S'il est des formations désireuses de se laisser le temps nécessaire à la pleine maturité de leurs gammes et de leurs arpèges avant de se lancer dans l'arène, ce quartet autrichien natif de Vienne serait assurément du nombre. En effet, cofondé en 2015 – sous l'impulsion commune de Susanne Pointinger, dite ''Suzy 'Alyson' Q'' (
Sextiger), chanteuse aux chatoyantes inflexions, d' Alexander Schmid (
Days Of Loss, ex-
Brewed And Canned, ex-
Mastic Scum) aux guitares, et de Maximilian Fingernagel (
Brewed And Canned,
Days Of Loss, ex-
Sextiger) derrière les fûts –, le groupe ne réalisera son premier et grisant album full length, «
Undying », que six ans plus tard ! Il faudra alors patienter la bagatelle de trois années supplémentaires avant de nous gratifier d'un second effort de même acabit, répondant au nom de «
Bedtime Stories ». A la lumière des 10 pistes de la fraîche rondelle, le combo aurait-il dès lors les armes requises pour s'imposer parmi les valeurs montantes d'un metal symphonique gothique toujours en proie à une sévère concurrence ?
Dans ce dessein, une refonte partielle du line up originel s'est opérée, avec le remplacement de Ben Pauswek (
Days Of Loss) par Ken Straetman (
Boon, ex-
Days Of Loss, ex-
Manic Movement) à la basse. Avec le concours, pour l'occasion, de Maximilian Perstl aux orchestrations. De cette collaboration émane un mouvement metal mélodico-symphonique gothique à la fois impulsif, engageant, empreint de délicatesse et fortement chargé en émotion, inspiré à son tour par les vibes de
Lacuna Coil,
Autumn,
Gwyllion,
Nightwish et
Evanescence. Conjointement enregistré, mixé et mastérisé par le producteur Norbert Leitner (
Ecliptica, Lowbau,
Monument Of Misanthropy,
Veil Of
Deception...) – déjà sollicité sur le premier élan – et par le groupe lui-même, ce set de compositions témoigne, tout comme son prédécesseur, d'une production d'ensemble de bonne facture, évacuant, de fait, toute sonorité parasite. Mais montons sans plus attendre à bord du cargo pour une traversée au long cours dans une mer un tantinet agitée...
Si c'est à pas feutrés que démarrent les hostilités, à l'aune de la brève et cinématique entame instrumentale aux arrangements ''nightwishiens'' «
Lilith (Intro) », l'arbre, aussi majestueux soit-il, ne saurait cacher la forêt bien longtemps...
A l'image du précédent effort, c'est cheveux au vent que s'effectue la majeure partie de la croisière, avec pour effet de nous retenir plus que de raison, bien souvent. Ce que ne saurait démentir, tout d'abord, « Underworld », mid/up tempo aux riffs épais, à la confluence de
Lacuna Coil et d'
Autumn. Pourvu de saillants coups de boutoir et d'un vibrant solo de guitare, l'entraînant méfait se dote parallèlement d'un refrain catchy mis en habits de lumière par les pénétrants médiums de la sirène, qui ne sont pas sans rappeler ceux de Nienke de Jong (DejaFuse, ex-
Autumn). Et la sauce prend, sans tarder. Sur un même modus operandi, le rayonnant mid/up tempo «
Northwind », lui, happera le tympan au regard de ses enchaînements intra piste ultra sécurisés.
Quand il en vient à intensifier d'un cran l'intensité de ses frappes, le collectif trouve non moins les clés pour nous retenir plus que de raison. Ainsi, pourvus de séries de notes non moins efficaces, et portés par les corrosives et corpulentes impulsions de la déesse, alors apparentées à celle d' Annelore Vantomme (feu
Gwyllion), les ''lacunacoilesques'' « The
Wolf » et « Foreign
Flames », pour leur part, pousseront assurément à un headbang bien senti et quasi ininterrompu. Dans cette mouvance, on ne saurait davantage éluder ni le tonique et ''tubesque'' «
Bedtime Stories » ni le solaire « Sparks », tant pour l'infiltrant cheminement d'harmoniques qu'ils nous invitent à suivre que pour leur flamboyant solo de guitare.
Un zeste moins enfiévrées, d'autres plages sauront à leur tour se jouer de toute tentative de résistance à leur assimilation. Ce faisant, sous couvert de riffs crochetés et de coups de tambour à la cadence mesurée et métronomique, le ''gwyllionien'' mid tempo «
Ashes to
Ashes » nous immerge au cœur d'un enivrant paysage de notes au sein duquel déambulent les rocailleuses et poignantes ondulations d'une interprète bien habitée. Et la magie opère, une fois encore. Difficile également de se soustraire à la vague de submersion qui va s'abattre sur nous sur «
H.eart.h », ''lacunacoilesque'' mid tempo progressif aux riffs vrombissants ; calé sur une sente mélodique, certes déjà courue, mais des plus impactantes, recelant parallèlement de délicats arpèges au piano et dévoilant, par contraste, une insoupçonnée et saisissante densification de son corps orchestral une fois le convoi bien lancé, ce hit en puissance ne se quittera que pour mieux y revenir, histoire de plonger à nouveau dans cet océan de félicité.
Comme ils nous y avaient déjà sensibilisés, lorsque nos belligérants nous mènent en des espaces plus ouatés, ils parviennent alors, et d'un battement d'ailes, à générer la petite larme au coin de l'oeil. Ce qu'illustre « Your
Hand », une ''evanescente'' ballade sous-tendue par un délicat picking à la guitare acoustique, et glissant le long d'une radieuse rivière mélodique sur laquelle se greffent les cristallines oscillations de la maîtresse de cérémonie. Un instant privilégié d'une rare intensité émotionnelle, que l'aficionado de moments intimistes se fera fort de ne pas occulter.
Pour son retour, le combo viennois nous livre un propos à la fois rayonnant, abrasif à ses heures, félin et romanesque, apte à stimuler le désir d'y revenir une fois la chute finale entamée. Bénéficiant, certes, d'une ingénierie du son plutôt soignée, offrant alors un confort d'écoute suffisant pour le parcourir d'un seul tenant, le méfait ne se fait guère plus diversifié que son aîné eu égard à ses ambiances et à ses lignes de chant, la belle monopolisant, une fois de plus, le micro de bout en bout de de la galette. Afin d'élargir le champ de son auditorat, il conviendrait encore que nos acolytes consentent également à l'octroi d'exercices de style plus variés ainsi qu'à quelques prises de risques supplémentaires.
Témoignant cependant d'une technicité instrumentale affermie et de sentes mélodiques un poil plus immersives qu'elles ne le furent sur son devancier, ce second élan constituerait une arme de jet des plus redoutables pour espérer voir nos gladiateurs opposer une farouche résistance face à leurs homologues stylistiques, toujours plus nombreux à affluer.
Plus encore, le collectif détiendrait là son bâton de maréchal pour se hisser dès lors parmi les valeurs montantes de ce registre metal. Bref,
décollage amorcé pour l'escadron autrichien..
Note : 15,5/20
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