A la suite du EP "
Recognize Yourself", les choses tournent au vinaigre entre
Blood et le label
Wild Rags. Ne se sentant plus assez soutenus, ils acceptent un contrat de deux albums avec les allemands de 1MF Records. Le lineup évolue lui aussi, Martin "Chicken" Witchskinner laissant son micro au futur
Naked Whipper et
Nyctophobic Alex Schulze. Une seconde guitare s'ajoute à l'ensemble avec l'arrivée du dénommé Ruben, juste avant de rallier les
Dust Music Studio pour les sessions du second full-lenght "
Christbait".
Nous sommes en 92 et le monde se prend en pleine face depuis deux bonnes années la vague Deathmetal mondiale: les chefs d'oeuvre du genre pullulent comme des vers sur un cadavre, à l'image des "
Onward to
Golgotha", "IVth
Crusade" ou "
The End Complete" sorties cette année-là (parmi tant d'autres). Est-ce l'air ambiant de cette époque, ou bien l'apport de la seconde guitare? Probablement un peu des deux... Toujours est-il que "
Christbait" est un skeud presque 100%
Metal de la mort. Oubliez la sauvagerie (et l'amateurisme, disons-le) d'"
Impulse to Destroy", les éléments Grind sont presque totalement absents ici, ou alors bien cachés. De la (très bonne) intro rampante "
Lost Lords" aux riffs en triolet de "Join Stock Company", de l'instrumental tout en ambiance "Final
Chasm" à la bien lente et bien evil "
Mass Distortion", la quasi-totalité du contenu de l'album se cale pile poil dans la mouvance de la musique extrême la plus populaire de l'époque. Le chant d'Alex aide aussi beaucoup à aller dans ce sens: plus de reverb à outrance comme sur les grognements d'
Impulse, plus de cries aigus, seulement un growl purement Deathmetal.
Tout cela est même tellement DM que la désormais traditionnelle "Dogmatize" (la cinquième version du titre depuis leurs débuts!!!) arrive elle aussi à sonner comme le reste de l'album malgré ses passages D-beats, un comble! Même topo pour les cinq dernières, qui ne sont que des réenregistrements de vieux titres, bien meilleurs que les originaux ceci dit (considérés sur cet album comme des bonustracks de la première édition CD).
Les accélérations ne sont pourtant pas absentes, loin de là, c'est juste que l'ensemble ne sonne plus du tout Grind. Quelques passages éparses rappels parfois les débuts ("Bought Beauty", les blasts de "
And No One Cries", les vieux titres un tout petit peu...), mais ça reste vraiment épisodique.
Pour autant, il ne faudrait pas croire que "
Christbait" est un album foiré, pas du tout! De l'aveu même du groupe, c'était une sorte d'accident dans leur carrière, mais il n'en reste pas moins que des tracks comme "Scares of Soul" ou "
Mass Distortion" sont excellentes et ont bien passé l'épreuve du temps: pas mal de titres de l'album sont d'ailleurs encore joués live aujourd'hui. Peut-être aussi parce-que "
Christbait" est l'album de
Blood s'étant le mieux -ou le moins mal, c'est selon- vendu jusqu'à présent... va comprendre.
Il existe néanmoins un élément sur "
Christbait", presque inexistant jusqu'à présent, mais qui deviendra récurrent par la suite: c'est l'ambiance evil/horrifique de leur musique, mais aussi de leur concept. Du titre de l'album jusqu'à la cover (une photo de la crypte de la cathédrale de Speyer, leur ville d'origine: l'office du tourisme local aurait du sponsoriser cet album), en passant par les lyrics pas vraiment pro-Jésus de "The Last Words" ou "Harass", on se rapproche de plus en plus, sur ce point précis, du
Blood traditionnel des albums suivants. Si certains textes sont encore bien ancrés dans la réalité sociale (héritage Grind oblige), les petites histoires horrifiques font également leur apparition, ce qui deviendra la norme à partir d'"
O Agios Pethane".
En fait, l'attitude que vous adopterez par rapport à "
Christbait" est assez claire: soit vous êtes un
Grinder pur et dur et ce sera l'album de leur disco que vous aimerez le moins, soit vous ne jurez que par le Deathmetal, et il y a de fortes chances que ce soit celui que vous aimiez le plus. Vous pouvez aussi faire comme moi et choisir l'option intermédiaire: de toute façon, ils déchirent tous, les albums de
Blood.
Certains morceaux de ce très bon "Christbait", de part leur structure ainsi que par la voix d'Alex Schulze (assez proche de celle de Mark "Barney" Greenway), m'ont énormément fait penser au "Subconscious Terror" (1990) de Benediction.
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