémoire. Ainsi, passé «
Gemini », un cauchemardesque et sarcastique, et, somme toute, dispensable effort, le ''lacunacoilesque'' mid tempo «
Land of Dreams » plongera le chaland au cœur d'un bain orchestral aux doux remous à peine interrompu par de fugaces accélérations rythmiques. Mis en habits de lumière par les claires modulations de la sirène, alors apparentées à celles d' Anna Stefanowicz (feu
Unsun), couplets finement ciselés et refrains catchy glisseront avec célérité dans le tympan du chaland. Dans cette veine, on retiendra également l'engageant et progressif « Alone » eu égard à une sente mélodique toute de nuances cousue et au fin legato dispensé par le lead guitariste. Moins immédiatement lisible mais guère moins gracieux, dans la veine de
Trees Of Eternity se glisse l'énigmatique et seyant mid tempo atmosphérique gothique « I
Never Was », une soyeuse et poignante piste cristallisant une véritable invitation en d'oniriques contrées, en somme...
Dans une même énergie, lorsque le regard se tourne plus volontiers vers des rivages doom mélodique gothique, nos acolytes trouvent là encore quelques clés pour nous rallier à leur cause. Ainsi, non sans évoquer
The Flaw, avec quelques relents de
Lacrimas Profundere (première période), dans un climat obscur, un brin souffreteux, l'éthéré et mélancolique «
Despair » tout comme l'évanescent et déchirant «
Entwined » déploient leurs riffs massifs greffés sur une rythmique éminemment lascive. Magnifiant d'hypnotiques séries d'accords estampées doom gothique, le duo mixte en voix claires évolue en parfaite osmose, nous amenant dès lors à une remise du couvert sitôt l'ultime mesure de chacune de ces plages envolée.
Quand le rythme de ses frappes se fait plus véloce, la troupe parvient à nouveau à aspirer le tympan. Ce qu'illustre, d'une part, « Running », un mid/up tempo aux riffs crochetés adossés à une frondeuse rythmique et recelant d'insoupçonnées montées en régime du convoi instrumental. Doté parallèlement d'un fin picking à la guitare acoustique et des serpes oratoires de la belle ici muée en une redoutable prédatrice, le saillant méfait à la confluence de
Lacuna Coil,
Darkwell et
The Gathering aura peu de chances de rater sa cible. Dans cette dynamique, on ne saurait davantage éluder « Everlust », un vibrant manifeste gothique mélodique dans la lignée de
The 69 Eyes, impulsé, lui, par la claire empreinte de
Vlad, et recelant de grisants gimmicks guitaristiques typés brit pop mid-80s. Un poil plus surprenant, le bref mid/up tempo aux riffs grésillants «
Destroyer », quant à lui, joue à plein sur les effets de contrastes atmosphériques, rythmiques et vocaux pour tenter de l'emporter. Une prise de risque parfaitement assumée par nos valeureux guerriers, qui pourrait bien faire quelques émules mais aussi déconcerter les tympans moins avertis.
L'aficionado d'instants tamisés ne sera pas plus laissé pour compte, nos gladiateurs se muant dès lors en de véritables bourreaux des cœurs en bataille. A commencer par « Writings on the Wall », somptueuse ballade atmosphérique empruntée à Sam Smith, mise en relief par les rocailleuses patines de la maîtresse de cérémonie. Ce faisant, la version soft gothique de la ''jamesbondienne'' offrande lui confère à la fois sa singularité sans en dénaturer ni son enivrante teneur mélodique ni ses invitants arpèges d'accords. Dans un registre plus classique, d'une confondante légèreté et des plus soyeuses, la laconique ballade a-rythmique « 8 » unit de délicates gammes au piano à de ''siréniennes'' vocalises féminines. Un instant privilégié propice au total enivrement de nos sens insufflé par nos compères.
Au final, le combo letton nous livre un propos à la fois frissonnant, troublant, un brin obscur et romantique, bénéficiant d'une ingénierie du son plutôt soignée mais nullement aseptisée. Varié sur les plans atmosphérique et vocal, l'opus témoigne par ailleurs de lignes mélodiques finement esquissées et d'une technicité instrumentale déjà affermie. D'aucuns auraient peut-être souhaité un panel plus étoffé en matière d'exercices de style, davantage de diversité rythmique ainsi qu'un zeste d'originalité supplémentaire pour se sustenter. Mais nos acolytes ont encore le temps d'affûter leurs armes pour dépasser ces carences et se placer parmi les valeurs montantes de ce registre metal. Pour l'heure, au regard de cette sensible et grisante rondelle, la formation balte pourrait dores et déjà se hisser parmi les sérieux espoirs avec lequel la concurrence devra composer...
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