Re-Animator,
Xentrix,
Acid Reign,
Onslaught,
Anihilated, D.A.M. Tout autant de groupes britanniques qui parvinrent lors de la seconde moitié des années
1980, mais dans le quasi anonymat, à conférer une véritable identité au Thrash anglais. Celui-ci se démarque de son homologue américain par un recours plus prononcé à des ambiances progressives voire dépressives.
Re-Animator, formation originaire de
Hull, port de la côte ouest du Royaume ne fait pas exception et s’inscrit pleinement dans ce bon vieux Thrash old-school. La musique est spontanée, artisanale et n’est volontairement pas carrée. Comme d’autres albums de la période, il comporte quelques petits défauts qui font tout son charme. Au détour de chaque morceau, le combo apporte sa pierre à l’édifice du Thrash, non sans bien sûr puiser ci et là quelques influences dans d’autres formations de l’époque. Mais ce qui fait la virtuosité de ce
Condemned to Eternity réside indéniablement dans sa capacité à transposer très efficacement des mélodies soignées et émotionnelles par-dessus une rythmique incisive. Le chant quant à lui n’est pas alambiqué, variant assez peu, mais n’en demeure pas moins efficace.
L’enchaînement des titres a été bien rôdé, alternant intelligemment temps forts et temps faibles, le lien se faisant assez naturellement entre les morceaux, et à aucun moment on ne ressent une sensation d’ennui.
Du moins seul le titre "What The Funk" est à mettre au rebus, car ressemblant plus à une démo faisant la part belle à des riffs enchainés sans cohérence et qui trouble la formidable progression entamée jusqu’alors.
"Low
Life" ouvre le bal en lorgant d’entrée sur une rythmique à la Sodom conjuguée au côté feu follet des solos de
Kirk Hammet sur le
Kill’em all de
Metallica. "
Chain of Command" ne relâche pas l’attention grâce à des riffs entêtants à souhait. Survient alors l’un des pilliers de l’album, soit "Room 101", titre inspiré par la chambre de torture du même nom dans le roman "1984" de George
Orwell. C'est là que l’on commence à cerner ce petit plus qui forge un son si spécial chez tous ces groupes anglais pré-cités , bien qu’ils aient pu aller piocher quelques riffs et séquences auprès de groupes ricains comme
Testament à l’occasion de leur monumental New World Order (1988).
Le morceau éponyme à l’album "
Condemned to Eternity" est l’occasion de se pencher quelques instants sur la magnifique pochette qui embellit ce disque, et qui nous place en vue subjective dans la peau d’un condamné devant une
Criminal Court anglaise au moment de sa sentence. En position plus qu’inférieure, le condamné est confronté à l’œil accusateur sinon malveillant du juge, de l’avocat général, et du jury. Il s’agit ici d’une exagération d’un procès inéquitable au terme duquel le justiciable serait condamné non pas à perpétuité, mais pour l’éternité, cette dernière revêtant une angoisse supplémentaire. La machine judiciaire que rien n’arrête, le procès inéquitable sont autant de thèmes qui sont reflétés dans cet incroyable quatrième morceau, pièce maîtresse de l’album, qui nous kidnappe le long d’un anxiogène instrumental de plus de sept minutes, mais qui ne lasse pas. La construction de ce titre au long cours est brillamment exécutée, avec une intro dépressive et acoustique calquée en grande partie sur le titre "
Prophet Of
Doom" du groupe D.A.M., suivie de trois riffs principaux qui se répètent, conférant d’avantage l’étouffement que suggère l’éternité, ici mal-vécue.
"
Shock Treatment" nous ramène sous des cieux semblables à ceux du groupe anglais
Acid Reign, et lorgnant largement sur quelques riffs heavy/thrash précurseurs de leurs compatriotes de
Blitzkrieg au début de la décennie dorée.
Le frénétique "
Buried Alive" rend la donne encore plus groovy à l’instar du
Game Over de
Nuclear Assault. "Techno Fear" reste sur des bases similaires et comporte quelques passages acoustiques éclairés.
L’édition CD la plus régulièrement disponible aujourd’hui de
Condemned to Eternity comprend également le génial EP
Deny Reality, d’avantage brut de décoffrage et qui contient quelques perles mémorables comme "
Re-Animator", "D.U.A.F.", ou encore le monstrueux "Follow The Masses", qui a certainement inspiré bien plus tard le groupe américain
Thrash Or Die sur le brûlot "
Wake Up".
En conclusion, cet opus ne peut que ravir les fans de Thrash
Old-School, et demeure avec l’EP précité le meilleur album de
Re-Animator. Le groupe s’est séparé en 1992 mais s’est très récemment reformé, peut-être dans l’espoir de goûter le temps d’une tournée à un succès non démérité qui les fuyait à l’époque.
17/20
Alors, étant plutôt perplexe pour le coup de cœur que tu ressens sur ce disque, et ce groupe, je m'abstiendrai d'en dire plus, n'étant pas réellement en mesure d'en parler plus longuement.
Néanmoins, et si je veux bien comprendre aussi ton engouement pour les groupes anglais, étant moi-même très fan des deux premiers Sabbat et du 'The Force' d'Onslaught, ce n'est pas, loin s'en faut, la scène vers laquelle je me tourne lorsque je cherche du thrashmetal de qualité.
Pour rajouter de l'eau au moulin, je me souviens de grosses publicités (avec la jolie ??? pochette en encart) dans les magazines nationaux lors de la sortie de ce disque laissant à penser au coup marketing plutôt qu'autre chose, en tout cas de gros moyens déployés par la maison de disque lors de sa sortie en bacs.
Je me demande si le groupe n'aurait pas du espacer les 2 longues pièces de plus de 7 minutes dans le track lisitng. A la suite, ça perd en percussion à mon goût.
Enfin, je comprends ce que veut dire Archiviste quant au quasi-anonymat de certains des groupes british cités. A part les vrais mordus de l'époque, nous étions nombreux, moi le premier, à faire l'impasse sur ces skeuds au profit de leurs homologues US. Un forme de "snobisme"? Peut être, même si la qualité des albums des groupes thrash Us des 80's expliquent une grande partie de mes choix d'alors. Et comme mon porte monnaie d'ado était maigre...
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