Liste des groupes Metal Alternatif Forever Still Breathe in Colours

Trois années de silence radio déjà depuis leur premier et grisant album studio, « Tied Down »... Une éternité pour les fans du combo danois cofondé en 2010 par le pluri-instrumentiste Mikkel Haastrup et la soprano et claviériste Maja Shining ! Ce qui ne signifie nullement qu'ils soient restés dans l'ombre pour autant, nos acolytes ayant enchaîné les concerts aux quatre coins de l'espace européen entre 2016 et 2019 (Z7 (Pratteln, Suisse), La Laiterie (Strasbourg, France), KOKO (Londres, Royaume-Uni)... en 2016 ; Longhorn (Stuttgart, Allemagne), Komplex (Zurich, Suisse), Arena (Vienne, Autriche)... en 2017 ; Summer Breeze Open Air (Dinkelsbuhl, Allemagne), Dirty Days Of Summer (Copenhague, Danemark)... en 2018...).

Déjà à la tête de trois EP (« Breaking Free » (2013), « Scars » (2014) et « Save Me » (2015)) en plus de l'opus sus-mentionné et fort d'un remarquable background scénique, près de dix ans suite à sa sortie de terre, le prolifique et talentueux collectif souhaite désormais, et légitimement, porter l'estocade. Aussi, aux fins d'un travail des plus exigeants en studio, nos acolytes nous octroient ici un second effort de longue durée répondant au nom de « Breathe in Colours ». Sorti tout comme son aîné chez le puissant label allemand Nuclear Blast, ce nouvel arrivage serait-il à même de les propulser parmi les valeurs confirmées de ce registre metal, dont la concurrence pourrait dorénavant avoir à se méfier ?

Dans ce dessein, le line-up s'est enrichi des talents de leur batteur live de longue date, Rune Frisch. Ce faisant, le combo nous plonge cette fois dans un metal atmosphérique gothique aux relents rock mélodique, symphonique, groove et death, non sans renvoyer à Autumn, Kingfisher Sky, Passionworks, One Without et The Flaw, mais aussi à Within Temptation (dernière mouture), Lacuna Coil, Tristania et Evanescence. Une évolution stylistique qui a pour corollaire un jeu d'écriture empreint de maturité, d'inédites sonorités et prestations vocales doublées de l'une ou l'autre prise de risque ; de remarquables progrès répondant aux actuelles exigences artistiques de ses concepteurs, contribuant précisément à éloigner ce propos de son prédécesseur.

Produites, enregistrées, mixées et mastérisées par Mikkel Haastrup, et co-arrangées avec Maja Shining, les 45 minutes de la galette révèlent une qualité d'enregistrement comparable à sa devancière, des finitions réglées au millimètre et, là encore, une substantielle profondeur de champ acoustique. C'est donc sous les meilleurs auspices que s'annonce la traversée, non sans quelques surprises au programme...

Plus qu'il ne l'a consenti jusqu'alors, le groupe alimente certains de ses passages d'énergisantes et symphonisantes phases, avec, pour effet, de nous retenir plus que de raison. Ainsi, dans l'ombre d'un Within Temptation de la dernière cuvée, sous couvert d'organiques sonorités sur lesquelles se greffent des riffs massifs, le mid tempo « Rewind » délivre un refrain immersif à souhait, mis en exergue par les claires et puissantes inflexions de la sirène. Dans la lignée de Lacuna Coil, le tortueux mid tempo « Embrace the Tide », lui, dissémine ses riffs tourbillonnants tout en décochant des couplets finement ciselés, révélant parallèlement une poignante reprise sur la crête d'un refrain que l'on entonnerait à tue-tête. Deux hits en puissance s'esquissent alors, que l'on ne quittera qu'avec l'indicible espoir d'y revenir, histoire de plonger à nouveau dans ces océans de félicité.

Moins directement orientés vers les charts, d'autres espaces d'expression pourront non moins aspirer le tympan du chaland. Aussi, à mi-chemin entre Lacuna Coil et Evanescence, le mid tempo « Do Your Worst » délivre ses riffs vrombissants tout en se greffant sur une mélodicité aux fines nuances. Dans ce vaste champ de turbulences évoluent les corrosives patines de la déesse. Et la sauce prend là encore sans tarder.

Dans un souci de diversification oratoire, la frontwoman a nourri certaines plages de screams au caractère bien trempé. Ce qu'attestent, tout d'abord, « Fight! » et « Breathe in Colours », énigmatiques et rageurs mid tempi atmosphérique gothique aux relents death à la confluence de Lacuna Coil, Kingfisher Sky et Tristania, où voix claire et screams saillants n'ont de cesse de se relayer, et, par là-même, de nous happer. Sur un même modus operandi, mais déployant une rythmique un poil plus saignante, le groovy « Survive » se plaît à nous secouer, voire à nous désarçonner, pour mieux nous retenir, in fine. Autre corde à rajouter à l'arc de l'inspiré trio, donc...

Quand l'ambiance se fait plus apaisante, elle se fait également plurielle, nos compères trouvant alors à nouveau les clés pour aspirer le tympan. Ce qu'illustrent, d'une part, « Is It Gone? » comme « Rising over You », power ballades romantiques jusqu'au bout des ongles, voguant toutes deux sur une radieuse rivière mélodique qu'empruntent les troublantes modulations de la maîtresse de cérémonie, que n'auraient reniées ni Kingfisher Sky ni Evanescence. Se déversant sur un piano/voix pétri d'élégance et des plus délicats, la version acoustique de « Is It Gone? », quant à elle, transfigure l'originale au point de la muer en une hypnotique ballade a-rythmique. Chapeau bas.

Mais la troupe a étoffé la palette de son offre d'intimistes espaces de bien d'autres variations atmosphériques. Ainsi, aux airs d'un slow typé mid-80s qui emballe, l'aérienne et ''gatherienne'' ballade « Perfect Day » fera chavirer plus d'un cœur en bataille. Plus mélancolique, et dans la veine de Passionworks, la caressante « Say Your Goodbyes », pour sa part, essaime sa sensibilité à fleur de peau ainsi qu'un infiltrant cheminement d'harmoniques. Et la magie opère, une foie encore. Plus énigmatique et tourmenté, nous immergeant également dans un bain orchestral aux doux remous et lui aussi encensé par les poignantes impulsions de la belle, l'''autumnien'' low tempo atmosphérique gothique « Pieces » ne saurait davantage se voir esquivé. Bref, un secteur largement exploité que le combo a élevé au rang d'un art.

Au final, le trio danois nous livre une œuvre aussi chargée en émotion que diversifiée sur les plans atmosphérique et rythmique, bénéficiant d'une ingénierie du son rutilante, et transpirant la féconde inspiration mélodique de ses auteurs. Digne successeur d'un mémorable « Tied Down », ce nouvel opus s'en distingue au regard des prises de risques consenties et de ses variations stylistiques et oratoires. Conjuguant habilement authenticité et modernité, techniquement et artistiquement aussi abouti et un poil moins emprunté que son aîné, et bien que surinvesti en low tempi, ce poignant et fringant message musical pourra répondre aux attentes du fan de la première heure ainsi qu'à celles d'un tympan déjà familiarisé avec les vibes de leurs maîtres inspirateurs. C'est dire qu'à l'aune de cette gemme lovée dans un écrin de satin, le combo a désormais une belle carte a jouer pour espérer se hisser parmi les valeurs confirmées du metal alternatif à chant féminin. Bref, un groupe qui a le vent en poupe...