Pour beaucoup, la formation germanique « Varg » a débuté à partir de son chef d’œuvre «
Wolfskult ». Pourtant, deux albums lui ont précédé, et deux autres à ce jour lui ont succédé. Avec «
Guten Tag », sorti en
2012, on avait assisté à une baisse de régime, mais la nouvelle notoriété acquise restait suffisamment intacte pour signer chez le mastodonte
Napalm Records. C’est chez eux que l’on a vu éditer l’étonnant EP « Rotkäpchen » consacré au petit chaperon rouge dans tous ses états. C’est de nouveau chez
Napalm que le cinquième ouvrage de « Varg » voit le jour. Peut-être une nouvelle étape qui mènera la troupe de Freki au plus près des grandes formations du genre ? En fait, un faux pas. L’album nommé «
Das Ende aller Lügen » utilise une deuxième version tout en anglais de ses chansons, comme l’avait fait «
Korpiklaani » pour le malheureux « Manala ». Effort presqu’inutile, visant tout au plus à se projeter sur une scène élargie, mais en fait faible en conséquence. On connaissait déjà le ressentiment du groupe vis-à-vis de l’idéologie national-socialiste, notamment. Avec, cet album, il va plus loin encore qu’un simple rejet et bâti un véritable plaidoyer politique qui, ingénu, abonde de clichés en tous genres. On pourrait se dire, qu’il y a la musique pour compenser. Seulement, voilà…
L’introduction, vous la connaissez. Que ce soit en allemand ou en anglais, ceci est un extrait du fameux discours de Charlie Chaplin clôturant son prestigieux film de 1940 « Le Dictateur ». « Varg » ajoute tout au plus quelques touches froides de claviers au départ, pour se transformer en montée symphonique au fil de l’énergie dégagée par des paroles pleines de bonté et d’espoir pour l’humanité. Un discours éclatant, qu’aucun de nos politiques actuels n’est plus capable de produire, n’ayant point empêché à l’époque la suite de ce que l’on connait et sortant de la bouche d’un simple acteur de cinéma. On se questionne donc de la portée ou du sens de cette introduction pour un album de « Varg ». Cela annonce tout bonnement une suite aux paroles engagées, premièrement avec le titre éponyme, qui a fait l’objet d’un clip, incluant d’ailleurs l’introduction. «
Das Ende aller Lügen » fait une entrée fracassante, tout en puissante, avec un chant emporté et aura même quelques contours d’hymne en refrain. Les riffs sont tranchants et parfaitement exécutés. Cela aurait juste mérité d’être davantage développé.
Seul « Wintersturm » le dépasse en furie, en violence. Celui-là incorpore en supplément un léger fond atmosphérique, et le riffing syncopé y est plus marquant.
« Varg » fait sa singularité de ce soupçon de core qu’il incorporait au gré de ses morceaux. Que ce soit avec « Wintersturm », mais également par le biais d’autres extraits de l’opus en question, on peut observer un gain de la présence du core en comparaison des précédents ouvrages. « Revolution » en fait état en proposant un mélange nerveux entre death mélodique et metalcore. Cela occasionne sur la piste des coupures très nettes. Cela dit, le titre par lui-même se montre assez répétitif. C’est encore pire si on s’en tient au lourd et sombre « Achtung », reflétant lui aussi un mélange (moins consistant) death mélo/metalcore pour ce qui est des couplets. A vrai dire, ça tournerait même en rond. On s’en tient à une valeur quasi-similaire pour l’autre morceau ayant fait l’objet d’un clip, «
Dunkelheit », disponible aussi visuellement sous sa version anglaise «
Darkness ». «
Dunkelheit », donc, s’illustre comme un black death qui aurait parfois un peu de mal à s’envoler. Nous apprécierons en fait davantage sa seconde moitié beaucoup plus relevée. Cette grande nervosité propre à « Varg » est parfois alliée à des phases épiques, notamment des chœurs solennels, perceptibles en entame et en refrain. Cela permet de temporiser la tension et d’enrichir le titre.
On appréciera sans ambages la venue des chants clairs. Le premier à vraiment nous interpeller sera celui, pimpant, sur « Streyfzug ». Titre mid-tempo, mais assez détonnant, aux chants scandés comme si on avait là un hymne. Il impose également une chouette incartade acoustique en break. Dans les chants clairs, on note l’apparition du chant féminin sur le morceau «
Totentanz », ouvrant sur le son d’une boite à musique, et prenant ensuite tout son temps, faisant peser chaque note, comme pourrait le faire un notable «
Draconian » par exemple. La seconde moitié de morceau propose toutefois un changement de rythme, plus soutenu. Parmi ces titres sages usant du chant clair, on retiendra avec une certaine empathie « Ascheregen », délivrant un gros rock froid, affirmant une entière détermination, malgré une tournure un brin mélancolique. Cet extrait jouera excellemment le rôle de power-ballade de conclusion. Un extrait fort, intense en émotions, que l’on retiendra aux côtés du très sérieux « Streyfzug » dans les meilleurs instants d’une galette qui n’aura pas évidemment brillé pour son strict metal extrême, ni rempli tous ses espérances.
Que reste-t-il de tout ça ? On s’attendait à un effort puissant musicalement, mais aussi apolitique. Une chanson engagée c’est casse-gueule, néanmoins pour fonctionner cela doit s’accompagner de subtilité dans les mots choisis, du choc des images pour influer sur les consciences. Force est de constater que la musique de « Varg » est tout sauf subtile. Pire encore, le message laissé n’en est pas vraiment un et se terre dans des poncifs grossiers terriblement loin des paroles, certes utopiques, mais ô combien magnifiques de Charlie Chaplin sur cette fin de film inégalable. De ce que l’on retient vite fait : La guerre, ce n’est pas bien. La chasse non plus. Nazis méchants ! Pegida = Hitler = pollution = enfants tristes du Tiers Monde ! Ça perd tout en crédibilité, et on devine très vite que le groupe a manqué de discernement et de finesse. En musique, toutes les opinions se valent, à condition de ne pas plonger dans les caricatures enfantines et de ne pas être trop manichéen. Il n’y a qu’à voir les clips, on retrouve « Varg » chaussé de gros sabots. « Varg » croit corps et âme en l’humanité, mais la volonté de renverser un dictateur a occasionné la mort et la terreur dans bien des pays, la générosité envers des pauvres êtres a été à l’origine de multiples troubles et de la poussée de la haine. « Varg » ne se souviendrait-il plus que l’Homme est un loup pour l’Homme? A écouter ce volume, on devine qu’il n’a toutefois pas perdu tout son mordant, mais quelques crocs seraient partis. De tout ça, il ne reste que la fadeur laissée par quelques mots angéliques.
13/20
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