2001, «
Entrance to
Salvation », un disque miraculeux dont les amateurs de dark-ambiant attendait la confirmation avec impatience. Cependant, ce fut un silence glacial qui plana sur un éventuel retour du compositeur Mattias Henriksson au sein de son projet
Letum. 2006, contre toute attente le projet suédois revient sur le devant de la scène avec un album sobrement intitulé «
Broken ». Autant dire que ce nouvel essai était, tout d’un coup, attendu comme le messie, surtout que sa sortie estivale en plein mois de juillet donnait une appréhension couplée d’une envie furieuse de savoir en quoi le suédois avait travaillé durant les cinq ans séparant les deux albums.
La réponse se fait sans attendre, «
Broken » est dors et déjà à mon avis un classique de cette année. Mais c’est encore là un disque qui se trouve accueilli de manière complètement contradictoire. Et pour cause, on retiendra la nouvelle offrande comme une véritable anti-thèse du travail passé comme peut si bien l’indiquer son titre. Oui, «
Broken » rompt radicalement avec «
Entrance to
Salvation » et de la façon la plus frontale qui soit. Si le premier disque se remarquait par son minimalisme ténébreux percé de rares apparitions de lumières, le dernier rejeton se fait distinguer par son hybridité et son intensité plus portée en avant. Et pour cause, le contenu de l’album est un mélange entre une ambiant classieuse à grand renfort de synthés grandiloquents avec un voile indus (certains passages se rapproche aussi du noise) omniscient qui prend même le pas sur l’ambiant « classique ». On a l’impression que le contenu se fait torturé par ces méandres « sales » (avec voix trafiquées à l’appui) comme opposition viscérale aux claviers « propres » (sons de cloches, chants sortis du premier album, orgue).
La première écoute est forcément surprenante, surtout pour ceux qui se sont habitués en l’espace de cinq ans aux morceaux homogènes et éthérés du précédent ouvrage. Cependant, l’album regorge de morceaux de bravoures d’intensités décuplées qui feraient trembler le socle de Raison d’Être jugé inviolable (et "Staring at
Nothing" c'est pas beau...). Et c’est là, que le talent de Mattias Henriksson apparaît, une nouvelle fois, au grand jour. Car, une fois passée la pilule des distorsions semées sur le disque on se rend bien compte de la cohésion des morceaux, de l’homogénéité des ambiances et surtout de la puissance saturée qui en découle ("Attempt", "
Broken", "
Betrayed", "
Silence"). Vérifiez par vous-même, les titres n’auraient pas le même effet ou l’impact sans ces réplétions ("Dissolving"). Le cachet est certes plus agressif, sombre, excessif et beaucoup moins compassionné, cependant, il en ressort aussi cette atmosphère contemplative, peut-être torturée mais jamais fortuite, distillée avec une subtilité qui ne trompe pas. Ce serait même l’auditeur qui se sentirait tromper.
Si on excepte une fin perdant en intensité (malgré une touche folk appréciable), cet objet reste un choc sonore à la mesure de l’attente qu’à susciter «
Entrance to
Salvation ». «
Broken » est un disque qui divisera car trop insolite aux oreilles. Et néanmoins, je prends pari que cet album deviendra lui aussi un classique avec le temps (si on veut bien le prendre et non le gagner). Un retour iconoclaste en grande pompe pour un groupe qu’on avait trop vite enterré...
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